TUNIS, 12 mars 2011 (TAP) - La révolution tunisienne continue de susciter admiration et interrogations sur ses perspectives. A l'instar de beaucoup d'autres hommes politiques et économistes étrangers qui ont visité la Tunisie post-révolutionnaire, Jean Daniel le célèbre Journaliste et écrivain français séjourne actuellement à Tunis pour faire part de ses réflexions sur la Révolution du Jasmin comme il a bien voulu l'appeler. C'est au cours d'une rencontre organisée, samedi après midi, au collège international de Tunis qu'il a livré ses impressions avec beaucoup de pertinence sur la révolution tunisienne. Sa connaissance du terrain et sa grande estime pour la Tunisie l'ont conduit à revisiter le passé pour éclairer le présent. C'est ainsi qu'il a évoqué un de ses premiers souvenirs en terre tunisienne qui remontent à la Bataille de Bizerte où il fut blessé et soigné. Anticolonialiste convaincu, Jean Daniel, considère l'échec de la décolonisation comme étant un échec personnel car ''mon investissement était total dans l'anticolonialisme''. Aujourd'hui, il parle du mystère de la révolution tunisienne pour expliquer sa temporalité et non pas sa raison d'être car, a-t-il dit, il faut laisser aux sociologues et aux politologues le soin d'en analyser les causes. Bien entendu l'arbitraire était une réalité visible et l'évènement révolutionnaire est ''irréductible en lui même'' a estimé l'éditorialiste de l'hebdomadaire français le ''Nouvel Observateur'', avant d'ajouter que rarement un événement a été aussi rajeunissant pour lui. Le peuple tunisien a grandi son pays, a souligné Jean Daniel, précisant que les jeunes qui ont fait la révolution avec des moyens modernes, en allusion aux réseaux sociaux qui ont été utilisés pour mobiliser la jeunesse contre la dictature, n'obéissent à aucune structure politique. Aujourd'hui on ne parle plus d'émancipation comme au temps de la lutte pour l'indépendance mais de révolution, a-t-il affirmé, plaidant cependant en faveur de la non violence pour se démarquer de ceux qui ont lié les révolutions à la violence, notamment Franz Fanon ou encore Jean-Paul Sartre. La non violence est une victoire par d'autres moyens alors que la violence révolutionnaire n'est finalement ni conventionnelle ni une fatalité, a-t-il insisté, précisant que la liberté c'est le pouvoir de décider seul et qu'elle comprend des risques. Concernant l'avenir de la révolution tunisienne, Jean Daniel conseille d'éviter le pessimisme, car avec la révolution tunisienne et ses effets sur le monde arabe, les dictateurs savent qu'ils n'ont plus la puissance, ni la richesse, ni la police et qu'ils sont désormais sous la surveillance des jeunes. Il a ajouté qu'il ne faut pas se décourager devant les difficultés et que l'idée qu'un peuple jeune puisse se dresser contre les dictatures n'était pas courante, mettant en garde contre les récupérateurs dont l'histoire montre qu'ils sont très habiles. La peur de l'islamisme radical et l'espérance d'une démocratie dont il ne veut pas croire qu'elle est galopante mais qui serait plutôt graduelle résume l'état d'esprit de Jean Daniel Ben Saïd.