L'Afrique célèbre, à la capitale éthiopienne, le 25 Mai 2013, le 50ème anniversaire de la création de l'Organisation de l'Unité Africaine (devenue l'Union Africaine en Juillet 2001 lors du Sommet de Lusaka). La Tunisie en était parmi la trentaine de pays fondateurs, en 1963 à Addis Abeba et Habib Bourguiba, en grand leader africain, a apporté sa significative pierre à cet édifice panafricain. Sans compter que c'est notre pays (appelé Ifrikiya naguère) qui a donné son nom au continent et que le périple de Hanoun, un navigateur et explorateur carthaginois, sur les côtes africains, 5 siècles Avant Jésus Christ, reste un grand épisode de notre histoire commune, ce qui démontre la vocation africaine native de notre pays. Est-il concevable que la Tunisie reste les bras croisés et les yeux fermés, boudant le grand banquet africain au moment où l'Union Africaine fête une date charnière de son processus de développement et fait sa mue vers de meilleures perspectives d'intégration et de prise en main par ses forces vives. La cérémonie de célébration enregistrera la présence d'une belle brochette de chefs d'Etat et de Gouvernement africains et sera rehaussée par des invités internationaux de grande marque. Ce serait honteux, irresponsable et non moins préjudiciable à terme que la Tunisie, membre fondateur, fasse l'impasse sur cet évènement de premier plan, couru par les grandes pontes et les grosses légumes de la scène politique et économique mondiale. Malheureusement, et au dernières nouvelles, la Tunisie a choisi une participation discrète, réduite à une peau de chagrin, dès lors que le président de la république compte snober ce grand moment africain, outre que jusqu'ici le Ministre des Affaires Etrangères, pour cause de convalescence suite à son alerte cardiaque, brillera lui aussi forcément par son absence. Notre chef de Gouvernement, la vue tout aussi courte, ne compte pas s'y rendre. S'il s'agissait de Doha ou Ryadh, Ali Laârayedh aurait sauté dans le premier avion. A défaut, il n'aurait même pas hésité une seconde à se taper la traversée à dos de chameau. Autant on peut invoquer des raisons bien comprises justifiant la défaillance du Ministre des Affaires Etrangères, autant on reste abasourdi devant le peu d'intérêt que le chef d'Etat et de Gouvernement accordent à ce 50ème anniversaire. Alors que l'un et l'autre n'ont pas cessé de nous rabattre les oreilles sur la nouvelle stratégie africaine de la Tunisie, la réorientation de sa politique extérieure vers le continent noir et l'impératif de sa présence politique et économique. Le paradoxe est saisissant ! Selon des indiscrétions, la Secrétaire d'Etat auprès du le Ministre des Affaires Etrangères, Leila Bahria, sera chargée de conduire la délégation tunisienne à cette importante manifestation. D'aucuns pourraient retorquer, non sans un certain bon sens, qu'après tout un membre du Gouvernement y prendra part, où est le problème alors ? Sauf qu'il y a une cruciale question de visibilité et de crédibilité par rapport aux frères africains que seule une représentation à très haut niveau soit en mesure d'assurer. La Tunisie sera certes présente mais serait-elle visible pour autant ? Serait-il logique de brailler sur une hypothétique stratégie africaine alors que notre chef d'Etat et de Gouvernement, les deux figures les plus représentatives de l'Etat et du pays, décident d'occulter ce rare évènement, consentant par là, en connaissance de cause, de ravaler davantage la Tunisie dans la communauté africaine et de faire preuve d'un tel mépris et d'une telle myopie. Pourtant Moncef Marzouki sera bien présent, du 1er au 3 Juin 2013 à Tokyo, au 5ème sommet de la TICAD (Conférence Internationale de Tokyo sur le Développement de l'Afrique). On serait tenté de dire que le président de la république établit son agenda international selon un guide touristique et non selon l'intérêt national. En effet, il a déjà visité Addis Abeba, pourquoi y retourner ? Quant à l'archipel nipponne, il n'y était jamais alors il y va ! On dirait qu'il est en continuelle quête de découverte personnelle et d'épanchement privé. Une vraie mentalité de touriste et non de chef d'Etat, garant de l'image du pays, de son crédit et de son intérêt. Une absence aussi fâcheuse qu'injustifiée qui en dit long sur la manière éminemment dédaigneuse et hautement paradoxal dont nos deux chefs de l'Exécutif traitent l'histoire, la géographie et l'avenir.