La corruption est elle inséparable du pouvoir et vice-versa, le pouvoir peut-il s'exercer en dehors d'une certaine corruption ! Jean Jacques Rousseau la suggère mais Montesquieu l'établit. Le « pouvoir corrompt » dit-il mais le pouvoir absolu corrompt absolument. Mais alors comment se fait-il que dans les pays les plus ancrés dans la Démocratie on n'arrive pas à circonscrire, voire éradiquer le phénomène?! Certains doctrinaires sont allés jusqu'à dire que la fortune est liée structurellement au pouvoir. C'est pour cela d'ailleurs que les changements de régime n'affectent presque jamais les grandes fortunes qui par instinct immunitaire et de conservation arrivent toujours à se recycler pour être les premiers à crier avant les gens de la Cour: « Le Roi est mort vive le Roi » ! Dans les pays du Tiers monde le phénomène est encore plus accentué, car les sociétés ainsi que les économies sont plus fragiles que dans les pays stables. Un de nos profs gauchissant à Sadiki avait coutume de nous dire: « Si vous voulez vous enrichir, et rapidement, prenez le pouvoir... et ne vous en éloignez pas trop » ! Le reste c'est la mécanique du « Pekos » (en grec: argent) qui s'en charge, et l'argent fructifiera l'argent sur des générations entières. Finalement la seule stabilité véritable c'est celle du pouvoir de l'argent à condition de savoir faire profil bas quand c'est nécessaire, avec les enthousiasmés de la politique et les idéologues illuminés. Evidement les « pouvoirs » qu'ils soient politiques ou financiers, sont aussi « mortels » comme les civilisations et comme le prédisait Paul Valery dans son « Regard sur le monde actuel ». D'où cette « diabolisation » quelque part naturelle des anciens régimes et de ceux qui en ont profité pour monter des « lobbys » financiers considérables et des patrimoines enviables et appétissants pour les nouveaux « arrivants » (je n'ai pas dit... arrivistes). Dans les vagues de déstructuration des anciens régimes, les Révolutions et leurs acteurs enthousiasmés, ne peuvent pas se retenir et faire la différence entre la nécessité de rétablir l'état de Droit censé être « vertueux » et mettre à genoux l'ensemble de l'économie et de l'appareil productif. La diabolisation à l'extrême et sans dosage finit par accabler l'ensemble du corps social, entrepreneurs et producteurs, pour valoriser les fainéants et tous ceux qui n'ont jamais trimé pour gagner leur pain. Le travail d'entreprise est marginalisé et culpabilisé, alors que la paresse individuelle et collective est valorisée. Nous sommes en plein dans le schéma développé par Max Weber dans « l'Ethique protestante » qui rappelle que les « pauvres » dans la religion chrétienne catholique sont les « amis de Dieu » alors que les « riches » sont diabolisés. Le Protestantisme a évidement corrigé la trajectoire pour dire que ceux qui aspirent au mieux être et à la réussite sont aussi les amis de Dieu. D'où l'amour de la performance et de la réussite aux Etats-Unis par exemple. La Tunisie a vécu tous ces flux et reflux de la « diabolisation » après la Révolution de janvier 2011. Des centaines d'entreprises jadis florissantes aux mains de gens classés « corrompus et véreux » présumés de l'ancien régime, dans des secteurs de pointe à haute plus value technologique et d'emplois, ont été nationalisées et mises sous séquestre judiciaire. Résultat : elles sont toutes ou presque en faillite avec perte du capital et des emplois par milliers. De quoi se demander à quoi ça a servi de démembrer ces entreprises alors qu'on aurait pu les céder dès le départ par appels d'offres à d'autres entrepreneurs professionnels « plus catholiques » et proches amis de Dieu et de ses « saints » ! Idem, pour les grands projets. On a diabolisé en vrac et pêle mêle tous ceux et toutes celles qui, de près ou de loin, ont été associés à leur création, y compris les pays frères et amis qui voulaient investir leurs capitaux en Tunisie dans un mode « gagnant – gagnant » pour tout le monde. Résultat : ces projets sont bloqués, et les investisseurs sont allés recycler leurs avoirs dans des pays plus accueillants comme le Maroc ou la Turquie. Du coup des milliers d'emplois sont perdus, et surtout la rénovation de villes entières comme Tunis où les gros rats de gouttière à Tunis-Marine et à la rue de Turquie vaquent à leurs besoins en toute tranquillité. Des villes comme Bizerte, Sfax, Gabès... sont pratiquement à l'arrêt d'investissement depuis six ans, alors que dire des villes et gouvernorats et de la dorsale Ouest du Nord au Sud ! Tout cela pour revenir à mon préféré Max Weber qui prévient que la pauvreté est rarement vertueuse alors que l'effort, le travail et l'ambition du mieux être le sont ! Comment faire en sorte que le pouvoir soit le plus vertueux possible et que la richesse et le capital le soient aussi !? J'avoue que l'équation est vertigineuse et risquée, certes, mais pas impossible. Arrêtons cette diabolisation de destruction massive de nos potentialités politiques et économiques et rationnalisons les contrôles avec des lois fermes, mais humaines ! Au fait si l'homme était aussi parfait... pourquoi Dieu a-t-il créer le pardon ! Oui c'est bien triste qu'en Tunisie la douce, la merveilleusement belle, ne fleurit en ce moment que l'inquisition de la multitude des « justiciers ». Réhabilitons les investisseurs et les promoteurs et donnons de la joie et de l'espoir à l'entreprise... et la Tunisie ira mieux ! K.G