Dès sa prise de fonction en tant que nouveau chef du gouvernement d'union nationale, Youssef Chahed s'est trouvé confronté à des situations dramatiques touchant, de surcroît, les secteurs répertoriées comme étant prioritaires par l'Accord de Carthage, à savoir la lutte contre le terrorisme , le manque de développement régional, plus particulièrement dans les zones défavorisées et reculées. Et toutes ces tragédies ont eu lieu à Kasserine, une région, par nature, très chaude et de la quelle ont émané plusieurs étincelles ayant fait embraser le climat social. Et on avait écrit, sur ces mêmes colonnes, qu'involontairement, M. Chahed a eu, avant même son arrivée au Palais de La Kasbah, à passer son premier test grandeur nature. Et pour un premier test, il a eu à passer un véritable examen. Qu'on en juge : Deux attaques terroristes consécutives en l'espace de 48 heures, suivies d'un terrible accident ayant fait plusieurs victimes entre morts et blessés. On attendait avec grande curiosité la réaction de l'équipe gouvernementale et son attitude dans la gestion de ces catastrophes. Après une certaine lenteur, due probablement à l'hébétude et à la puissance du choc ayant suivi les drames, Youssef Chahed et ses « co-équipiers » ont su réagir avec promptitude et efficacité. Tout d'abord, accompagné des trois ministres de la Défense, de la Santé et du Transport, le chef du gouvernement, s'est rendu à Kasserine et s'est réparti les tâches avec eux. Chacun s'occupant de l'état des lieux concernant son secteur. Mais c'est la situation des blessés dans l'hôpital régional de Kasserine qui a retenu, le plus, l'attention de l'opinion publique, plus précisément, à travers les réseaux sociaux. Et là, Youssef Chahed a pris le « beau risque », de s'engager à faire entamer la concrétisation des décisions et autres mesures annoncées dans les vingt quatre heures. Il avait donné des instructions fermes à la ministre de la Santé Samira Meraî pour doter, immédiatement et dans la journée d'hier vendredi, l'hôpital régional de Kasserine de tout le matériel nécessaire à son fonctionnement. Il a, également, ordonné que des médecins spécialistes soient affectés dans cet établissement dans les plus brefs délais. Il a, également, promis une initiative à Gafsa pour désamorcer les clivages qui règnent dans le Bassin minier En effet, appliquant l'adage « chose promise, chose due », Youssef Chahed a tout mis en œuvre pour que le matériel, les équipements et le personnel humain arrive, dans la journée d'hier même, sur place à l'hôpital de Kasserine. Et c'est toute une équipe du ministère de la Santé qui s'est rendue, en fin d'après-midi, à Kasserine avec, notamment, deux ambulances, des médicaments, des fournitures et bien d'autres équipements. Simultanément à cette célérité de la part de la ministre de la Santé, le chef du gouvernement a tenu une importante réunion avec le secrétaire d'Etat à l'Energie et d'autres hauts responsables du secteur pour discuter de la situation dans le Bassin minier afin de rechercher les solutions adéquates dans cette zone sensible. Il faut dire que l'évolution des événements dans cette région est préoccupante suite à la cessation de production au sein du Groupe chimique et le blocage à la Compagnie de Phosphate Gafsa (CPG). Or, au moment où le gouvernement se trouve en « plein travail », certains politiciens continuent à lancer les déclarations publiques jetant des pavés dans la mare et faisant preuve de manque flagrant de maturité politique, particulièrement en ces moments délicats nécessitant, plutôt, solidarité, sagesse et retenue, surtout au niveau du lancement d'idées inopportunes, qu'il aurait mieux valu qu'elles soient suggérées lors des réunions en cercles fermés. A ce propos, on mentionnera que le chef du bloc parlementaire de Nidaa Tounès, Sofiène Toubel propose l'octroi de 20% des revenus provenant des recettes des phosphates aux Gafsiens. «L'Etat doit assurer le développement dans la région de Gafsa en lui attribuant une partie des revenues du phosphate pour assurer son développement, comme le recommande une partie de la société civile », a-t-il explicité en substance. Il est à noter que le président du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, avait abondé dans le même sens, le samedi 27 août 2016 à Radio Gafsa, en indiquant que le gouvernement devra entreprendre des négociations avec les habitants de Gafsa, et faire en sorte qu'une partie des revenus du phosphate soit dédiée à la région. Il y a lieu de rappeler que le même appel avait été lancé par l'ancien président provisoire de la République Moncef Marzouki, qui avait promis le 21 juin 2012, aux habitants de Gafsa, que « 20% des revenus annuels du phosphate seront alloués à la région afin d'améliorer l'infrastructure et créer de nouveaux postes d'emplois ». Mais les problèmes du nouveau gouvernement ne concernent pas uniquement les régions et les événements conjoncturels. Le secteur de l'enseignement, qui bénéficie du plus gros budget, suscite, aussi, des inquiétudes et des craintes. Revenant sur les problèmes de financement rencontrés par le ministère, Néji Jelloul a déclaré que «97% du budget du ministère de l'Education est consacré au paiement des salaires » appelant à rééquilibrer le budget du ministère. Le ministre s'est aussi exprimé sur les grèves observées par le cadre enseignant affirmant qu'il croit à l'importance d'améliorer le niveau de vie des enseignants, mais rappelle que le pays passe par une crise économique particulière et qu'il y a des budgets à respecter et des équilibres financiers à prendre en considération. «Ceux qui réclament des augmentations doivent attendre à ce que je sois tombé sur un trésor », a-t-il déclaré sur un ton ironique. En tout état de cause, les observateurs estiment que la clé pour solutionner une partie des problèmes réside dans l'application des lois par tous, ce qui n'est pas encore le cas. Là aussi, Youssef Chahed a promis de remédier à cette lacune, mais la tâche s'annonce autrement plus ardue. Y réussira t-il ? Difficile à prédire tellement le défi paraît délicat dans la mesure où les citoyens ont pris le pli de l'impunité D'ailleurs, le jour où les activités redeviennent normales dans certaines entreprises en cessation de production dont notamment celles de la CPG ou encore de PETROFAC, on pourra dire alors que le chef du gouvernement a tenu ses engagements et a réussi son pari.