Que Mohamed Abbou, ou son épouse Samia s'opposent à la nomination de Habib Essid à la tête du gouvernement, qu'ils adhèrent au Mouvement du Peuple des Citoyens initié par Moncef Marzouki après sa défaite à l'élection présidentielle, cela ne devrait étonner personne. Mardi soir, sur un plateau de Nessma Tv, Mohamed Abbou a réaffirmé son adhésion au mouvement de l'ancien président provisoire. Le même soir, et sur le même plateau Mariem Belkadhi a invité Hamma Hammami pour le même motif à savoir expliquer les réserves du Front Populaire sur la personne de Habib Essid. Ce que nous avons alors entendu de la part du porte-parole du F.P ne différait quasiment en rien de ce que disait après lui Mohamed Abbou. Un étranger qui ignore à quel parti chacun des deux hommes appartiennent aurait pensé qu'ils font partie de la même formation politique et qu'ils se sont concertés pour énoncer la même façon de vue avec presque les mêmes mots. Hamma Hammami a repris la même rengaine du « régime déchu », de la « révolution ». Il a presque explicitement reproché à Béji Caïd Essebsi son âge avancé. Il a également émis des craintes quant au retour de la dictature présidentielle. Pour un peu, il avait lui aussi utilisé la fameuse expression « Ettaghaouel » ressassée par les détracteurs de B.C.E. Hamma se présente encore comme l'homme du peuple soucieux de réaliser « les objectifs de la Révolution ». Tout cela a lieu bien avant même que Habib Essid commence à former son équipe gouvernementale et avant qu'il entreprenne la moindre action concrète dans le cadre de ses prérogatives. Hamma serait-il frustré que son Front Populaire n'ait pas été associé aux consultations sur la désignation du Chef du Gouvernement. Les Tunisiens qui suivent assidûment l'actualité se rappellent la longue période d'hésitation et de tiraillement passée à trouver un premier ministre consensuel, avant la désignation de Mehdi Jomâa. A cette époque le Front Populaire était, entre autres, derrière le retard enregistré. Maintenant qu'il n'a plus de pouvoir de décision, le Front Populaire se range instinctivement dans l'opposition. Rôle que les militants « gauchistes » et « nationalistes » affectionnent sous tous les régimes. C'est devenu un réflexe, chez eux. Tous les gouvernements ne sont pas bons, tous les présidents sont mauvais. Seul le régime qu'ils veulent, eux, instaurer est révolutionnaire, populaire et démocratique ! La philosophie du refus D'autre part, ils adorent « prévoir » l'échec des autres. Pour Hamma et ses « troupes », les signes négatifs sont déjà perçus par la désignation de Habib Essid. Ils entrevoient déjà le fiasco politique, économique et social et préviennent les Tunisiens contre la « catastrophe» annoncée. Dans quelques mois, dans une année ou deux ils diront aux Tunisiens : « Nous vous avons prévenus ! Nous le savions déjà... » Etre dans l'opposition systématique, c'est le rôle qui, manifestement, sied le mieux à certains hommes politiques qui se croient être nés de «gauche » qui ne savent dire que l'adverbe « non » qui refusent de « participer », de mettre la main à la pâte, alors qu'ils savent parfaitement combien le pays a besoin, surtout en ce moment, de toutes ses composantes. Hamma a parlé de l'agitation actuelle du côté de Redeyef et du bassin minier producteur de phosphate. Il a également soulevé le problème des familles démunies face à la vague de froid qui a sévi ces derniers temps au Nord-Ouest et sur les hauteurs de Gafsa et de Kasserine. Soit, et alors ? Habib Essid a-t-il quelque chose à voir là-dedans ? Le Nida et B.C.E sont-ils derrière les lobbies transporteurs de phosphate ? Parlons aussi du syndicat de l'enseignement secondaire qui décrète, sans répit aucun, les grèves et les boycotts ! Est-ce innocent ? Sachant que le Front Populaire a proposé le nom de Habib Essid au dernier dialogue national, la question demeure toujours sans réponse. Il y a peut être anguille sous roche, le syndicat « nationaliste » proche du Front Populaire a peut-être commencé son propre « Mouvement du Peuple des Citoyens ».