Par Nidhal MGADMI Docteur en Econométrique appliquée à l'économie, enseignant-universitaire L'obtention d'une croissance monétaire harmonie avec l'activité économique réelle est réalisée à partir d'un objectif opérationnel fondé sur la base monétaire. Cette dernière exige que le multiplicateur du crédit soit stable au cours du temps. Autrement dit, il faut stabiliser la demande de monnaie pour atteindre l'objectif final de la politique monétaire, selon la Monétariste qui vise de maîtriser le taux d'inflation. Cette stabilité est obtenue par l'intégration du taux de change nominal et l'omission des changements structurels dans la spécification de la demande de monnaie.
La monnaie, en agissant sur les transformations réelles de l'économie, facilite la communication entre les différentes unités de production et de commercialisation. Dés lors, elle constitue l'une des préoccupations fondamentales de la politique économique. Pour cela, chaque pays doit contrôler avec rigueur la demande de monnaie de son économie.
La demande de monnaie, objet central du présent article, est à l'origine de nombreux débats dans la littérature économique (Ricardo, Fisher 1911, Keynes 1936, Friedman, Baumol et Tchundjang 1981).
La politique monétaire entretenue par la Banque Centrale de Tunisie (BCT) vise de préserver la valeur monétaire locale, en maîtrisant le taux d'inflation. Cette politique passe par l'adoption d'un objectif intermédiaire afin de garantir une croissance monétaire homogène avec celle de l'activité économique réelle. Pour atteindre cet objectif intermédiaire, la BCT utilise la base monétaire comme objectif opérationnel. Dans sa conduite actuelle de sa politique monétaire, la BCT privilégie une approche quantitative en agissant sur la base monétaire via son action sur le volume global de refinancement et notamment par l'opération d'Open Market. La réussite de la politique monétaire nécessite, selon l'approche monétariste, la stabilité de la demande de monnaie au cours du temps. La question soulevée par cet article est de cerner la stabilité de la demande de monnaie en Tunisie, durant la période 1960-2005, surtout que cette dernière a vécu des crises économiques lors des décennies antérieures et une restructuration de son système financier.
Revue de la littérature empirique Les travaux empiriques relatifs à l'application de la cointégration non linéaire sont relativement rares dans la littérature empirique et portent principalement sur l'estimation de modèles à correction d'erreur non linéaire. Un des premiers auteurs à avoir appliqué de tels modèles est Escribano (1986) sur la fonction de demande de monnaie en Grande-Bretagne. Escribano (1986) a estimé un modèle à correction d'erreur non linéaire sur la fonction de demande de monnaie en Grande Bretagne sur la période 1878-1970. Ce modèle a été repris et appliqué sur les mêmes données par Hendry & Ericsson (1991). Ces derniers ont ainsi retenu la forme à correction d'erreur suggérée par Escribano (1986) dans la spécification de la demande de monnaie comme alternative à la spécification linéaire proposée notamment par Friedman & Schwartz (1982). Avant de présenter leurs résultats, Escribano (1986) va exposer brièvement la méthodologie utilisée en pratique pour estimer un modèle à correction d'erreur non linéaire. * Dans une première étape, Escribano (1986) estime un modèle à correction d'erreur linéaire. Il applique ensuite des tests de bonne spécification visant à appréhender l'hypothèse nulle du modèle à correction d'erreur linéaire contre l'hypothèse alternative du modèle à correction d'erreur non linéaire. Escribano (1986) a appliqué des tests du multiplicateur de Lagrange, du rapport de vraisemblance ou encore de Wald. Si l'hypothèse nulle est rejetée, il passe à la deuxième étape. * La deuxième étape a pour objet l'estimation du modèle à correction d'erreur non linéaire. À cette fin, Escribano (1986) peut soit estimer différentes spécifications paramétriques, soit utiliser une procédure semi-paramétrique afin d'identifier le type de fonction non linéaire. * La troisième et la dernière étape consiste alors en l'application de divers tests de bonne spécification de la représentation à correction d'erreur non linéaire: tests d'autocorrélation des résidus, d'homoscédasticité, de non constance des paramètres. Avant de s'attacher à la modélisation non linéaire de la demande de monnaie en Grande-Bretagne, Hendry & Ericsson (1983) avaient procédé à l'estimation d'un modèle à correction d'erreur linéaire. Toujours sur les mêmes données, Escribano (1997) a prolongé l'analyse en s'intéressant plus en avant aux formes fonctionnelles paramétriques et non paramétriques des modèles à correction d'erreur non linéaires : fonctions polynomiales rationnelles et fonctions smoothing splines. La méthode reposant sur les smoothing splines permet ainsi d'estimer la fonction non linéaire régissant l'ajustement vers la cible à long terme. En appliquant cette procédure, Escribano (1997) obtient la valeur optimale du paramètre de lissage et effectue la représentation graphique de l'ajustement non linéaire.
Les résultats de l'estimation, prouvent que nous avons besoin des modèles non linéaires pour décrire le phénomène de la stabilité au niveau de la fonction de la demande de monnaie en Tunisie. Les modèles STAR peuvent être aussi utilisés comme un test de changements structurels. L'observation d'un changement de régime au niveau de la date de l'étude de la stabilité de la fonction de la demande de monnaie n'est pas surprenante car ceci est expliqué par le changement de la conjoncture économique qu'a connu la Tunisie au cours de la période allant de 1960 jusqu'à 2005. Les estimations des modèles à corrections d'erreurs non linéaires ont validé l'existence d'une dynamique qui fait converger la fonction de la demande de monnaie en Tunisie vers une situation partiellement équilibrée, puisque cette fonction admet un ajustement non linéaire vers sa valeur fondamentale. La qualité de cet ajustement est détectée à partir du signe négatif et significatif de la force de rappel non linéaire au sein d'un STECM.