La politique s'invite systématiquement sur tous les terrains où le Maroc et l'Algérie se frottent, même sur le terrain du sport, surtout quand l'épineux dossier du Sahara occidental s'y glisse. C'était arrivé lors de la CAN 2024 en janvier, c'est encore arrivé en avril dernier lors de la demi-finale de la coupe de la CAF à Alger. Cette fois la friction se produit très loin de l'Afrique du Nord, en France, à l'occasion des Jeux olympiques (JO) de Paris... La fête mondiale du sport est belle, très belle, tellement belle qu'elle a même changé la légendaire humeur grognonne des Français, avec une pluie de médailles qui a déjà battu à mi-parcours le chiffre des JO de Tokyo. Mais pour le Maroc et l'Algérie il en faut beaucoup plus pour partager cet enthousiasme, il faudrait un miracle sur le très disputé Sahara occidental, et ce miracle n'arrive toujours pas des décennies après... La preuve : Saida Charaf, une artiste marocaine, a provoqué un tollé à Paris en chantant la marocanité du Sahara occidental lors de la soirée musicale organisée jeudi dernier, en l'honneur du Maroc, au stand marocain. «Sahara marocain. Merci président Macron», a clamé Charaf, en allusion à la décision du président français de se ranger officiellement derrière le Plan défendu par Rabat. Cette position a provoqué l'ire de l'Algérie, qui a réagi en rappelant immédiatement son Ambassadeur à Paris. Il est évident que pousser la chansonnette de la sorte sur un thème aussi explosif ne pouvait pas laisser indifférents les Algériens. On est censé parler de sport, exclusivement, mais ça a dérapé. Mohamed Gnabaly, le maire de l'île-Saint-Denis, commune de la Seine-Saint-Denis en région parisienne, a donc pris ses responsabilités hier samedi 3 août en fermant tout bonnement le stand marocain dans la fan zone Africa Station des JO de Paris 2024. Avant le jeudi 1er août, lors de la fameuse soirée musicale, en présence de l'ambassadrice du Maroc en France, Samira Sitaïl, le maire était intervenu personnellement en plein concert pour interpeller la chanteuse marocaine. «Ici, dans la station Afrique, je ne veux pas qu'on fasse de la politique. On est tous ensemble. Et pour ne blesser personne à l'île-Saint-Denis, je veux qu'on reste ensemble», a déclaré Mohamed Gnabaly juste après le show de Saida Charaf. Le maire a été copieusement hué par les Marocains présents, qui scandaient «Sahara marocain». La Mairie de l'île-Saint-Denis a pondu un communiqué ce dimanche pour dire que c'est «avec grand regret que la Ville a dû signifier à la représentante du Maroc la fin de la convention d'occupation qui liait notre ville à l'ambassade du Maroc dans le cadre de Station Afrique (...). Ces interventions politiques contreviennent aux règles de neutralité fixées dans la convention signée par tous les pays», ajoute la mairie. Pourtant des réunions avaient été organisées avec les émissaires marocains «pour demander à ce qu'aucune allusion sur la situation ne soit faite par les intervenants et artistes de la soirée», ajoute la même source. Elle souligne par ailleurs que «le même dispositif avait été mis en place lors de la soirée en l'honneur de l'Algérie il y a une semaine», et «les engagements avaient été tenus, malgré les annonces présidentielles du jour». Et d'ailleurs «l'ambassadeur d'Algérie (...) était présent la veille à Station Afrique» avant son rappel à Alger, rappelle le communiqué. Par sûr que cette comparaison, très favorable à l'Algérie, soit agréée par les Marocains. Les activistes et médias du royaume ont aussitôt flingué le maire Mohamed Gnabaly et l'ont accusé de servir la soupe à l'Algérie. Les détracteurs du maire sous-entendent un parti pris manifeste vu que l'épouse de Gnabaly est d'origine algérienne. «Sous la coupe de son épouse algérienne très nationaliste, Mohamed Gnabaly, maire de l'île-Saint-Denis, suspend les activités de la Maison Maroc», a osé le site marocain Barlamane. Les attaques contre le maire de l'île-Saint-Denis sont les mêmes sur le réseau X. On en est là et manifestement on n'est pas près d'en sortir.
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