La diplomatie tunisienne renaît de ses cendres après le « waterloo » troïkiste qui a embourbé la Tunisie dans les sables mouvants d'Orient et les mirages, oh combien hypothétiques d'Arabie ! Jour après jour, la trajectoire est rectifiée avec doigté, pour remettre notre « Foreing office » sur les rails de ses valeurs fondamentales initiales depuis l'indépendance avec cette devise magique : « La Tunisie n'a que des amis » ! La dernière visite du ministre des Affaires étrangères en Russie s'inscrit dans ce cadre et on attend beaucoup de bien de la commission mixte tuniso-russe prévue fin de ce mois de mars, à Moscou. A ce propos, mes souvenirs de jeunesse à la coopération internationale au ministère de l'Enseignement supérieur me ramènent à ce beau pays, la « Sainte Russie », son peuple affable, sa culture immense, ses opéras fabuleux, ses musées majestueux, couverts d'or, comme celui de l'Ermitage et celui collé au Kremlin, avec de véritables trésors et joyaux uniques au monde ! Saint-Pétersbourg, la ville préférée des Tsars, dont Pierre le Grand, avec une architecture en tout point similaire à celle de Paris et de Vienne, reconvertie à un moment donné et rebaptisée « Leningrad », après la grande Révolution bolchévique de 1917, toujours debout, rayonnante, malgré l'âge et accueillante avec ses délices de l'Histoire princière et ses châteaux qui font rêver. C'est ici que les plus grandes valses et les plus beaux concerts de Mozart à Schubert ont été jouées, c'est ici que les ballets de l'Armée rouge enchantaient le monde par l'audace et l'élasticité de ses artistes de renommée mondiale. Eh bien, ce beau pays, cette grande puissance et ce grand peuple ont toujours été les grands amis de la Tunisie. Pourtant, du temps de la guerre froide, la Tunisie était plutôt proche, et alliée de fait de l'Occident américain et européen. Mais, jamais, nos relations avec les gouvernements soviétiques n'ont été entachées d'une quelconque mésentente. Bien au contraire, ces relations étaient au beau fixe, toujours empreintes de cordialité amicale et de respect des décisions nationales et de la souveraineté de notre pays. J'ai la chance de visiter à plusieurs reprises ce grand pays, comme un continent puisqu'il rejoint presque les deux pôles, l'Europe, l'Asie et l'Amérique et j'ai mesuré de visu à quel point la Russie tenait en estime notre pays et son gouvernement du temps de Bourguiba. Un jour, et après des discussions fructueuses avec la partie russe pour nous aider à lancer certaines institutions universitaires techniques, dont les mines, et j'en cite l'ENIG de Gabès et l'Institut de technologie de Gafsa, où des expertises russes et des enseignants de grande valeur ont été mobilisés par nos hôtes, le ministre soviétique des Académies, à l'époque, nous posait la question suivante : « Y a-t-il quelque chose qui pourrait faire plaisir à la délégation tunisienne » et nous de répondre, après une minute de réflexion : « Merci, Monsieur le ministre... on voudrait, si possible, visiter Samarkand, Ouzbékistan », qui faisait à l'époque, partie de l'Union Soviétique. Et le ministre, sans réfléchir, d'accepter et de donner les instructions à ses collaborateurs pour mettre un avion à notre disposition. Il faut rappeler, quand même que Samarkand, Tachkent et Boukhara, sont des villes historiques à plus de quatre heures de vol de Moscou, soit une distance de près de 3000 km, la même qui sépare Tunis du Caire. Notre choix sur Samarkand, nous ne le regretterons jamais ! C'était la capitale du grand empereur mongole, Tamerlan (Teimour Link), avec ses « médersas » et mosquées bleues, d'où, d'ailleurs, le « bleu de Samarkand », et nous avons pu visiter l'observatoire de l'Empereur qui était très féru d'astrologie. A propos, c'est bien Tamerlan qui a été un peu à l'origine de la « Mokadima » de notre Ibn Khaldoun national, qui était le grand cadhi du Caire au moment où Tamerlan occupait l'Egypte et qui demanda à notre grand historien de lui écrire un livre sur l'Afrique du Nord ou (l'Ifriquiya), qu'il envisageait de conquérir. Pour l'anecdote, Ibn Khaldoun aurait déconseillé à l'Empereur Tamerlan, d'aller en Ifriquiya, connu pour son nationalisme acharné et son attachement à son indépendance et sa liberté. Par conséquent, le rééquilibrage de notre diplomatie en renouant avec tous nos amis traditionnels, dont la grande Russie, ne peut être que louable. Cette grande nation qui monte au créneau avec un président exceptionnel, M. Vladimir Poutine et un ministre d'exception, M. Serguei Lavrov, peut –être d'un grand secours pour la Tunisie dans ces moments difficiles où nous sommes, menacés vitalement par le terrorisme obscurantiste et moyenâgeux. Avec la Russie, tous les domaines de coopération, surtout économiques, financiers, et touristiques sont ouverts et à promouvoir. Espérons même que la commission mixte tuniso-russe ira plus rapidement vers un rapprochement plus que bénéfique pour les deux pays et les deux peuples amis... et frères. Pourquoi pas !