* Entreprise et Politique : quoi de neuf après janvier 2011? La révolution est à la mode, la bonne gouvernance aussi. «Parfois pris dans le sens de tout changement important dans les structures sociales, le régime économique, etc.», la révolution est sans doute l'expression, brusque, d'une volonté ferme de rupture avec la mauvaise gouvernance. Ce constat est valable aussi bien au niveau de l'Etat qu'au niveau des entreprises. Là où il y a exercice du pouvoir, il y a toujours risque pour les bonnes valeurs. Comme le rappelle David Landes, «les meilleures valeurs peuvent être étouffées par une mauvaise gouvernance dans un pays donné».
Liberté, droit à la participation, transparence, responsabilité, égalité, contrôle du pouvoir sont des valeurs fondamentales pour la révolution. Elles le sont aussi pour la gouvernance. Car le concept de gouvernance se réfère globalement à l'exercice du pouvoir et à la manière dont les règles sont élaborées, décidées, légitimées, mises en œuvre et contrôlées dans une organisation. Dans ce contexte, la révolution tunisienne du 14 janvier 2011 aura certainement, nous l'espérons du moins, le mérite d'instaurer un «système d'assainissement» destiné à éradiquer les défaillances, à permettre un renouvellement des acteurs économiques et politiques et à stimuler l'innovation dans tous les domaines. La confiance constitue, à notre avis, l'essence même de la bonne gouvernance. Le mérite de la révolution tunisienne, à cet égard, est justement de dévoiler «l'érosion» et la disparition de cette confiance. Il est donc temps d'asseoir «l'obligation rendre compte» et de prévaloir «la gestion participative» aussi bien dans les affaires publiques que privées. Il y va de l'avenir de notre pays. Sans doute, certains trouveront ces axes assez généraux au point de manquer de précisions utiles. Ils ont toutefois le mérite d'être universels. Dans le contexte «révolutionnaire» que connaît la Tunisie, le recours à des valeurs universelles au plan de la gouvernance demeure un préalable au bon fonctionnement des institutions publiques et privées afin d'éviter les dérapages préjudiciables au bien-être du peuple et au progrès de la société, et contribuera certainement à une insertion plus réussie dans l'économie mondiale. Innover: une opportunité pour la société civile Mieux placés que quiconque pour engager cette réflexion, les acteurs de la «société civile» disposent aujourd'hui d'une opportunité historique pour occuper la place qui leur revient sur ce terrain et créer un rapport de force en faveur du changement. Tout aussi vitale et urgente pour notre avenir, elle constitue la recherche de solutions durables aux problèmes que connaissent nos institutions politiques, éducatives, sociales, culturelles, économiques, administratives, communales, associatives,…. Car, depuis si longtemps anesthésiées par un pouvoir qui les a sclérosées, elles subissent aujourd'hui de toutes parts et de plein fouet, des remises en cause importantes, qui portent aussi bien sur leurs missions, leurs rapports avec les citoyens, leurs relations de pouvoir interne, leur façon de servir,… Qu'il s'agisse par exemple des règles qui devront dans le futur, régir les relations entre les citoyens et leurs communes, l'administration et ses usagers, les pouvoirs centraux et locaux, les banques et leurs clients, les parents et les institutions éducatives et bien d'autres sujets encore, le champ des remises en cause ne manque pas d'étendue. Au mieux, ces concessions ne font qu'éteindre des feux déclarés ou parer à des menaces d'incendies probables, sans pour autant traiter en profondeur les problèmes structurels de nos institutions. Au pire, elles peuvent même handicaper les progrès futurs, à force «d'avantages acquis» à caractère irréversible, hâtivement et imprudemment concédés. Les yeux fixés sur le rétroviseur de notre histoire et soucieuses de panser les plaies du passé, tant de voix, amplifiées par les médias, s'emploient à faire le procès d'un système et de ses hommes. On ne saurait leur contester ce droit,… jusqu'à un certain point. Car rien ne sert de dénoncer à souhait, si des solutions alternatives efficaces et crédibles ne sont pas proposées, qui ouvrent des perspectives concrètes d'action et de changement de la majeure partie de nos institutions. En ces jours et pour les longs mois à venir, bien nombreux sont ceux qui, à juste titre, focalisent leurs réflexions et l'essentiel de leurs débats sur les changements à apporter au paysage politique et aux rouages institutionnels de notre pays. L'intelligence des Tunisiens, leur lucidité et leur solidarité leur permettront d'inventer leur propre chemin.