Selon l'Observatoire National de la Sécurité Routière (ONSR), 5471 accidents de la circulation se sont produits au cours des huit premiers mois de l'année 2014, faisant 18 604 blessés et causant la mort de 1 019 personnes. Du 1er octobre au 8 décembre, on recense 1256 accidents routiers, faisant 288 décès et 1903 blessés, tous gouvernorats confondus. A noter que c'est à Tunis que l'on recense le plus grand nombre d'accidents routiers puis à Ben Arous, Sfax, Nabeul et Ariana. A noter qu'une nette augmentation des infractions routières (non respect du panneau Stop, dépassements interdits, excès de vitesse, portables au volant...) par rapport à la même période en 2013 a été constatée. . Ils sont essentiellement dus à l'inattention des piétons (25,9%), au manque de vigilance des conducteurs (12%) et à l'excès de vitesse (14,8%). A l'approche des vacances scolaires et des fêtes de fin d'année, le bilan risque douloureusement de s'alourdir. 8ème cause de mortalité A l'échelle mondiale, les accidents routiers sont actuellement la 8ème cause de mortalité. D'ici 2020 et si de sérieuses mesures ne sont pas prises au plus vite, ils pourraient passer à la 5ème position. Pour faire face à cette prévision alarmante, l'ONU a décrété la décennie 2011-2020 celle de « Décennie d'action pour la sécurité routière », en vue de stabiliser, puis de diviser par deux, le nombre de décès imputables aux accidents de la route dans le monde, en prenant en compte les statistiques de 2012. La Tunisie a compté cette année-la 1623 victimes d'accidents de la circulation. Des mesures d'urgence et une stratégie nationale pour lutter contre cette menace bien réelle se sont donc imposées. C'est dans ce cadre que le gouvernement tunisien a reçu un financement de la Banque Africaine de Développement (BAD), afin de couvrir le coût d'étude de la Stratégie Nationale de la sécurité routière en Tunisie. Contacté à ce sujet par le Temps, le Colonel Mourad Mtir, coordinateur du projet à l'ONSR nous en dit plus: « Nous sommes actuellement au stade de sélection du bureau d'étude qui réalisera cette étude. Parmi nos critères de sélection, une parfaite connaissance de la réalité du terrain et des pratiques routières en Tunisie ou à défaut au Maghreb. L'étude nécessitera la mobilisation de onze experts, qui constitueront le personnel-clé, dont les profils sont décrits ci-après : un chef de mission, un ingénieur routier, un expert infrastructure de transports urbains, un expert inspection de véhicules, un expert en conduite de véhicules, un expert juriste, un expert en éducation, un expert en communication, un économiste de transports, un expert en trafic de police et un expert en développement de base de données. L'étude débutera concrètement en avril 2015 pour une période de 13 mois. Pour une stratégie nationale unifiée et globale, nous avons tenu à contacter toutes les parties concernées, les ministères, la Police Routière, la Garde Nationale, la Protection Civile mais aussi la société civile. Ainsi, six associations oeuvrant dans le domaine de la prévention routière ainsi que des représentants des médias et de la communication feront partie du comité de pilotage qui assurera le suivi du projet. Avant le démarrage de l'étude, nous avons remis à chaque ministère une fiche qui lui est propre, avec des propositions et des pistes de réflexions. Concernant le Ministère de la Santé, nous avons insisté sur l'importance du renouvellement et de la maintenance des équipements mis à la disposition des secours (ambulances mises en circulation depuis plus de 20 ans ou en panne, matériel de secours détérioré...) mais aussi sur l'urgence d'établir un programme de formation du secourisme unifié pour tous les organismes concernés, à l'instar du SAMU, du SMUR, du Croissant Rouge Tunisien. .. Nous avons aussi appelé le Ministère de l'Industrie à veiller à la stricte application des normes mondiales de sécurité pour les engins construits en Tunisie. Le Ministère du Commerce a été invité à plus de vigilance et de contrôle notamment au niveau des cylindrées importées de Chine dont la vitesse réelle dépasse largement celle indiquée sur les papiers mais aussi à veiller à ce que tous les véhicules importés soient dotés des normes mondiales de sécurité (ceintures de sécurité à l'avant et à l'arrière, airbags à l'avant et sur les côtés...). Pour sa part, le Ministère de la Justice devra se pencher sur les lois régissant la circulation routière afin d'en amender quelques unes, aujourd'hui obsolètes, afin qu'elles soient en phase avec l'évolution technologique. Ainsi, lorsque nous avons implanté un radar au niveau du feu rouge à El Menzeh 6, nous nous sommes rendus compte que de point de vue juridique, il était impossible d'infliger des amendes aux conducteurs fautifs. Toujours concernant l'évolution technologique, le Ministère d'Enseignement Supérieur a été invité à inciter et encourager les étudiants à mener des recherches sur la prévention routière et notamment sur la fabrication locale des radars et autres moyens de prévention des accidents. L'achat à l'étranger d'un radar classique coûte environ 70 mille dinars alors qu'un radar localement fabriqué coûte entre 7 et 10 mille dinars. Le Ministère de l'Equipement se penchera pour sa part sur l'état des routes et des infrastructures mais aussi sur de nombreux autres dossiers tels que le degré des pentes en Tunisie, les glissières de sécurité bordant les routes, la conception d'une voie spécialement dédiée aux secours pour faciliter leur intervention... Nous avons également attiré l'attention du Ministère du Tourisme sur de nombreux points dont le danger de l'utilisation des quads sur les routes, au milieu d'autres véhicules, ainsi que l'importance de l'élaboration de cycles de formation continue à l'attention des chauffeurs de bus touristiques et de minibus aussi bien en matière de prévention des accidents routiers mais aussi en secourisme. Nous avons donc demandé à tous ces ministères ainsi qu'à d'autres structures de programmer des séances de travail pour identifier les différentes problématiques en rapport avec la prévention et la sécurité routière, de proposer des solutions et de formuler des propositions de projets dans le cadre de la future Stratégie Nationale de la sécurité routière. Toutes ces remarques et propositions seront transmises au fur et à msure au bureau d'étude tout au long de cette phase de diagnostic. Au bout de treize mois, le bureau sélectionné devra finaliser l'étude et formuler des recommandations que toutes les parties prenantes du projet s'engageront à respecter et adopter. Bonne nouvelle ! La BAD et très probablement la Banque Européenne d'Investissement participeront au financement de certains projets qui seront initiés dans le cadre de cette Stratégie Nationale de la sécurité routière. » Le Colonel Mtir est optimiste pour l'avenir. Il estime que si la stratégie est établie à temps et adoptée par tous, les prochaines statistiques nationales d'accidents routiers et de décès sur la route seront revues à baisse. Mais plus que tout, il insiste sur le volet de la sensibilisation et de l'initiation des petits, dès leur plus jeune âge, à la prévention routière et aux notions de sécurité. La création de clubs éducatifs et l'élaboration de cours théoriques et pratiques dans les écoles permettra de sensibiliser efficacement ces enfants qui seront les conducteurs de demain. Bonne route à tous et n'oubliez pas d'être très vigilants!