Le Pr Aïda Borgi exerçant au service de réanimation pédiatrique de l'hôpital d'enfants de Bab Saâdoun n'a, apparemment pas, trouvé d'autres moyens pour faire parvenir sa voix à qui de droit, que de passer par les réseaux sociaux. Il faut croire que les décideurs en matière de santé sont trop occupés à trouver une formule pour traiter gratuitement les chômeurs du pays, pour pouvoir donner un brin d'attention aux petits enfants tunisiens qui meurent par défaut d'équipements adéquats dans les hôpitaux du pays. Le Pr Borgi a, donc, été « réduite » à adresser une lettre ouverte sur sa page facebook, à l'attention du Ministre de la Santé, pour décrire son désarroi de devoir refuser des soins à des enfants en détresse vitale, par manque de places dans son service, et pour dire combien était grande sa détresse quand elle sait d'avance que l'enfant qu'elle refuse de soigner allait être condamné, car ses parents n'ont pas les moyens pour payer les soins dans des cliniques privées, dont la prise en charge dépasse souvent les ressources des familles. Ce que décrit le Pr Borgi n'est pas nouveau. Il s'agit d'un funèbre schéma qui se répète tous les ans, en plein hiver, quand l'épidémie de bronchiolite commence à se propager parmi les enfants tunisiens semant la panique, mais aussi la mort sur son passage. Le scénario qui se répète chaque année, à la même période, est implacable et glaçant d'horreur, aussi bien pour les parents que pour les médecins et autres soignants. L'épidémie de bronchiolite ne cesse de terrasser des enfants en bas âge. Son traitement nécessite, le plus souvent, l'hospitalisation des jeunes malades en réanimation pédiatrique. Or, les places manquent cruellement. Et les médecins revivent le cauchemar de chaque année, accrochés au téléphone, tentant l'impossible, essayant de trouver une miraculeuse place disponible en réanimation pédiatrique, voire même, néonatale. Puis, finalement, les médecins sont obligés de refuser des bébés sachant qu'ils les condamneraient ainsi à une mort très probable sachant que les parents n'ont pas les moyens de soigner leurs enfants dans les cliniques privées qui réclament, implacablement et froidement, une caution de quelques milliers de dinars, pour accepter de prendre en charge ces bébés en détresse. Les médecins se battent, s'acharnent, se débattent, réclament des moyens, des lits de réanimation, du matériel, mais n'arrivent pas à obtenir ce qu'ils revendiquent. Quant aux pouvoirs de tutelle, ils font semblant de n'avoir rien entendu, attendant que l'épidémie passe, gagnant ainsi une année de trêve avant la saison d'après. Or, s'ils avaient consenti à faire de petits efforts chaque année, ils auraient, à la longue, arrangé la situation. Chaque hiver, ce dossier oublié est ré ouvert, les autorités n'y sont pas préparées et préfèrent jouer à l'autruche. Il est pourtant du devoir de l'Etat de fournir les moyens à ses médecins de la fonction publique de traiter leurs patients. A défaut de pouvoir soigner dans les hôpitaux, ils n'ont qu'à se débrouiller pour trouver une solution afin de les faire prendre en charge, dans les cliniques, par les caisses d'assurance maladie. Le constat est amer lorsqu'on lit la requête du Pr Borgi qui demande, désespérément de l'aide, dans sa noble tâche qui consiste à sauver ses très jeunes patients en détresse.