Pandémie, confinement général, peur de l'inconnu… La situation n'est pas très confortable pour le peuple tunisien et pour toute l'humanité. Devant ces conditions, M. Chedly Ben Ammar, l'homme d'économie et de culture a dressé un message : Si je reprends la plume aujourd'hui, c'est parce que je me suis retrouvé quasiment en larmes devant ces internes et de ces résidents de l'hôpital de Sfax qui voulaient absolument témoigner de leur désarroi, de leur présence au combat, malgré le dénuement, malgré le danger, malgré l'absence de protections que des décideurs auraient dû commander et fournir en temps utile pour être à même d'affronter ces temps critiques. Il faut rendre un vibrant, un puissant hommage, un hommage submergé de notre gratitude à l'égard de ces médecins, de ces infirmiers et de ces infirmières, de ces étudiants, de ces techniciens en charge de la maintenance qui sont en première ligne dans la lutte contre ce fléau qui nous atteint. Nous sommes en guerre aujourd'hui, une guerre d'autant plus implacable que l'ennemi est invisible à nos yeux, nous sommes en guerre contre un de ces fléaux qui nourrissent notre image de l'apocalypse depuis la nuit des temps, et nous sommes démunis. Démunis aussi ces travailleurs qui continuent à œuvrer pendant que les autres sont censés rester confinés chez eux, les éboueurs qui collectent chaque jour nos déchets, les agriculteurs qui font le nécessaire pour que la chaîne alimentaire ne soit pas rompue, ces marchands, ces employés des grands magasins, tous ceux qui, chacun dans leur domaine, essaient de préserver la vie en lui fournissant le nécessaire – et qui souvent, eux aussi, manquent de protection contre ce terrible, ce terrifiant virus qui nous menace. Le covid-19, en nous privant de la présence de ceux qui nous sont chers, en nous reléguant dans nos maisons, a révélé les failles de notre système, et il faut bien en convenir : notre Etat est mis à nu. A nu parce qu'il s'est considérablement appauvri ces dernières années. A nu parce qu'il peine à assurer ses fonctions, nu parce qu'il trébuche lorsqu'il s'agit de nous protéger, nous citoyens qui dépendons de lui dans nos dimensions collectives, et ce, n'en déplaise aux tenants du néo-libéralisme qui ne jurent que par des états réduits au stade de l'embryon. Pourquoi certains continuent-ils à sortir, à traîner dehors sans nécessité aucune ? Le virus ne nous demande ni notre nom, ni notre âge, ni notre condition sociale avant de pénétrer en nous pour nous affaiblir et nous tuer. Il profite de notre inconscience, de nos dénis, et de notre ignorance. Attention : loin de moi les idées de « fin du monde » et le catastrophisme qui achèveraient de détruire notre tissu social. Il faut que l'Etat se reprenne. Il faut qu'il intensifie les mesures de lutte contre ce fléau, qu'il passe au stade le plus strict des mesures pour le contrer, justement parce que nous manquons de moyens pour y faire face. Il faut que l'Etat sévisse avec la plus grande sévérité contre ceux qui bravent le confinement et le couvre-feu, et de ce fait mettent en danger leur entourage. Mais il faut qu'il sévisse aussi contre ceux qui, profitant des conditions actuelles, spéculent sur les produits de première nécessité, les stockent pour les revendre aux plus hauts prix, et aggravent ainsi le coût de la survie pour les plus démunis, et pour les autres aussi… Il faut trouver les moyens de renforcer notre département de la Santé en dirigeant vers lui toutes les ressources disponibles, mais aussi les dons des particuliers et des entreprises. Seule la solidarité nous sauvera de l'hécatombe. Que chacun puisse donner selon ses possibilités, que ces dons soient gérés dans la transparence et, je me répète, je souhaiterais que cela se fasse par un comité d'élus émanant de notre parlement qui seront choisi pour leur intégrité. De la transparence, et de la transparence seule renaîtra la confiance des Tunisiens envers leur nation. Des experts pourront nous dire quelles seraient les commissions à mettre en place pour acquérir les moyens de protection et les équipements nécessaires pour traiter le nombre de malades qui va croissant. Il faudrait aussi généraliser le dépistage des gens, peut-être pour affiner les modalités du confinement, il faudra enfin veiller à ce que tous aient des conditions de survie suffisantes : nous sommes en guerre contre ce virus, et rien ne peut égaler le langage de la raison et de l'efficacité. Une attention toute particulière sera portée à ce médicament dont on parle beaucoup à travers le monde, et de manière fort polémique. Que nous importent les querelles de savants et les intérêts des entreprises pharmaceutiques ? L'hydrochloroquine existe depuis 70 ans, elle ne coûte quasiment rien et peut être fabriquée partout, puisqu'elle est dans le domaine public. Pourquoi ne pas la produire chez nous et l'administrer aux personnes infectées ? Pourquoi ne pas participer à cet essai européen qui vient de commencer – ou mener notre propre essai et transmettre nos propres observations ? Suivons les recommandations de l'OMS, et luttons, comme ces équipes médicales à travers le monde qui, parfois contre les décisions de leurs politiciens, recourent à ce médicament et participent avec les moyens du bord à la lutte mondiale contre le virus… Soyons les acteurs de notre sauvegarde, et participons à celle du monde. Quant au confinement, certains le vivent comme une privation de liberté, une source de conflits avec l'entourage immédiat, une épreuve qui évalue nos capacités de résilience, seul ou en famille. Nous pouvons, nous devons résister à ces pensées négatives. Avant tout, évacuons la peur et le stress qui sapent nos capacités immunitaires, apprenons à méditer, à patienter, à rire, seul ou avec les autres, vivons sainement quoique confinés. Ayons confiance en Dieu, le très Miséricordieux, le Protecteur, le Bienfaisant et adressons lui nos prières, mais de chez nous, uniquement de chez nous, depuis l'intérieur de nos maisons et de nos appartements, parce que nous sommes humains et que nous vivons d'espoir. وَمَا كَانَ اللَّهُ مُعَذِّبَهُمْ وَهُمْ يَسْتَغْفِرُون صدق الله العظيم - سورة الأنفال - الآية 33 Et Allah n'est point tel qu'il les châtie alors qu'Ils demandent pardon. Coran, Sourate 8 « Al Anfal – Le butin », verset 33