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Tunisie - Syndicats: "L'UGTT a voulu jouer le jeu de la terre brûlée", affirme Habib Guiza
Publié dans WMC actualités le 14 - 03 - 2011

La Confédération générale des Travailleurs de Tunisie (CGTT), a été créée le 3 décembre 2006, ou plutôt ressuscitée puisqu'elle existait du temps de feu Farhat Hachad. La législation le permettait, pas l'ancien régime «avec la complicité de la direction de l'UGTT», elle n'a donc pas pu exercer son droit. La plainte déposée à l'encontre du gouvernement tunisien auprès de l'Organisation internationale du travail (OIT), a été jugée recevable sans pour autant changer quoi que ce soit sur le terrain. Prenant le relais, l'Association Mohamed Ali, présidée par Habib Guiza, s'est lancée dans des études sur l'histoire du syndicalisme et le monde du travail, ce qui lui a permis d'être très au fait de ces deux importantes questions. L'étude la plus importante a été la réalisation d'une prospective sur la Tunisie en 2040.
Pour être édifié sur la CGTT, son rôle dans l'enrichissement du paysage syndical du pays, Habib Guiza, l'initiateur, en parle.
WMC : La CGTT est aujourd'hui opérationnelle, quelle est sa situation sur le terrain?
Habib Guiza: A la date d'aujourd'hui, nous avons 50 syndicats et 10.000 affiliés. Tout en sachant que l'UGTT compte 300.000 affiliés sur plus de 3 millions de travailleurs dans notre pays. Voyez le gap, au moins 90% des salariés ne sont pas syndiqués. En ce qui nous concerne, nous voulons travailler sur ces 90%, cela ne veut pas dire que certains affiliés à l'Union Générale des Travailleurs ne la quitteront pas pour rejoindre nos rangs... Il y en déjà qui veulent se désolidariser de l'UGTT pour venir chez nous.
Que leur offrez-vous de plus que l'UGTT?
Tout d'abord, il faut savoir que nous ne nous inscrivons pas dans la continuité de ce que fait l'UGTT mais plutôt dans la rupture avec ses pratiques. Nous voulons également consacrer la pluralité syndicale dans le sens où chaque travailleur est libre de choisir l'organisme qu'il estime être le plus représentatif pour lui. Le pluralisme syndical existait historiquement dans notre pays. Avant l'indépendance, nous avions deux syndicats.
Qu'est-ce qui a dicté le besoin de créer un autre syndicat alors que l'UGTT était là?
Le modèle syndical que représentait l'UGTT n'est plus convaincant pour nous. Dans les années 90, nous avions réalisé que nous ne pouvions plus continuer avec l'Union générale des travailleurs. Auparavant, Habib Achour nous laissait une large marge de manœuvre, sans parler de la dynamique syndicale qui régnait de son temps. Même si nous n'étions pas convaincus du modèle Habib Achour, nous pouvions quand même être assez actifs.
Suite au Congrès de la Centrale syndicale organisé à Sousse en 1989, nous avions réalisé que nous ne pouvions plus opérer dans le cadre d'une organisation qui d'ores et déjà était politisée avec une forte présence de l'autorité présidentielle. Les syndicalistes étaient profondément divisés entre alliés au pouvoir, intégristes, gauchistes et indépendants.
A l'international, il y a eu la chute du Mur de Berlin, la mondialisation, l'apparition des nouvelles technologies et tout ce qui s'en est suivi. Il fallait donc mettre en place une nouvelle approche quant au travail syndical et de nouveaux concepts. La direction de l'UGTT de l'époque, avec Ismail Sahbani à sa tête, était incapable d'assurer le passage d'une époque à une autre.
Nous avons donc pris notre distance et refusé d'adhérer à cet état de fait, d'où l'idée de créer un nouveau syndicat. La création de l'Association Mohamed Ali a offert un refuge aux syndicalistes marginalisés par la direction de l'UGTT, parmi eux, il y en a qui en ont profité pour marchander leur retour au bercail.
