Plusieurs hauts gradés de l'Armée à la retraite se sont relayés jeudi 13 mars à la Bibliothèque nationale pour passer au peigne fin le terrorisme et préconiser des approches pour l'éradiquer du pays, à l'occasion d'un colloque organisé par l'Association des anciens officiers de l'Armée nationale (AAOAN), en collaboration avec le Centre tunisien d'études de sécurité intégrale et le soutien de la Fondation Hanns Seidel Stiftung. Les participants -- épaulés par un expert en stratégie prospective, un économiste, un haut responsable du Centre tunisien pour les Etudes de Sécurité Globale et un cheikh très médiatisé, érigé en symbole de l'islam tolérant et pourfendeur des jihadistes – ont passé en revue durant cinq heures ce « phénomène » qui a pris une dimension inquiétante sous la « Troïka » sortante. En présence du président de l'Association, le Colonel-Major à la retraite, Mahmoud Mzoughi (67 ans), du représentant de la Fondation allemande, Jamil Haider, et d'une assistance nombreuse, les intervenants --Mokhtar Ben Nasr (Colonel-major, 60 ans), Mouldi Meddeb (Colonel-Major et membre du comité directeur de l'AAOAN, 63 ans), Mazen Chérif (expert en stratégie prospective), Mohamed Haddar (économiste), Dr. Tahar Laamouri (capitaine), Mohamed Meddeb (Général de Brigade), Chedhly Chérif (Amiral, 72 ans), Touhami Machta (Colonel) et cheikh Férid El Béji, président de l'association « Dar Al Hadith Ezzeitounia »-- ont souligné l'urgence du combat contre le fléau, sans lésiner sur les moyens, d'abord militaires et sécuritaires. Mohamed Meddeb: Un véritable plan national Ces moyens ont été brillamment et très largement exposés par le Général de Brigade Mohamed Meddeb qui a présenté une approche globale et multidisciplinaire des mesures d'ordre politique, socio-économique, médiatique, idéologique de lutte contre le terrorisme et la contrebande (armes, munitions, explosifs en quantité impressionnante), qui sont, dit-il « très interconnectés ». M. Meddeb a également souligné la nécessité de mettre en œuvre « de toute urgence, un véritable plan national de maîtrise du contrôle des frontières Sud-Est de la Tunisie (avec la Libye, pays enlisé dans le chaos), afin d'isoler les éléments terroristes déployés dans le pays, en leur coupant les lignes de ravitaillement et de soutien extérieur ». Ne laissant rien au hasard, M. Meddeb a consacré une grande partie de son intervention à « la contribution active des citoyens, particulièrement à l'effort de recherche de renseignement », condition sine qua non, selon lui, du succès de cette lutte. « L'implication du citoyen, la colonne vertébrale de la lutte contre le terrorisme et la contrebande, est déterminante », a-t-il insisté. Les autres intervenants se sont succédés pour parler de l'organisation, des moyens et du financement des cellules terroristes, de la contrebande et son interconnexion avec le terrorisme, de son évolution à l'échelle locale, régionale et mondiale, du terrorisme maritime, de la psychologie du terroriste et de la technologie au service de la lutte contre le terrorisme. Le Colonel Touhami Machta a ainsi « régalé » l'assistance en lui projetant un documentaire montrant une panoplie de drones de la 3e génération, dont le nouveau fleuron de micro-drone (libellule, oiseau…) que l'armée américaine a développés pour des missions de surveillance, de reconnaissance ou encore pour la détection d'agents chimiques ou biologiques. Férid El Béji se déchaîne Pour clore de débat, cheikh Férid El Béji, ne se prive pas encore de vilipender le wahhabisme et le salafisme, en dressant un réquisitoire cinglant contre la pensée jihadiste. « Il n'y a aucune différence entre salafisme jihadiste et salafisme piétiste. Tous les jihadistes sont des sadiques, des psychopathes, des daltoniens, ils voient tout en noir et blanc », fulmine-t-il. Cheikh El Béji, suggère ensuite une « une stratégie de lutte sans merci contre tous ceux qui propagent leur pensée ou la mettent application ». Il suggère: « La reprise en main par les autorités de tutelle des centaines de mosquées actuellement sous l'emprise des courants radicaux ». « La fermeture des ‘jardins d'enfants' coraniques, devenus des pépinières de jihadistes en herbe qui font, de manière innocente, acte d'allégeance et d'obédience au ‘Moujahid' Mollah Omar et à ‘notre Cheikh' Aymen Dhawahiri ». http://www.youtube.com/watch?v=4BtHVPgVkrg http://www.youtube.com/watch?v=K30ZPG68DHs Ces « jardins », créés par des « associations caritatives » opérant pour la plupart hors la loi, ont proliféré depuis la révolution. « Le contrôle de l'enseignement de la théologie pour qu'il soit conforme aux lois de la République et aux valeurs de tolérance et de respect de l'autre ». « Le recyclage du cadre religieux et l'encouragement de l'islam zeitounien tunisien ». « L'interdiction de l'accès aux médias des pseudo-cheikhs qui incitent à la violence ou font de la propagande terroriste, à l'instar de celui qui proclame que Ben Laden est un martyr et un héros », a-t-il dit dans une allusion au prédicateur salafiste Khamis Mejri qui a plusieurs fois rendu hommage à Oussama Ben Laden. « Quiconque incite au meurtre est un meurtrier », décrète cet ouléma de pure souche zeitounienne.