Connu par la beauté de son paysage très agréable aux potentialités naturelles riches et variées, l'Archipel de Kerkennah, distant de Sfax d'une vingtaine de kilomètres, se caractérise par un relief plat et un milieu quasi-aride. L'Archipel, contourné d'un bleu azur, offre à étendue du regard une atmosphère où règne béatitude, calme et recueillement. Un patrimoine de superbes et uniques palmiers dattiers qui, aux dires de certains experts, constitue une inestimable richesse naturelle des îles Kerkennah parce qu'ils représentent un véritable réservoir de dattiers pollinisateurs. Ainsi, les palmes et les troncs servent à la confection du matériel de pêche. Les îles Kerkennah sont caractérisées par une basse altitude. En effet, le point culminant ne dépasse pas les 13 mètres, et c'est pourquoi l'Archipel risque de disparaître avec la montée du niveau de la mer. Kerkennah bénéficie de moins de 200 millimètres de précipitations par an. Les sols sont souvent très salins et une partie du territoire est occupée par les lagunes (Sebkhas). Ces dernières laissent l'eau de mer entrer et bousculer les terres cultivables, dès qu'un petit vent est favorable à l'arrivée de quelques précipitations. Dans ce contexte, Le Lions Club SfaxThyna vient d'organiser, le 6 février courant, un atelier de lancement d'un projet portant principalement sur la mise en place d'une «Stratégie et d'un plan d'action pour l'adaptation de Kerkennah aux effets des changements climatiques». Ce projet, qui est financé par le Programme de Micro-financement du Fonds pour l'environnement mondial et le Fonds Suisse, s'est assigné comme objectifs de favoriser une approche participative et synergique impliquant tous les acteurs afin de contribuer notamment à la sensibilisation aux effets néfastes des changements climatiques dont l'élévation accélérée du niveau de la mer ainsi que la sensibilisation de la population à la vulnérabilité du littoral tunisien face à une élévation accélérée du niveau de la mer et aux impacts susceptibles d'être générés à cet effet. Cela étant, il est possible d'élaborer une stratégie et un plan d'action pour l'adaptation de Kerkennah aux effets des changements climatiques. Cette rencontre a constitué une occasion propice pour réunir un bon nombre de personnalités à savoir: M. Abdallah Maâcha, P-DG de l'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral «APAL», Dr Wassim Sellam, président de Lions Club SfaxThyna, M. Le Délégué de Kerkennah «Bousraya Harrathi» et autres… Au cours de cette rencontre, M. Maâcha a mis l'accent sur l'importance de la préservation de l'écosystème marin et de la pêche ainsi que la biodiversité marine dans l'Archipel de Kerkennah. En effet, ce projet compte de nombreux produits tels que l'élaboration et l'adoption d'une stratégie d'atténuation et d'adaptation aux effets des changements climatiques et d'un plan d'action pour l'adaptation, en plus des actions d'atténuation et d'adaptation qui devront être entreprises par la population et les acteurs locaux. En effet, il importe d'évoquer l'importance de l'étude qui été élaborée sur la vulnérabilité du littoral tunisien face à une élévation accélérée du niveau de la mer avec l'appui, non seulement sur le troisième rapport d'évaluation de l'IPCC, paru en 2001, mais aussi sur l'exploitation des nouvelles données acquises sur le littoral tunisien qui a conclu que: «l'Archipel de Kerkennah se transformera en un grand nombre d'îlots». Ainsi, la superficie qui sera gagnée par la mer peut-être évaluée à environ 4.500 hectares, ce qui représente environ 30% de la surface totale de Kerkennah (plus que 15.000 hectares), d'où la transposition des pêcheries. La pêche traditionnelle s'amenuisera, la pêche côtière motorisée en sera bénéficiaire, mis à part l'impact économique pur et l'effet social dans le secteur de la pêche qui reste assez limité. Pour les îles de Kerkennah, les pertes économiques dues à la submersion des terres agricoles ont été estimées à environ 750.000 MD en termes de dégradation du capital productif et 55.000 MD par an, en termes de perte de production. Les impacts sur la pêche restent légèrement positifs, se traduisant par une augmentation de 25% de la valeur de la production à l'horizon 2050. Enfin, l'érosion de certaines falaises de l'île se traduirait par une dégradation du capital productif «falaise» d'environ 65 MD. Par ailleurs, la forte dépendance aux services de l'écosystème, est fragile et vulnérable. En fait, les côtes de Kerkennah se présentent selon les différentes morphologies du rivage et d'après les grandes divisions du littoral tunisien comme suit: falaises sur 22 km, côtes rocheuses basses sur 65 km, plages sableuses sur 5 km, côtes basses meubles sur 78 km et plages bordées par des dunes littorales étendues sur 4 km. Ce faisant, la forte dépendance aux services de l'écosystème, fragile et vulnérable, place le bien-être de la population de Kerkennah à la merci des conditions environnementales. Au fur et à mesure que la disponibilité et la qualité des ressources naturelles baissent, il en va de même pour la sécurité de leurs moyens d'existence. Tout impact des changements climatiques sera à l'origine d'une modification des caractéristiques de l'écosystème insulaire kerkennien et exposera le bien-être de la population à des risques climatiques, pouvant fragiliser l'équilibre de l'écosystème et l'appauvrissement de la population. Notons que l'astuce pour rétablir et reconstituer un équilibre rompu est menée par une initiative participative avec les pêcheurs de la localité d'Ouled Ezzeddine qui poursuivent la fabrication de récifs artificiels. Ce récif est une sorte de cube en ciment armé, d'une dimension de 70x70 cm avec, de chaque côté, des barres en fer de 70 cm. Chaque pièce contient une brique d'un côté et une gargoulette incrustée, de l'autre, qui servent de gîtes, une fois larguée dans l'eau, aux poissons et aux poulpes. A ce propos, les pêcheries fixes connues localement sous le vocable «Charfia» reposent sur le principe de barrer la route aux poissons, au moyen de palissades en branches de palmier et de les diriger vers des chambres de capture se terminant par des nasses où le poisson peut entrer, mais ne peut plus sortir. Parallèlement à cet atelier, le club a organisé, également, avec l'appui des étudiants de l'Institut des Beaux Arts de Sfax, une exposition de tableaux, dont le sujet est Kerkennah et les changements climatiques. 21 tableaux et une dizaine de photos de zones fragiles à Kerkennah ont été exposés à Ramla.