Aujourd'hui, encore, les agents de contrôle ont réussi à intercepter au niveau de la zone militaire tampon, une grande quantité de médicaments, que des contrebandiers tentaient de faire passer en Libye. Et cette prise n'est qu'un énième épisode d'un feuilleton qui n'en finit plus. Et il ne se passe quasiment pas une semaine sans que les agents des douanes ou leurs collègues de la sécurité intérieure ou de l'armée, ne procèdent à des saisies pareilles. Sachant que ce qui est saisi n'est qu'une goutte dans l'océan de ce que les contrebandiers arrivent, malgré tout, à faire passer les frontières. Il s'agit, là, faudrait-il le rappeler de médicaments achetés par l'Etat tunisien, souvent au prix fort et contre paiement en devises. Des médicaments que l'Etat subventionne à certaines hauteurs pour épargner les bourses des malades tunisiens. Or il se trouve que ce sont d'autres gens qui profitent des largesses de l'Etat tunisien, et des sommes énormes d'argent versées en subventions et qui sont détournées en faveur d'autrui. Et d'un autre côté, il ne se passe pas un jour sans qu'on entende des citoyens se lamenter de l'indisponibilité des médicaments dans les structures sanitaires du pays, et même, parfois, dans les officines privées. Comme on ne cesse d'entendre les services de la CNAM se plaindre d'un déficit et d'un manque à gagner en matière de remboursement de soins, alors que des sommes astronomiques sont dilapidées, chaque jour, en dépenses en médicaments et qui sont détournées ailleurs qu'au profit des malades tunisiens. Et dans tout çà, le ministère de la santé ne semble nullement inquiété, et n'a rien tenté pour arrêter cette hémorragie qui pompe les deniers de l'Etat et met en péril la santé du tunisien. Le ministère de la santé semble, apparemment, convaincu que la lutte contre cette contrebande est, uniquement et exclusivement, du ressort des forces de sécurité et des douanes, et il semble ignorer que le principal contrôle et le plus facile et efficace, est de son ressort. En effet, et au lieu de toujours, courir derrière les contrebandiers et faire courir à nos forces armées des risques inutiles et leur faire perdre un temps précieux qu'ils feraient mieux d'exploiter dans la lutte contre les autres périls qui guettent la Nation, il aurait suffi que le ministre de la santé prenne la décision d'arrêter cette fuite à la source. Ce qui est chose plus que facile et faisable, moyennant une once de bonne volonté. Car les contrebandiers ne sont pas en train de collecter ces médicaments n'importe où. Ils les achètent chez nos chers pharmaciens. Et nos chers pharmaciens ne semblent nullement étouffés par le patriotisme, puisqu'ils n'hésitent pas une seconde à vendre aux libyens des quantités phénoménales de médicaments, et généralement, des médicaments onéreux, et ce, sans exiger la présentation de la moindre prescription médicale. Et il ne s'agirait nullement de nier cela, car ce manège est opéré en plein jour, devant tout le monde, et il suffirait à n'importe qui de se rendre dans une officine dans un des quartiers huppés connus pour héberger des libyens pour assister à une scène, au moins, de ce genre, avec des ventes qui se chiffrent en plusieurs centaines de dinars pour un seul « client ». Certes, certains pharmaciens, et pour se couvrir, demandent à ces « clients » de présenter des ordonnances, ce que ceux-ci n'ont aucun mal à faire, en se les procurant chez quelques médecins aussi à cheval sur les principes de patriotisme que les précédents. Or, si le ministre de la santé avait voulu arrêter cette hémorragie, il lui aurait suffi de donner ses ordres à ses services d'inspection pharmaceutique, pour contrôler les officines qui consomment beaucoup plus de médicaments qu'à leur habitude d'il y a quatre ans, comme ils savent si bien le faire pour d'autres produits, comme ceux prisés par les toxicomanes. Et ce, en demandant aux grossistes répartiteurs de médicaments de leur fournir les carnets de commandes de ces officines, puis d'aller contrôler la vente de ces produits chez ces pharmaciens. Et de même pour les médecins qui prescrivent des tonnes de médicaments à certains « clients » qui ne disposent même pas de dossiers médicaux chez eux… Aussi simple que çà ! Sauf qu'apparemment, au ministère de la santé, il semblerait qu'on ait d'autres chats à fouetter que de s'occuper de ce qui a trait à la santé du pauvre tunisien.