Que reprochez-vous à l'UGTT?
Le grand problème de l'UGTT depuis qu'elle a été intégrée dans l'appareil de l'Etat, c'est qu'elle a reproduit les méthodes de gestion de l'administration, y perdant son autonomie et occultant les transformations produites au niveau de l'entreprise et de la société. Elle a également œuvré à marginaliser le rôle du syndicat dans l'entreprise. Il fallait mettre en place un modèle formé de trois acteurs, public, privé, et coopératif pourquoi pas.
Quelles sont les relations de l'UGTT avec l'UTICA?
L'UGTT n'existe pas dans le secteur privé, son pourcentage ne dépasse pas les 10%, elle est par contre très présente dans la fonction et le secteur publics. Après le Programme d'ajustement structurel (PAS), les fonds sont allés nourrir le secteur privé. On n'investissait plus dans le public, ce qui explique que la plupart des dirigeants de l'UGTT soient des retraités. Il n'y a pas de dynamique de jeunes, de femmes, de cadres, il n'y a pas de représentativité des secteurs promoteurs; et sur un tout autre volet, pas d'élections démocratiques. L'UGTT est à l'image du RCD, du parti unique. C'est une reproduction du parti et de l'Etat: le clientélisme et ce qui s'en suit.
Pour l'histoire, je me rappelle un congrès présidé par Habib Achour qui, souhaitant calmer nos ardeurs de jeunes militants, a envoyé l'un de ses apparentés crier «Habib Achour, Mada Al Hayet» (Habib Achour, pour la vie). Et lui de se lever pour dire: «Jamais, il n'y a pas “de à vie, nous refusons ces pratiques». Il s'est démarqué du PSD de l'époque. A méditer, et c'est toute la différence entre Habib Achour, Abdesslem Jrad et Ali Romdhane.
Et alors que Ben Ali voulait continuer à être président en 2014, l'UGTT voulait réviser l'article 10 qui stipule qu'au-delà de deux mandats, on n'avait pas le droit à se représenter; en fait, eux aussi voulaient «leur à vie».
Sans oublier le soutien inconditionnel de l'UGTT à Ben Ali en 2009. En 2006, le pouvoir a voulu engager avec nous des négociations pour approuver la candidature de l'ancien président. Nous avons refusé net.
Les syndicalistes qui exprimaient des avis contraires étaient-ils tolérés au niveau de la centrale syndicale?
Non. Bien sûr que non. En fait, pour mener tous seuls leur barque, les membres du bureau exécutif négocient avec des groupuscules de gauche, il leur donne des positions comme les «Patriotes démocrates», occupez-vous de la question arabo-sioniste et laissez-nous gérer la centrale à notre manière. Quand vous êtes un véritable syndicaliste, vous êtes automatiquement marginalisé.
Pour nous, la création de la CGTT marque la fin du monopole d'un seul syndicat, l'Unique, le central. Le pluralisme encourage les orientations basées sur les revendications sociales, oui, mais aussi la complémentarité entre les intérêts des travailleurs et ceux de l'entreprise.
Mais est-ce que l'existence de deux syndicats, CGTT et UGTT au sein d'une même entreprise, ne risque pas de faire monter les enchères au niveau des revendications, ce qui risque de faire du tort à l'entreprise?
Aucun risque à ce niveau, les travailleurs sont obligés de trouver les compromis nécessaires pour préserver leurs intérêts comme en Belgique, en Espagne et dans les pays scandinaves.
Grâce à la révolution, nous avons rompu avec un système despotique, nous avons, dans notre pays, des traditions de pluralisme syndical.
L'UGTT peut-elle faire l'objet d'un contrôle de la part d'organisations de la société civile ou même un audit de la part de l'Etat, après tout elle fonctionne grâce aux deniers publics et aux abonnements des affiliés?
