La vie d'une bibliothèque, c'est d'abord la consultation et le prêt de livres, revues et autres documents. A ce titre, la bibliothèque diocésaine ne chôme pas. Ils sont en effet nombreux les lecteurs, pour l'essentiel universitaires, à fréquenter cet établissement relevant de l'Archevêché de Tunisie pour s'y dénicher d'utiles références et des ouvrages introuvables ailleurs. Spécialisée dans les sciences des religions, cette bibliothèque se trouve dans la médina de Tunis. Pour s y rendre, il faut remonter la rue Jemaa Zitouna jusqu'à la rue Sidi Saber. La bibliothèque diocésaine a élu domicile dans cette rue, là où se trouvaient dans le passé le pensionnat des soeurs de Saint Joseph et l'école primaire de la rue Sidi Saber qui a élevé des générations d'enfants. Il existe un petit chapelet de bibliothèques gravitant dans la même sphère que celle du diocèse. La plus connue d'entre elles est incontestablement la bibliothèque de l'institut des belles lettres arabes (IBLA) qui, d'ailleurs vient de rouvrir ses portes après un sinistre qui avait détruit une partie du fonds. Le public connait aussi le centre d'études de Carthage qui se trouve rue Garibaldi et se caractérise par la disponibilité d'une impressionante collection de revues scientifiques et historiques. Deux cycles de rencontres La bibliothèque diocésaine a pour sa part une spécialisation de pointe en matière de sciences de la religion et l'équipe des bibliothécaires et animateurs du lieu se font un devoir de retrouver, grâce à un système informatique performant, les références dont ont besoin les lecteurs. Parmi les animateurs des lieux, le père Marc Leonard et la soeur Clémentine Mukampabuka sont réputés pour leur disponibilité légendaire et leur sens de l'écoute. Nadia Djellouli complète cette équipe, avec beaucoup de talent et un inlassable travail de relations publiques. Au delà de la consultation d'ouvrages, la bibliothèque propose des actions culturelles organisées de manière autonome ou bien en partenariat avec des associations culturelles ou des institutions éducatives. Ainsi, l'année 2014 a été ponctuée par six rencontres sur le thème de la diversité et des minorités en Tunisie. Organisées selon un rythme bimestriel, ces rencontres ont drainé un public nombreux et motivé qui a pu dialoguer avec de nombreux conférenciers. Citons par exemple Sylvia Finzi qui a traité des Italiens de Tunisie, Nadia Ghrab qui a realisé un travail trés documenté sur les églises d'Orient, Jamel Cherif qui a présenté la foi bahaie et son histoire ou encore Saadia Mosbah qui a évoqué la minorité noire tunisienne. Ce cycle s'est achevé au mois de décembre et ouvert la voie à deux nouveaux séminaires qui se dérouleront tout au long de l'année 2015. Ainsi, le séminaire principal aura pour intitulé "Transversales" et pour thème "L'espace et le sacré en Tunisie". Dans ce cadre, historiens, architectes mais aussi photographes et écrivains réuniront leur réflexion afin de mieux connaitre et comprendre le patrimoine sacré tunisien dans toutes ses ramifications. Organisé en partenariat avec le cercle Fouq Essour, le second séminaire pointera sur le thème "Héritages latins de Tunisie" et se consacrera aux auteurs latins ayant un lien avec la Tunisie. Il s'agit bien entendu des auteurs les plus importants, ceux dont l'œuvre a traversé les siècles et qui jouissent d'une notoriété bien établie, y compris en dehors des cercles de latinistes. Le cycle de rencontres "Héritages latins de Tunisie" démarrera le mardi 27 janvier et se poursuivra jusqu'en novembre prochain. Cinq rencontres que nous allons tenter de présenter sont au programme de cette recherche des racines tunisiennes dans la littérature latine. "Héritages latins de Tunisie" se développe sur trois directions différentes et complémentaires. Ce cycle de rencontres consacré aux écrivains latins ayant un lien