Il y a eu des dérives, c'est indéniable. Autrement dangereuses par endroits. Aujourd'hui, l'on est en train d'en payer le prix. « Hizb Ettahrir » en est une, et pas des moindres. Certes, ce parti qui prêche clairement une idéologie extrémiste, à se tordre de rire, n'était-ce la gravité de la situation, n'est pas le seul à faire tâche dans le paysage, mais c'est certainement le seul qui ait autant de souffle, et persiste et signe, avec un flegme, qui en démontrerait à un Britannique de souche, dans la conviction qu'il serait dans son plein droit, et que la Tunisie ne faisait qu'attendre que son règne arrive, pour que tous ses problèmes soient résolus d'un seul coup. Forcément : s'il arrive à fédérer ses troupes en toute quiétude, et à organiser ses congrès, en toute impunité, il peut, effectivement, espérer qu'un jour, ce califat de pacotille qu'il n'a de cesse d'appeler de tous ses vœux, soit instauré intra-muros, avec la bénédiction des autorités compétentes. Il est permis de rêver; mais à un moment donné, il faut s'arranger pour arrêter le délire, lorsque les choses prennent une tournure un peu trop sérieuse pour que l'on continue de banaliser le propos, en s'appuyant sur le fait que le terreau ne prend pas, et qu'il n'y aurait donc, par conséquent, pas de risques. C'était le cas hier, et il fallait agir. C'est chose faite et c'est très bien comme cela. Parce que, si « Hizb Ettahrir », takfiriste par essence, a pu un jour avoir l'aval de la « Troïka », il n'est pas dit qu'il faille persévérer dans l'erreur, en fermant les yeux sur ce qui est en train de se tramer, et qui est susceptible d'entraîner le pays à sa perte, si l'on n'y mettait pas le holà. Il fallait lui remonter les bretelles, en lui signifiant clairement, qu'il s'était trompé d'heure et d'endroit, et qu'il s'était fourvoyé plus qu'à son compte, sur cette Tunisie, trois fois millénaire, qui ne tombera jamais sous la coupe réglée des Salafistes, quelque soit les oripeaux dont ils peuvent se draper. C'est ce que le ministère de l'Intérieur a fait, en interdisant la tenue du congrès de Hizb Ettahrir, prévu pour le 4 du mois en cours, c'est-à-dire hier même. Mais le plus absurde dans tout cela, c'est qu'après avoir présenté un recours au Tribunal administratif, ledit parti a eu autorisation d'officier, croyant casser ainsi la sentence initiale. Sauf que le ministère de l'Intérieur, - et il a eu raison sur toute la ligne - s'est organisé hier, de façon à faire respecter sa décision. En empêchant notamment Ridha Belhaj d'entrer dans la capitale, et en fermant l'accès du Palais des Congrès, aux sympathisants de Hizb Ettahrir, lesquels, évidemment, ont apprécié moyennement. Voire pas du tout. Est-il nécessaire de leur expliquer, encore une fois, même si cela semble tomber dans l'oreille d'un sourd, qu'ils se sont trompés de latitudes, et que s'ils ne veulent pas de la République, elle non plus ne veut pas d'eux, et de leur idéologie extrémiste et rétrograde, qui ne peut pas être patriote par essence, et trahit qui plus est par conviction ? Un Etat de droit, ça se fait respecter; le reste relève de la rhétorique. En ce sens, l'on ne peut qu'applaudir...