La proposition du mouvement Ennahdha de désigner un candidat de consensus à la prochaine présidentielle commence à faire des adeptes. Bien que son parti ait déjà rejeté cette initiative estimant qu'elle est «contraire aux principes démocratiques» le leader du Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL/ou Ettakatol), Mustapha Ben Jaâfar a déclaré qu'il serait «ravi de se voir désigner candidat consensuel à l'élection présidentielle». Dans un entretien accordé au journal «Echark Al-Awssat», M. Ben Jaâfar a indiqué qu'il en serait honoré, en particulier si son parti Ettakatol, approuvait sa candidature pour l'élection présidentielle lors du prochain conseil national qui se tiendra au mois d'août prochain. Il a également cité que le leader de Nida Tounes, Béji Caïd Essebsi ne peut pas prétendre à être candidat consensuel. L'actuel président de l'Assemblée nationale constituante (ANC) a fait savoir, dans ce cadre, que la proposition d'Ennahdha relatif au choix d'un candidat de consensus, signifie une évolution du mouvement islamiste qui «devient conscient des difficultés dans la gestion des affaires de l'Etat en tant que parti dominant». Interrogé sur le bilan de la Troïka, dont Ettakatol faisait partie aux côtés d'Ennahdha, et du Congrès pour la république (CPR), M. Ben Jaâfar a déclaré que cette expérience de coalition a été nécessaire pour conduire la transition démocratique dans le pays et qu'elle était «une réussite» et que «son bilan au pouvoir était grosso modo positif». Le secrétaire général d'Ettakatol a, par ailleurs, indiqué que les périodes transitoires ne devraient pas être gérées dans le cadre d'une forme traditionnelle de la démocratie dans laquelle la coalition au pouvoir gouverne et l'opposition critique et souhaite l'échec du gouvernement. «La période de transition ne supporte pas la démocratie sous sa forme traditionnelle, à savoir, une confrontation gouvernement-opposition, parce que nous devons travailler main dans la main pour dépasser les obstacles. Des parties ont critiqué ma position mais en dépit de toutes les difficultés et les graves événements survenus en Tunisie, les assassinats politiques et le terrorisme, générant des tensions internes, il existe un consensus aujourd'hui pour dire que la Tunisie a réussi sa transition», a-t-il souligné. A noter que la majorité des partis politiques et des candidats consensuels potentiels ont rejeté la proposition du mouvement Ennahdha relative au choix du futur locataire du Palais de Carthage par la voie d'un consensus. Ainsi, le leader du parti Républicain (Al-Joumhouri), Ahmed Néjib Chebbi, a déclaré, le 23 juin, qu'il refusait d'être un candidat consensuel à la présidentielle, qualifiant cette approche de contraire à l'esprit de la démocratie, tout en rappelant que l'expérience du choix d'un candidat consensuel en 1989 qui était une erreur à ne pas refaire. Ennahdha défend son initiative L'actuel président provisoire de la République Moncef Marzouki, qui fait partie des candidats consensuels potentiels, ne s'est pas jusqu'ici exprimé. Son parti, le CPR, a, cependant, qualifié la proposition d'Ennahdha de « contraire à l'esprit de la démocratie dont l'une des principales conditions est de garantir le droit d'éligibilité pour tout citoyen ». Le président de Nida Tounes, Béji Caïd Essebsi, que les sondages placent au premier rang en ce qui concerne les intentions de vote pour la présidentielle, ne semble pas intéressé par l'offre d'Ennahdha. Le porte-parole de Nida Tounes, Lazher Akremi, a d'ailleurs estimé que la proposition d'Ennahdha n'est pas réalisable sur le terrain. « Cette proposition est très romantique dans la mesure où on ne peut pas obliger certains candidats à se désister, et au cas où le but de l'initiative d'Ennahdha est de faire bénéficier un candidat bien déterminé du soutien de plusieurs partis cela revient à créer une coalition électorale », a-t-il déclaré, signalant que Nida Tounes ne cherche aucunement un consensus autour de son candidat, Béji Caïd Essebsi. L'ancien ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle et membre d'Ennahdha, Samir Dilou, a, de son côté, précisé qu'il est peu probable que Béji Caid Essebsi puisse être un candidat consensuel lors de prochaine échéance électorale. M. Dilou a aussi indiqué que la Tunisie aura besoin d'un consensus sur le président de la République vu que ce poste important constitue le symbole de l'unité nationale et doit rester à l'écart des tiraillements partisans. Selon lui l'initiative d'Ennahdha n'est pas contraire aux principes de la démocratie et ne touche pas l'essence de l'opération électorale, comme le présument certains dirigeants de partis politiques. D'autant plus que le peuple aura à choisir lors de la prochaine présidentielle entre un président consensuel - si l'initiative de son parti est acceptée - et d'autres candidats d'un parti ou d'un ensemble de partis. Le conseil de la Choura du mouvement Ennahdha avait déjà appelé récemment à un «dialogue, large et profond, entre les différents acteurs politiques et sociaux autour des élections présidentielles, en vue de parvenir au consensus le plus large possible autour d'une personnalité nationale, à même d' œuvrer à concrétiser les objectifs de la révolution et à consacrer l'édification démocratique».