«Rupture», tel est l'angle sous lequel est souvent vue la politique étrangère française depuis que Nicolas Sarkozy est devenu locataire de l'Elysée. Une rupture qui signifie l'inauguration d'une nouvelle étape et d'une nouvelle approche par la diplomatie française. De Kaboul à Damas, de Tbilissi à Moscou,… Avec un rythme pareil, il y a fort à parier que le Président Sarkozy rejoindra la liste des plus grands voyageurs de la planète, et ce, dans un cadre strictement professionnel! Et il ne faut pas être un statisticien pour deviner qu'il est le Président qui a passé la plus longue période en dehors de l'hexagone en si peu de temps depuis son élection. Sans doute, même les adversaires politiques les plus acharnés de Nicolas Sarkozy auront beaucoup du mal à contester son dynamisme. La diplomatie française actuelle offre un excellent argument pour combattre les théoriciens d'un ordre mondial unipolaire ou (re)bipolaire. C'est plutôt vers le «multipolaire» que pousse le dynamisme diplomatique français. Et ce ne sont ni la Chine, ni l'Inde, ni le Brésil qui sont à l'origine de cette tendance comme nombreux prédisent. C'est bel et bien la «vieille» puissance tricolore. Un retour en force? Peut-être. Mais faut-il avant prouver que le changement est substantiel. En effet, la charge de cette preuve incombe en premier lieu aux événements. Les missions diplomatiques françaises ont également un rôle important dans la présentation des grandes orientations de la politique étrangère de leur pays. C'était d'ailleurs le thème d'une réunion tenue mercredi soir, dans un cadre ramadanesque convivial, entre Son Excellence M. Serge Degallaix, ambassadeur de France en Tunisie, et des représentants de la Presse tunisienne. L'ambassadeur français a saisi l'occasion pour tracer les grandes lignes de la politique française dans les principales zones de conflit, notamment: - L'Afghanistan: concernant ce dossier, la France réaffirme son engagement à lutter contre «les forces obscurantistes», avec l'intention de transférer les prérogatives du pouvoir aux autorités afghanes au moment opportun. Le diplomate français a insisté qu'il ne s'agit pas seulement d'une opération militaire. - L'Iran: l'intention française est de poursuivre le dialogue et les efforts diplomatiques, «même si le dialogue s'avère décevant», selon M. Degallaix. La France ne s'oppose pas à ce que ce pays développe un programme nucléaire civil, mais voit que l'acquisition du nucléaire militaire déstabiliserait la région. - Le Proche-Orient: la France qui a participé au sommet de Damas constate des progrès certains dans les relations avec la Syrie. Ainsi, elle entend persévérer sur cette voie bien que les américains ne soient pas favorables au dialogue avec ce pays, et malgré l'opposition de certaines parties au Liban. A notre avis, il semble évident que la France aspire à jouer un rôle plus important dans la résolution des conflits de la région. Pour ce faire, elle mène une politique d'ouverture à l'égard de la Syrie et s'implique, de plus en plus, dans le processus de paix. C'est pour cette raison que nous nous sommes demandés s'il y a une position française claire des deux questions qui bloquent tout projet de solution finale, à savoir le droit de retour reconnu par les instruments de la légalité internationale aux réfugiés palestiniens et la question de Jérusalem. En réponse à notre question, M. Serge Degallaix a traité les deux points. Il a d'abord rappelé la position française favorable à reconnaître Jérusalem comme étant une seule capitale pour deux Etats. Il a avoué, d'autre part, que les choses sont beaucoup plus compliquées, en ce qui concerne le droit de retour. Ce qui est essentiel, selon l'ambassadeur français, c'est que la France reconnaît que le problème existe et qu'il doit être traité. Les détails devraient être probablement laissés à la diligence des négociateurs. L'Union pour la Méditerranée n'a pas, à son tour, échappé au débat. M. Degallaix a souligné qu'il y a eu déjà des travaux et des avancées. La semaine prochaine, il y aura des réunions qui regrouperont des hauts fonctionnaires des Etats membres pour discuter des solutions institutionnelles, et ce, afin que la structure soit opérationnelle dès 2009. L'UPM soulève d'ailleurs la question des relations de la France avec ses partenaires de l'Union Européenne. En effet, même si l'un des principes de la politique étrangère française est d'agir dans le cadre de l'UE, la France n'hésite pas à se lancer dans des initiatives propres, chaque fois que le consensus fait défaut, car – faut-il le rappeler encore une fois – l'Europe politique demeure loin derrière l'Europe économique.