Les relations commerciales entre la Tunisie et la Libye ont connu depuis la visite effectuée par le président Moncef Marzouki les 2 et 3 janvier 2012, une nouvelle impulsion. Aucun accord n'a été signé au cours de cette visite qui s'est limitée à l'expression des bonnes intentions entre les deux parties et à la proclamation des grands principes de solidarité ainsi qu'à souligner la solidité des relations fraternelles. La participation, dimanche 08 janvier 2012, à Tripoli de quelque 80 hommes d'affaires tunisiens agissant dans divers secteurs économiques à une rencontre avec leurs homologues libyens est un signe incontestable de l'effet de cette visite. La concurrence étrangère Pourtant de nombreux analystes ont voulu tempérer les ardeurs et se sont interrogés sur la nécessité pour la Tunisie de compter sur la Libye pour l'aider à surmonter la crise qu'elle traverse en servant de débouchée pour les entreprises et de marché d'absorption des demandeurs d'emploi tunisiens. En effet, tout en étant conscients du besoin de la Tunisie à l'égard de la Libye et vice-versa, ces mêmes analystes avancent comme argument la situation chaotique qui règne en Libye avec la circulation des armes et les problèmes d'insécurité. Ils font état aussi de la contestation par certains Libyens du Conseil national de transition (CNT), l'organe politique et législatif qui a conduit la révolte contre le colonel Mouammar Kadhafi. La Libye, un marché prometteur Mais, ces analystes oublient que la Libye vient de recouvrir ses avoirs bloqués à l'étranger estimés, selon des sources de la Banque centrale libyenne à quelque 100 milliards de dollars. Une manne financière qui tombe à pic pour les nouvelles autorités libyennes afin de lancer les grands chantiers de reconstruction dans le pays ruiné par plus de 8 mois de guerre civile et de bombardements intenses de l'OTAN. En outre, la production pétrolière libyenne qui est la principale source de revenu du pays a commencé à atteindre des niveaux records avec plus d'1 million de barils/j. Des projections tablent sur une normalisation de la production au deuxième trimestre 2012 pour atteindre 1 million 600 mille barils/j, soit le niveau d'avant conflit. Ainsi les estimations des institutions économiques internationales projettent une croissance économique exceptionnelle en Libye, pouvant atteindre 20%. Autant dire que la Libye a entamé son retour à la normalisation et peut servir, pour la Tunisie qui fait face aux prémices d'une crise économique en raison des sit-ins dans les usines, du recul du secteur touristique, de bouffée d'oxygène aux entreprises tunisiennes ainsi qu'à absorber une partie de la main-d'œuvre. Il faut rappeler qu'avant la Révolution tunisienne du 14 janviers et celle de la Libye du 17 février, les échanges commerciaux entre les deux pays avoisinaient les 2 milliards de dollars avec quelque 1200 entreprises tunisiennes exportatrices sur le marché libyen. Avantage pour les entreprises tunisiennes Certes, des observateurs ont exprimé leurs craintes de voir les entreprises françaises, italiennes, britanniques et américaines, dont les pays avaient soutenu les insurgé libyens, rafler les marchés des grands chantiers de reconstruction dans le pays. Toutefois, ces entreprises et grandes compagnies pétrolières ont adopté une circulaire dans laquelle elles se sont engagées à recruter en priorité des cadres tunisiens pour leur besoin en personnel eu égard à leurs compétences et à leurs capacités linguistiques. Quoi qu'il en soit, les Libyens ne pourront pas faire fi de l'élan de solidarité manifesté par les Tunisiens au cours de l'insurrection qui a secoué leur pays. En effet, plus de 100.000 Libyens ont été accueillis en Tunisie ainsi que des milliers de blessés ont été soignés dans les différentes cliniques sans compter l'approvisionnement par la Tunisie du marché libyen en produits et marchandises. Cette réalité doit pousser les entreprises tunisiennes à aller sur le marché libyen afin de conquérir des contrats en se prévalant de cette solidarité à l'égard de laquelle de nombreux Libyens, les responsables à leur tête, en sont reconnaissants. D'ailleurs, les initiatives communes prises par les hommes d'affaires des deux pays de créer des consortiums dans le domaine du bâtiment et des travaux publics (BTP), démontrent la volonté commune de surmonter toutes les difficultés et d'associer les entreprises tunisiennes au juteux marché de construction en Libye.