L'Acropolium de Carthage a ouvert ses portes pour la vingt et unième année au festival de la musique classique : l'Octobre Musical. Le rendez-vous annuel, couru par les mélomanes, est devenu, à travers ces années, celui de dizaines de férus de musique et ne cesse de faire des émules parmi. Si beaucoup comptent parmi les habitués des lieux, les murs de l'ancienne cathédrale Saint Louis accueille un public de plus en plus jeune, un constat qui montre que la grande musique n'est ni élitiste ni destinée à des fins connaisseurs. Sa beauté et sa sensibilité peuvent toucher les curieux qui se laissent surprendre par sa mesure ; et la soirée inaugurale de cette 21ème édition s'inscrit dans cette beauté et cette sensibilité. En effet, l'Acropolium de Carthage et l'Institut culturel italien de Tunis ont invité sur la scène du festival la talentueuse pianiste Ketty Tieraca et la virtuose violoncelliste Simona Bonanno. Deux artistes qui ont donné le coup d'envoi de la nouvelle édition de l'Octobre Musical en le plaçant sous le haut signe de l'excellence à travers des œuvres des XIXème et XXème siècles. Devant un parterre attentif, les premières notes du concert étaient signées Piotr Ilitch Tchaïkovski. Le « Pezzo Capriccioso » était un pur délice où l'exactitude du jeu le disputait à la sensibilité, cette touche personnelle dont un artiste a le secret. Et ce secret jalousement gardé par Simone Bonanno était un ravissement pour l'oreille du mélomane. La violoncelliste a fait vibrer son instrument en pinçant les cordes pour laisser échapper un phrasé saisissant qui a empli l'espace. Associé aux notes que faisaient naître Ketty Teriaca sous ses doigts en caressant les touches blanches et noires, la partition du compositeur russe avait épris les esprits. Le duo a enchaîné tour à tour avec les œuvres de Gabriel Fauré, Sergueï Rachmaninov, Karl Davydov et dans la seconde partie du concert ce fut la sonate de Dmitri Shostakovich qui a été interprétée avec brio. Les divers mouvements de la sonate laissaient percevoir la rencontre atemporelle entre le génie de la composition et la virtuosité de l'exécution. Simona Bonanno a su capter l'attention en créant la connivence entre la musique et le public. Par son instrument, sa complicité avec Ketty Teriaca et son appropriation des morceaux interprétés, elle a été l'alchimiste qui a fait vivre la partition le temps d'un concert. Aperçue l'an dernier lors du festival des Jeunes Virtuoses à Sidi Bou Saïd, Simona Bonanno avait fait sensation auprès de féru de musique classique. Ces derniers ont confié pendant l'entracte et à la fin du concert le plaisir qu'ils ont eu à la retrouver sur la scène du prestigieux Octobre Musicale. Certains ont confié même qu'ils sont venus exprès pour renouveler le plaisir de l'entendre jouer éprouvé, il y a de cela un an. Avec le dernier allegro de la sonate de Shostakovich, le duo avait cru clore sa prestation ; cependant les applaudissements vifs et ininterrompus du public avaient décidé les deux artistes à revenir sur scène pour mettre une touche finale au concert. Commençant par un morceau de Tchaïkovski, Simona Benanno et Ketty Triaca avait choisi de mettre à l'honneur, pour la seconde fois, le compositeur en interprétant « le Cygne ». Un rappel qui fut joué avec toute la beauté que recèle non seulement la partition mais également l'interprétation à fleur de peau...