«Les femmes de mon pays sont des femmes et demi ». Ce vers du poète tunisien Sghayer Ouled Ahmed est devenu en quelques années le slogan incontournable des féministes tunisiennes. Ces mots emprunts de fierté et de considération pour la gent féminine résument aussi le parcours de deux Tunisiennes, Mounira Hamza et Imen Nouri. Deux noms méconnus du grand public mais qui en disent long sur la témérité et les compétences de ces femmes. Deux générations, deux distinctions mais un seul crédo: « Vouloir, c'est pouvoir. Oser, c'est avoir ! » Mounira Hamza a 85 ans. Un âge où beaucoup de femmes mais aussi d'hommes renoncent à faire des projets et ne conjuguent plus leurs vies qu'au passé. Mais pour cette dame d'une autre trempe et à la volonté de fer, le temps n'a jamais été un obstacle ni même un frein. A 85 printemps, elle a soutenu lundi une thèse de doctorat d'Etat, ayant pour thème « Nathalie Faraut: Modélisation de ses discours », à la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba (FLAHM). Encadrée par le professeur Bourguiba Ben Rejeb, elle a su convaincre le jury présidé par Pr Emna Letaïef et comptant aussi Pr Mokhtar Sahnoun. Egalement membre du jury, Pr Zinelabidine Benaïssa livre son témoignage à propos de cette soutenance pour le moins insolite: « Cela s'est très bien passé. Madame Mounira avait le trac bien sûr et avait parfois du mal à retenir son émotion. Emotion contagieuse d'ailleurs puisque nous étions tous sous le charme de ce petit bout de femme qui en veut et qui lutte.» Le chemin du savoir Pour la studieuse doctorante, le chemin de la réussite n'a pas été de tout repos et elle avoue être parfois passée par des moments de découragement et de lassitude. Heureusement, sa famille et plus spécialement ses quatre filles veillaient au grain et n'ont eu de cesse de l'encourager. Après une carrière bien remplie dans l'enseignement secondaire, Mme Mounira s'est lancé un défi de taille: décrocher un doctorat d'Etat. Pour réaliser son rêve, elle a dû suivre quarante heures de cours dans un institut de formation continue au Bardo puis obtenir un CAP suivi d'un DEA obtenu à la Faculté des sciences humaines et sociales de Tunis (9 avril). Ses diplômes en poche, elle s'est inscrite à la FLAHM. Mais c'était il y a quinze ans. « J'y suis allée à mon propre rythme. Rien ne me pressait. De toute façon, ce diplôme ne me servira pas à enseigner ou à décrocher un travail. Je l'ai fait pour mon propre plaisir et pour me prouver que tout est possible», déclare-t-elle à ce propos. D'une voix jeune et pétillante, elle ajoute: « Aujourd'hui que c'est fait, je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin. Je voudrai continuer à faire de la recherche dans le domaine de la linguistique. La quête du savoir ne doit jamais s'arrêter et j'encourage tous les jeunes et les moins jeunes à croire en leur capacité et à aller au bout de leurs rêves ! » Un avenir prometteur Imen Nouri est une autre fierté tunisienne et non des moindres. Du haut de ces 18 ans, cette élève du lycée pilote de Gabès a participé au concours Intel National Science and Engineering Fair qui s'est déroulé à Pittsburgh, Pennsylvanie (Etats-Unis) et a remporté un prix dans la catégorie Special Awards. L'Intel-ISEF, qui a eu lieu du 10 au 15 mai, est l'une des plus importantes compétitions scientifiques pour les élèves dans le monde. L'édition 2015 a enregistré la participation de plus de 1700 élèves issus de 75 pays dans le monde. Originaire de la Skhira, cette jeune fille a obtenu une médaille grâce à son projet « Sky Cleaner », un purificateur d'atmosphère innovant, censé minimiser l'impact de la pollution sur la couche d'ozone en absorbant les particules toxiques dans l'air, dégagées notamment des industries et des moyens de transport. Le prix lui a été décerné par la Patent and Trademark Office Society. Une bien belle réussite qui honore la Tunisie mais pour y arriver, Imen a dû batailler fort et faire preuve de courage et de détermination. Pour lui permettre de se rendre aux USA avec son mentor et en absence de soutien financier de la part de l'Etat, une collecte a été organisée dans son lycée. Le miracle a heureusement bien eu lieu et la jeune élève a pu réaliser son rêve en participant au concours. Imen est aujourd'hui à l'automne de son chemin qui, espérons-le, sera riche en prix et distinctions. Il ne lui reste plus qu'à persévérer sur la route du succès et de l'innovation.