Ce 6 mai, la Tunisie connaît ses premières élections municipales depuis la chute du président Ben Ali en 2011. Fait inédit dans un pays du monde arabe, le gouvernement a instauré pour ce scrutin des listes équitables entre femmes et hommes, y compris pour les têtes de listes de chaque parti ou coalition. Les deux principales formations, Nidaa Tounes et les islamistes d'Ennahdha, ont respecté la règle. Elles sont donc 580 femmes têtes de listes, soit plus du quart (2.074 listes au total), alors qu'une centaine de listes ont été écartées pour non-respect de la parité. Une nouvelle génération politique Cette configuration est novatrice dans un pays qui est pionnier dans l'émancipation des femmes depuis son indépendance, avec l'adoption en 1956 du Code du statut personnel (CSP) abolissant polygamie et répudiation. Ce Code du statut personnel, promulgué le 13 août 1956 par le premier président Habib Bourguiba, accorde aux Tunisiennes des droits sans précédent: il abolit la polygamie, interdit la répudiation, institue le divorce judiciaire et fixe l'âge minimum du mariage à 17 ans pour la femme, «sous réserve de son consentement». Puis en janvier 2014, la nouvelle Constitution a inscrit l'égalité entre hommes et femmes et introduit un objectif de parité dans les assemblées élues. 52% sont des électeurs ont moins de 35 ans En juillet 2017, le Parlement a voté une loi pour lutter contre les violences faites aux femmes. Elle reconnaît, en plus des violences physiques, les violences morales, sexuelles et celles relevant de l'exploitation économique. La loi est entrée en vigueur en février 2018. Puis en septembre 2017, l'interdiction du mariage des femmes avec des non-musulmans a été levée. Reste le tabou de l'héritage. Dans la législation tunisienne, les femmes n'héritent généralement que de la moitié de ce qui revient aux hommes, comme le prévoit le Coran. Le président Béji Caïd Essebsi a lancé en août 2017 un débat sur cette question sensible. Malgré beaucoup de progrès, les mentalités restent cependant plus favorables politiquement à un électorat masculin. En mars 2018, plus d'un millier de Tunisiens, en majorité des femmes, ont défilé à Tunis pour réclamer l'égalité dans l'héritage, scandant: c'est «un droit, pas une faveur». Aujourd'hui en Tunisie, une nouvelle génération politique féminine est en train d'émerger, un changement radical dans un pays qui compte 5,3 millions d'électeurs, dont 52% sont des jeunes de moins de 35 ans.