"Tes souvenirs se voilent. Ça fait comme une éclipse. Une nuit pleine d'étoiles sur le port de Tunis. Le vent de l'éventail de ton grand-père assis au Café des Délices." Si la réputation du Café Sidi Chebâane, situé sur les hauteurs de Sidi Bou Saïd et offrant une des plus belles et incroyables vues de toute la Tunisie, n'était plus vraiment à faire, avouons que la chanson de Patrick Bruel, écrite en 2004 a largement contribué à faire connaître encore plus ce lieu mythique surplombant le port de Tunis. Dix ans après, la vue continue toujours de faire rêver mais plus le café à cause des dépassements graves qui y sont enregistrés. Une campagne citoyenne a même été lancée afin de boycotter ce lieu tant les plaintes des clients se sont faites nombreuses depuis quelques temps: mauvais accueil, prix exorbitants et souvent proposés à la tête du client, jus censés être frais au goût horrible, problèmes d'hygiène...Début mai, un ticket de caisse émanant du café des délices faisait le tour des réseaux sociaux tunisiens, provoquant l'ire des internautes. Une bouteille d'eau minérale, deux citronnades, deux cafés turcs, quatre thés au pignon et une assiette de gâteaux tunisiens étaient facturés 56 DT. Quelques jours plus tard, un autre ticket émanant du même café faisait lui aussi le tour de la toile tunisienne. Cinq bricks au thon, cinq assiettes de salade tunisienne, quatre express et deux bouteilles d'eau minérale étaient facturés 161,5 DT. Scandale ! C'est alors que les langues se sont déliées. Tous se sont plaints du mauvais accueil, de la qualité de service pitoyable, des serveurs qui imposent aux clients où ils doivent s'asseoir et qui crient sur les enfants qu'ils jugent un peu trop chahuteurs, des prix non affichés, des assiettes de gâteaux traditionnels qu'on fait mine de vous offrir mais qui est finalement facturée à dix dinars, des boissons au goût infect, l'insalubrité des WC... Mais où est passé le charme du café Sidi Chebâane, ce lieu magique où l'on venait se ressourcer, observer les bateaux accostés au port, plonger les yeux dans la mer cristalline et laisser libre court à ses pensées et rêveries ? Mais le pire était à venir. D'anciens touristes qui se sont rendus dans ce café ont eu vent de cette affaire et ont eux aussi tenu à raconter leurs mésaventures: des boissons qu'on leur faisait payer au triple du prix réel, les photos payantes de la vue, l'attitude moqueuse des serveurs... Au fil des jours, les doléances se faisaient de plus en plus nombreuses et les critiques acerbes aussi bien sur la page Facebook créée à cet effet mais aussi, plus grave, sur des sites web de grande renommée qui publient des avis de consommateurs sur tous types d'établissements touristiques et dont raffolent les internautes qui partent an vacances tels que TripAdvisor ou encore PetitFuté. Trop c'est trop !En plus de nuire à son commerce, l'actuel gérant du café ne réalise pas qu'il nuit également à l'image de notre pays et à celle du tourisme tunisien. Tous ceux qui y sont allés jurent leurs grands dieux qu'ils n'y remettront plus les pieds tant ils sont déçus par l'ensemble des prestations. Les avis sont unanimes: Il faut lancer des actions citoyennes de boycott en plus d'aviser les autorités compétentes. Contactée à ce sujet, l'Organisation de Défense du Consommateur (ODC) a immédiatement réagi en interpellant Raouf Dakhlaoui, l'actuel maire de Sidi Bou Said sur les nombreux cas de non-respect de la loi enregistrés et en appelant la mairie à intervenir rapidement en faisant appel à la police touristique pour mettre fin à ces dépassements. L'ODC s'est également engagée à adresser un courrier officiel au gérant du café pour l'inciter à prendre en compte les très nombreuses plaintes des clients et à prendre des mesures d'urgence pour redorer le blason de son café "des délices". Une action citoyenne a également été menée un peu avant ramadan et consistant à s'installer au café, de demander la carte puis de repartir sans rien consommer. D'autres actions seront menées sous peu et nombreux sont les citoyens qui ont juré de ne pas lâcher l'affaire et réclament même un audit fiscal des comptes du café sur les cinq dernières années.