Pour un coup d'essai, la première rencontre du film documentaire de Redeyef avait su convaincre les cinéphiles et mobiliser un important public dans la cité minière du sud-ouest. Et, c'est donc en conquérants que les animateurs de ce rendez-vous reviennent et remettront les couverts pour une deuxième édition qui, à son tour, promet monts et merveilles. Avec le soutien de la Fondation Rosa Luxembourg, un think tank de la gauche allemande, le collectif Nomad 08 de Redeyef avec l'appui de l'association Culture Afrique-Méditerranée vient de publier le programme de la seconde édition de cette rencontre placée sous le signe de la cinéphilie et qui se tiendra du 7 au 12 septembre. Le thème retenu pour cette édition a trait au cinéma indépendant et aux revendications sociales. Les rencontres auront pour épicentre le quartier d'Ennazla, au coeur de Redeyef, et rayonneront également sur les villes voisines. Approches participatives et travail de décentralisation Six journées permettront au public du festival de multiplier les rencontres et les découvertes. Dès l'ouverture, le cinéaste syrien Mohamed Malass, un grand témoin de la scène contemporaine, donnera le ton. Mallas, deux fois primé à Carthage est aussi un pionnier du film documentaire. Sa présence à Redeyef souligne bien le caractère engagé et militant du festival. En soi, cette participation est de bon augure pour la teneur de cette session. Plusieurs jeunes cinéastes indépendants tunisiens sont également de la partie et permettront de constater la grande diversité du film documentaire sous nos cieux. Abdallah Yahia, Ridha Tlili, Intissar Belaid ou Imen Delil seront à même de témoigner de leurs expériences tout en décryptant leurs oeuvres pour le jeune public. En ce sens, Naceur Sardi sera également de la partie et aura fort à faire en animant les débats et en canalisant les énergies. Cette dimension participative est essentielle dans ce festival car elle contribue au bienvenu processus d'éducation populaire et de développement culturel. D'ailleurs, des ateliers d'expression documentaire seront animés par Ala Edinne Slim pour donner encore plus de profondeur à cette démarche. Dans leur logique, ces rencontres sont aussi créées pour susciter des vocations et ancrer la pensée dialectique parmi les jeunes. Ce fait est de première importance car il souligne la vocation perdue qui devrait sous-tendre de nombreux festivals égarés dans les dérives ludiques et tournant le dos à leur essence. Les six journées de cette manifestation devraient permettre au public de voir beaucoup d'oeuvres, comprendre la démarche des documentaristes et retrouver dans le cinéma un art du réel, une expression de la vérité dans sa nudité, sa cruauté ou sa beauté. Un paysage culturel en total délabrement Ce qui est remarquable, c'est que grâce à des initiatives de la société civile, des manifestations généreuses fleurissent aux quatre coins du pays. Il n'échappe à personne que cette décentralisation cinématographique n'est pas le fait du ministère de la Culture mais trouve son appui auprès d'institutions internationales qui semblent avoir mieux compris le sens du développement culturel et ses exigences. Qu'il existe désormais des festivals à Redeyef, Douz ou Djerba est une bonne nouvelle que nous devons au travail infatigable des hommes de terrain et des indépendants parmi les cinéastes, ceux qui justement cherchent à partager leurs oeuvres avec le public. Redeyef 2015 promet donc de belles rencontres et offrira beaucoup de cinéma dans une ville où les salles font défaut. Hormis la maison de la culture, nul espace de projection. C'est d'ailleurs pour cette raison que les films seront montrés en plein air. La palme revient incontestablement aux jeunes de Redeyef, jaloux pour ce festival qui comble leurs voeux cinématographiques. Des jeunes motivés et curieux qui parfois ne connaissent leur première salle de cinéma que lorsqu'ils vont étudier dans la capitale. Et c'est tout dire du délabrement culturel profond qui règne dans notre pays...