Le monde est entré en pleine zone de grosses turbulences et ce, pour longtemps parce que le mal est trop profond pour être traité au calmant superficiel. Premier élément déterminant, la démographie. La planète terre souffre d'excédents de populations de plus en plus marginalisées et exclues du bien être minimal « garanti ». Or, comme le dit le cousin du Prophète (SAWAS), Ali : « Al fakr kafer » (la pauvreté est mécréante). Toutes ces peuplades qui se comptent en centaines de millions et qui ne mangent pas à leur faim, vont être de plus en plus happées et recrutées par les fausses promesses des partis de l'irrationnel et des idéologies messianiques. L'Etat providence issu de la modernisation socialisante et de la distribution des richesses et du produit de la croissance a démontré largement ses limites, parce que le flux des déshérités et en constante progression. D'où la conséquence tragique : On met en question et de plus en plus, l'Etat institutionnel et d'où aussi, l'émergence dans plusieurs contrées des « Etats miliciens », où, à chacun selon ses besoins, les seigneurs de la guerre s'approprient les sources de financement en occupant les puits de pétrole mais aussi en passant au stade « mafieux » du commerce des drogues en tout genre. La Libye est en passe de devenir le cas d'espèce, facilité par la structure tribale du pays et l'absence d'autorité centrale crédible. Là, il va falloir poser les vraies questions au niveau stratégique, dont celle de la Démocratie et du centralisme. En terme plus terre à terre, la Démocratie politique, peut elle stabiliser des pays minés par la pauvreté excessive et peut-elle assurer la croissance, alors qu'elle n'a fait jusque là que favoriser l'instabilité et la division au nom de la multiplicité culturelle et politique. En d'autres termes quelle démocratie doit-on « inventer » pour qu'un pays comme la Libye retrouve la concorde ! Faut-il accepter les « Etats miliciens » qui font la loi, ou faut-il rebâtir l'Etat unitaire centralisé. Or, l'Etat fort et centralisé n'est pas gros consommateur de « démocratie pluraliste » qui ne s'épanouit qu'avec les pouvoirs dits « faibles ». D'ailleurs les doctrinaires et politistes les plus influents reconnaissent comme John Locke, Montesquieu, Alexis de Tocqueville ou Raymon Aron, que la démocratie ne croît et ne progresse que dans un environnement de séparation des pouvoirs et surtout une sorte d'affaiblissement de l'exécutif. L'Angleterre qui est la mère des démocraties modernes, a connu parfaitement ce cycle. Depuis les chartes de 1215, la démocratie parlementaire n'a pu progresser que par l'affaiblissement des pouvoirs et ceux du « Roi » et l'acquisition de nouvelles autorités par le Parlement, jusqu'au jour, où finalement, le Parlement est devenu le véritable détenteur de l'exécutif, alors que sa vocation première est législative. La Tunisie joue, aujourd'hui, un gros pari, en donnant ces deux pouvoirs (le législatif et l'exécutif) au futur Parlement. Alors, qu'allons-nous devenir après le centralisme de l'Etat bourguibien-destourien, et la pagaille du « non-Etat » de la transition troïkiste ? En effet, la fameuse Troïka qui n'était que le reflet du vrai miroir du pouvoir détenu par la « Nahdha » et sa majorité hégémonique à l'ANC, a failli déstructuré en trois ans et en totalité l'Etat national moderne « centralisé » et nous sommes passées miraculeusement et heureusement, à côté d'une « milicisation » de l'Etat à la libyenne. Il faut en être bien conscient et rendre hommage au sursaut démocratique et culturel des manifestantes et des manifestants nocturnes du « Bardo » qui ont permis au « dialogue national » d'aboutir à cette Constitution « consensuelle » et au gouvernement technocratique de M. Mehdi Jomaâ qui ont, quand même, apaisé le pays. Dernière image, pour ne pas ajouter à votre angoisse de fin de transition, imaginez l'Egypte avec ces cent millions d'âmes, gouvernée aujourd'hui, par des mini-Etats « miliciens » ! Rien qu'à deviner la scène de milliers de bandes armées (toujours par nos chers frères... !), prendre possession chacune de « sa » pyramide et d'un compartiment du Musée pharaonique du Caire, il y a de quoi réveiller «Ramsès II » ou l'Empereur « Tatan Khamoun » pour crier aux Egyptiens : «Imbéciles... Votez Essissi »... C'est le seul capable de sauver l'Egypte de la déchéance et de la guerre civile perpétuelle ! Quant à nous, faisons pour le mieux pour réussir le pari de fabriquer une « Démocratie » parlementaire pluraliste sans détruire l'Etat national moderne suffisamment fort et crédible pour nous immuniser contre l'Etat... ou les Etats « miliciens » ! Alors à défaut de Essissi qui n'est peut-être pas adapté à notre histoire... Votons utile et surtout ne cherchons pas la lune car nous sommes en plein automne !