•Les chômeurs brandissent la menace de la désobéissance civile! La proclamation des résultats du concours de recrutement à la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) a aggravé les tensions sociales dans le bassin minier. Après les localités d'Om Laârayes , Mdhilla et El Guetar qui sont entrées en fronde depuis plus d'une semaine, la contestation sociale a repris de plus belle à Redeyef. Dès la proclamation des résultats du concours, samedi dernier, quelques dizaines de jeunes s'estimant injustement écartés du programme de recrutement à la CPG ont entamé une grève de la faim près du siège de la société publique qui constitue l'unique mamelle nourricière du bassin minier. Une vingtaine d'autres de jeunes chômeurs ont, de leur côté, déclenché une autre grève de la faim au siège de l'Union locale du Travail de Redeyef pour les mêmes motifs. Ces grévistes protestent notamment contre l'exclusion des cas sociaux et des simples ouvriers bénéficiant d'une couverture sociale. Par ailleurs, plusieurs centaines de jeunes natifs de Redeyef ont organisé, dimanche, un rassemblement de protestation devant le siège de l'antenne locale de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) pour exprimer leur ras-le-bol contre la marginalisation et la pauvreté qui frappent de plein fouet la région. «Les jeunes chômeurs ont notamment dénoncé l'opacité des critères retenus en matière de sélection des candidats au concours. Ils ont également réclamé la révision à la hausse du nombre de postes à pourvoir par la CPG dans une ambiance très tendue », précise Adnène Hajji, secrétaire général de l'union locale du travail à Redayef et porte-parole des protestataires du bassin minier ; rappelant que quelque 28 000 jeunes chômeurs ont postulé pour les 3000 postes ouverts dans le cadre d'une série de concours de recrutement organisés par la CPG dans les différentes localités du bassin minier. Selon cet ex-prisonnier politique, les protestataires ont décidé à l'issue du rassemblement de protestation d'accorder un délai d'un mois au gouvernement avant d'entrer en désobéissance civile. Une région à bout de patience… Les protestataires ont, d'autre part, reproché au gouvernement de renier l'accord conclu début avril entre l'union locale du travail et le ministère des Affaires sociales. Cet accord porte notamment sur la régularisation de la situation des ouvriers exerçant dans les chantiers, la réglementation des relations professionnelles dans les sociétés de l'environnement et de plantation et l'ouverture d'un bureau d'antennes locales de la CNSS, de la CNAM et de la CNRPS. « Nous n'avons eu que des promesses d'étudier les revendications de la région lors d'une énième réunion de négociation qui s'est tenue le 17 avril au siège du ministère des Affaires sociales en présence du ministre de l'Industrie d'un représentant de la CPG », indique Adnène Hajji. Selon lui, les populations de Redayef et des diverses autres localités du bassin minier sont aujourd'hui à bout de patience. De réputation frondeuse, le bassin minier, qui avait été à la pointe de la révolution de 2011, enregistre un taux de chômage qui tourne autour de 40%. Ses habitants réclament des emplois mais aussi la titularisation des ouvriers des chantiers, la régularisation de la situation des anciens ouvriers de la CPG partis à la retraite dans le cadre de plans sociaux. La population du bassin minier réclame également le déblocage d'une enveloppe de 400 millions de dinars promise par la CPG. Ces fonds devraient permettre non seulement la création dans le bassin minier d'une banque, d'une cimenterie et d'une société spécialisée dans le télétravail, mais aussi de financer le développement des services sociaux dans la région qui souffre d'un manque flagrant d'infrastructures pour l'éducation, la santé, la culture et les loisirs… Leader de la révolte du bassin minier en 2008, Adnène Hajji compare le bassin minier à une vache laitière qui donne son lait aux autres et ne laisse que sa bouse aux habitants de la région. Le lait du bassin minier est le phosphate dont la Tunisie est le cinquième producteur mondial et qui avait procuré au pays 825 millions de dinars de recettes en 2010. Du côté du ministère des Affaires sociales, on assure que le bassin minier aura la plus grosse part du gâteau en matière de développement au cours des prochaines années. «Plusieurs projets commenceront à sortir des cartons dans les prochains mois. La population de la région est appelée à patienter encore un peu », assure une source digne de foi au ministère.