• «Les prérogatives du président de la Républiques, déjà réduites, n'ont pas été respectées, déplore Ahmed Soueb magistrat au Tribunal administratif Inexorablement, la mise en place de la nouvelle Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE) est en train de se mouvoir en un feuilleton mexicain hallucinant en rebondissements rocambolesques. Après la publication, sur le site internet de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) de la liste des 36 candidats retenus par la Commission de Tri et l'adoption des amendements introduits dans la loi fondamentale créant cette instance, les observateurs et l'opinion publique s'attendaient normalement à la fixation d'une date pour une séance plénière de l'ANC pour l'élection des membres. Quelle fut leur surprise, quand le Tribunal administratif a informé hier l'ANC qu'il était dans l'erreur. La « loi » utilisée est quasiment inexistente. Comme l'a précisé au Temps Ahmed Soueb, magistrat administratif de longue carrière, « l'habilitation et la compétence attribuées par le projet de loi organique en question ont été refusées, par ce que deux formalités substantielles énoncées par la petite Constitution (la loi fondamentale d'organisation provisoire des pouvoirs) n'ont pas été respectées. Il s'agit de la ratification et de la publication au Journal Officiel de la République Tunisienne (JORT) du projet de loi ». En clair, dans la ratification, le président de la République peut refuser le dit projet de loi. « Le pouvoir législatif a violé une compétence de fonds accordée au président de la République. C'est une atteinte grave aux attributions déjà limitées du président de la République », s'écrie notre magistrat administratif. N'ayant été ni ratifiée, ni publiée au JORT, c'est presqu'une loi inexistante. « On ne peut résoudre un contentieux par une loi hautement non constitutionnelle », rappelle le magistrat. Quelle est la solution ? Que faire ? Notre interlocuteur affirme qu'il faut soumettre le projet de loi au président de la République pour sa ratification, puis le publier dans un délai de 48 heures au JORT, tout en incluant au texte un paragraphe annonçant son effet rétroactif à partir du 29 octobre pour valider ce qui a été fait. Un autre détail, il faut que l'application de la loi soit immédiate à sa publication. D'habitude, on attend 5 jours pour commencer l'application d'une loi. Quinze juges du Tribunal administratif ont pris cette décision. Ils jouissent d'une expérience de 20 ans chacun, en moyenne. Faites la multiplication. Comment expliquer ces maladresses, certes formelles, mais qui ont leurs fâcheuses incidences ? Ahmed Soueb pense que tant que le politique domine le droit, cela donne des textes, du moins inapplicables et en flagrante violation des principes basiques du Droit. Que faut-il, comme spécialités, pour élaborer ce genre de texte ? Notre magistrat affirme qu'il faut la participation de spécialistes en Droit public, en Droit administratif et en Contentieux. Par ailleurs, le délai de trois jours laissé au Tribunal Administratif pour examiner les litiges concernant l'ISIE, est-il suffisant ? Comme les différents protagonistes du dialogue national se sont engagés à respecter les décisions du Tribunal administratif, (ont-ils le choix ?), un retard de quelques jours pour la mise en place de l'ISIE sera observé. Pourvu, que ça s'arrête là.