Un échange de tirs a eu lieu, vers 4h10, à l'aube du jeudi 10 juillet, suite à une descente sécuritaire à la mosquée Khaled Ibn Walid de Sidi Bouzid et à ses environs, avec des extrémistes religieux. Un leader d'Ansar al-Chariaa, qui avait été imposé par ses pairs Imam prédicateur de cette mosquée, a été arrêté lors de cette opération, ainsi que 30 autres individus, dont plusieurs femmes qui se trouvaient à l'intérieur du lieu de culte. Ce suspect avait été auparavant arrêté dans l'affaire de l'attaque terroriste de Sidi Ali Ben Aoun pour être ensuite libéré. L'hôpital régional à Sidi Bouzid n'a jusqu'à présent signalé aucune blessure ou décès pour les deux côtés, tandis que les assauts sécuritaires se sont poursuivis dans certaines maisons de la région. Des sources fiables précisent que lors de l'intervention de la brigade sécuritaire, le bruit d'échanges de tirs à l'intérieur de la mosquée et ses environs a été entendu. Le leader d'Ansar Chariaâ à Sidi Bouzid, en même temps Imam de cette mosquée a été arrêté. Des courses poursuites à la trousse des extrémistes ont été engagées dans plusieurs quartiers de la ville. Certaines maisons ont été investies par les forces de l'ordre. Une voiture de protection civile était sur place. L'opération s'est déroulée dans le calme de la nuit. Il n' ya pas eu de révélations sur la saisie ou non d'armes , ni sur les raisons qui sont derrière cet assaut. C'est la première fois à Sidi Bouzid, contrairement aux évènements de Zaafria qui avaient enregistré deux blessés, ou Sidi Ali Ben Oun où 6 martyrs et 3 blessés, où les agents de sécurité anticipent et prennent le devant. C'est une opération sécuritaire d'un genre nouveau. Hier, en cours de journée le ministère de l'Intérieur a publié un communiqué dans le quel il avance que des unités de sécurité de la garde nationale et de la police ont procédé à une opération sécuritaire d'envergure au gouvernorat de Sidi Bouzid, visant des éléments « takfiristes » appartenant à ladite organisation interdite Ansar Chariaa. Ces éléments sont recherchés par les forces de sécurité et la justice. Huit ont été arrêtés et de grandes sommes d'argent destinées à financer l'organisation ont été saisies. L'enquête se poursuit auprès des unités spécialisées dans la lutte contre le terrorisme. Ce succès de nos forces de sécurité laisse dire l'historien Aleya Allani, spécialiste des mouvements islamistes, que leur intervention entre dans le cadre de la politique de contrôle des actions des terroristes. Il s'agit de les devancer. Il ajoute que « Sidi Bouzid est une des régions où le terrorisme s'est implanté depuis plusieurs mois, depuis le Gouvernement de la Troïka qui n'a rien fait pour un développement véritable de ces régions. Sidi Bouzid est considéré depuis longtemps comme un centre de rayonnement des courants takfiristes. Al-Khatib Al-Idrissi, enfant de la région, est le théoricien et le père spirituel du courant Ansar Chariaâ en Tunisie ». Il était contre la transformation d'Ansar Chariaâ de courant idéologique à un courant politique, chose survenue sous Abou Yadh. Ansar Chariaâ est devenu l'ennemi direct du pouvoir. La confiscation d'importantes sommes d'argent auprès des détenus, démontre plusieurs choses, selon notre universitaire. Tout d'abord, la pauvreté qui a marqué Sidi Bouzid depuis des décades et s'est aggravée après la Révolution, a fait de cette région un espace privilégié pour le blanchiment de l'argent du terrorisme. Il est donc urgent de revoir le tissu associatif dans la région. Il est fort probable qu'il y ait certaines associations qui nécessitent un audit profond de ses comptes et ses programmes d'action. Ansar Chariaâ trouve dans certaines régions une pépinière sociale pour ses activités. C'est un scénario qui ressemble à celui de l'attaque de la maison du ministre de l'Intérieur à Kasserine. « La forte présence d'Ansar Chariaâ à Sidi Bouzid, Kasserine, Jendouba et autres régions marginalisées confirme l'échec du modèle de développement du gouvernement des Islamistes et l'absence de stratégie religieuse modérée de ce gouvernement. La marginalisation s'est poursuivie avec l'actuel gouvernement qui s'est retrouvé avec un lourd héritage d'erreurs dans la politique de développement régional. En plus, la loi de finances complémentaire n'a pas consacré de sommes consistantes et importantes pour améliorer la situation sociale et économique dans ces régions. Il est donc plausible de voir le phénomène terroriste continuer à se développer dans ces régions. Il ne faut pas oublier que la force du courant jihadiste dans ces régions prouve l'échec de l'Islam politique à rationaliser l'islam radical à côté de son échec dans le domaine économique. En plus l'échec dans la mise à l'écart des mosquées de l'instrumentalisation partisane, ne fera qu'aggraver les choses », affirme notre universitaire. Il pense que les dernières actions d'Ansar Chariaâ à Sidi Bouzid sont liées à ce qui se passe en Libye et en Irak où Dae ch est devenu un symbole de résistance et de révolution, pour les partisans d'Ansar Chariaâ. L'allégeance des cellules libyennes d'Al-Qaïda à l'emir de Daech et l'appel d'Abou Yadh à l'unification des courants jihadistes dans un grand congrès au mois de Ramadan, révèle la volonté d'Ansar Chariaâ de jouer un rôle qui serait déterminant. Aleya Allani précise que « Ansar Chariaâ en Tunisie et en Libye savent très bien que leurs perspectives d'action sont devenues limitées surtout après la perte du courant de l'Islam politique et des courants salafistes de leurs positions dans les dernières élections parlementaires du 25 juin en Libye. Les résultats préliminaires ne donnent pas aux islamistes plus de 14% des sièges. Ces derniers après avoir été majoritaires sont devenus minoritaires. La place des membres d'Ansar Chariaâ dans le gouvernement et le parlement actuels est devenue insignifiante. Les sérieuses menaces de Haftar d'exclure et liquider les groupes jihadistes, posent de sérieux problèmes aux éléments jihadistes tunisiens résidents en Libye ou encore sur place en Tunisie sous la forme de cellules dormantes». Ce qui s'est passé à Sidi Bouzid, Kasserine, Jendouba et ailleurs, laisse penser que le taux d'abstention lors des prochaines élections sera élevé. Notre universitaire s'interroge : le double échec de l'Islam politique et le courant salafiste avec ses deux branches réformiste et jihadiste dans le monde arabe mènera-t-il à tourner définitivement la page du Printemps arabe ? Le phénomène démocratique se développera –t-il en tant que courant alternatif ? La Tunisie aura-t-elle à affronter des secousses successives en l'absence de modèle de développement juste et d'une vision éclairée de l'Islam ?