avec la Tunisie s'intéressera aussi bien aux auteurs natifs ou ayant vécu à Carthage qu'aux auteurs ayant simplement écrit des œuvres relatives à la Tunisie antique. D'autre part, une place importante sera réservée aux écrivains de tradition chrétienne qui, eux aussi, sont fort nombreux et importants, à l'image de Tertullien ou Saint Augustin. Ainsi, ce cycle évoluera en fonction de trois modules successifs. Dédié à Terence et Apulée, le premier de ces modules se déroulera en janvier puis février. Le second module ne comprendra qu'une rencontre qui aura lieu en mars et aura pour thème les œuvres croisées de Virgile, Salluste et Silius Italicus. Enfin, le dernier module comprendra les deux dernières rencontres du cycle et concernera Tertullien (septembre) et Saint Augustin (novembre). Il est à noter que les rencontres sont bimestrielles et se dérouleront les derniers mardis du mois de 10h à midi. La rencontre inaugurale aura lieu mardi 27 janvier et concernera Terence et son œuvre. Publius Terentius Afer, autrement dit Terence l'Africain est l'auteur de nombreuses pièces de théâtre qui ont connu la postérité. Second représentant de la comédie latine, après Plaute, Terence est né à Carthage. Il ira à Rome où il évoluera dans le cercle lettré des Scipion. Il est connu pour être l'auteur de la fameuse sentence "Rien de ce qui est humain ne m'est étranger". Reprise par Cicéron, cette phrase est devenue l'expression de l'humanisme. Cette première rencontre s'intéressera à la vie de Terence et son théâtre aux inspirations grecques. La seconde rencontre du cycle portera sur Apulée, auteur d'un chef d'œuvre absolu, le célèbre ouvrage "Les métamorphoses". Par un clin d'œil de l'histoire, Apulée qui est né à Madaure, dans l'Algérie actuelle et qui a vécu à Carthage au deuxième siècle, clôt la littérature latine classique alors que Terence ouvrait cette époque classique. L'œuvre d'Apulée sera au centre de cette rencontre qui évoquera aussi bien "L'âne d'or" que les "Florides" et d'autres œuvres de celui qui fut aussi un brillant conférencier à Carthage. La troisième rencontre tissera une réflexion à propos de trois œuvres différentes ayant un rapport avec la Tunisie. Il s'agit de "L'Eneide" de Virgile, "La guerre de Jugurtha" de Salluste et un ouvrage moins connu intitulé "Les guerres puniques " de Silius Italicus. Plus largement, cette rencontre permettra d'évoquer de nombreux autres auteurs latins d'oeuvres mineures ou peu connues. De Tertullien à Saint Augustin Le cycle s'achévera sur les auteurs chrétiens. Tertullien (165-225) qui fut l'un des fers de lance de la conversion du monde latin au christianisme sera évoqué à travers son fameux "Apologètique", une oeuvre d'une grande érudition et l'une des premières synthéses de la culture gréco-romaine. Né à Carthage, Tertullien est l'auteur d'une oeuvre monumentale qui ouvrit la voie à Saint Cyprien et Saint Augustin. Ce dernier et son oeuvre seront le thème de la dernière rencontre de ce cycle. C'est entre Thagaste où il est né et Carthage que se déroule la vie de Saint Augustin(354-430) qui est considéré non seulement comme l'un des maîtres de la pensée occidentale mais aussi un homme de foi dont l'oeuvre colossale compte des classiques comme «Les Confessions» ou «La cité de Dieu». Il est à noter que tous les auteurs envisagés dans le cycle "Héritages latins de Tunisie" ont vécu entre le deuxième siècle avant JC et le cinquième siècle. Ainsi, cette approche couvre non seulement l'âge classique de la littérature latine mais aussi la période chrétienne. Des extraits seront par ailleurs lus en latin, français et arabe durant chacune des rencontres. Une intéréssante initiative que celle de la bibliothèque diocésaine qui ouvre un champ oublié de la littérature, un champ que le grand Jean Fontaine inscrit en bonne place dans son anthologie littéraire tunisienne.