Dans une démocratie, la transparence est de rigueur. L'UGTT doit se remettre en question, et se débarrasser d'un lourd héritage clientéliste et magouilleur ainsi que des groupuscules politiques.
Est-il normal que le représentant d'obédience gauchiste du syndicat du primaire clame haut et fort qu'il peut faire tomber le gouvernement?
La CGTT sera-t-elle différente de l'UGTT dans sa conception du syndicalisme?
Nous apportons de nouveaux concepts pour ce qui est du travail syndical dans notre pays. Nous sommes adossés à des études réalisées sur l'emploi, la politique salariale, le dialogue et la protection sociales, le chômage, l'emploi des jeunes et autres thématiques se rapportant au monde du travail. Nous sommes pour la protection et la préservation des droits des travailleurs, et dans le même temps, nous voulons être des acteurs dans la transformation sociale. Nous voulons proposer un nouveau contrat social, qui prend en considération les droits des travailleurs que la compétitivité de l'entreprise. L'UGTT a toujours marginalisé l'entreprise dans sa vision, pour nous l'entreprise est la source des richesses et des valeurs.
Les intérêts peuvent être différents, mais les compromis sont toujours possibles, nous avons toujours travaillé sur les pactes sociaux.
Autant un syndicat défend les droits des travailleurs, autant il doit être un partenaire.
Le syndicat de l'enseignement ne peut pas ne pas être consulté dans le choix des programmes et des cursus scolaires, alors que le dernier de leur souci est d'intervenir à ce niveau. Pareil pour le syndicat de la Santé.
Le syndicat est aussi un contrepouvoir, il ne peut pas faire parti du système, or depuis Bourguiba, Habib Achour était membre du Bureau politique. Abdesslem Jrad plébiscitait Ben Ali à tous les coups; après la révolution, il a commencé à décider de qui devait être ministre de celui qui ne devait pas l'être.
Ceci s'appelle une déviation quant au rôle d'un syndicat qui a un rôle social et doit avoir des revendications sociales. Il ne doit en aucun cas décider des noms des gouverneurs et des ministres.
Le pire est cette alliance dans le cadre du Conseil supérieur de la Révolution avec le Parti ouvrier tunisien (POCT) et les partis à tendances islamistes, ce n'est pas sérieux et ce ne sont pas là les positions historiques de l'UGTT.
L'UGTT a assuré un rôle catastrophique pendant la révolution, elle a fait de la surenchère, une honte.
La révolution a été faite par des milliers de jeunes diplômés chômeurs, la famille tunisienne vit pour la réussite de ses enfants et veut vivre dans la dignité. Elle n'a pas supporté l'injustice, la disparité sociale et l'iniquité ainsi que l'oppression policière. Les jeunes se sont réfugiés à l'UGTT puisqu'en face il n'y avait que le RCD. Pendant les événements de Redeyef, l'UGTT a rejeté et a dénoncé des jeunes, ils ont été emprisonnés. Le secrétaire général de l'UGTT Gafsa a une entreprise de sous-traitance et l'est resté à ce jour.
Pendant la révolution, au lieu d'encadrer les jeunes comme il se doit et sans aucune arrière-pensée, certains représentants syndicaux en ont profité pour faire de la surenchère. Sans oublier les alliances de la centrale syndicale avec le POCT et les intégristes. Monsieur Abid Briki, pour ceux qui ne le savent pas, fait partie du Mouvement patriote démocrate d'extrême gauche, c'est un pur produit bénaliste et de Sahbani. Le dernier de ses soucis est l'avenir de la Tunisie.
L'UGTT a voulu joué le jeu de la terre brûlée dans la révolution faisant fi des intérêts supérieurs du pays.
Comment appréhendez-vous votre travail syndical?
Nous voulons être une force de propositions et pas de destruction. Etre des partenaires en matière de politique et de justice sociales et défendre les principes de citoyenneté et de démocratie.
Nous voulons qu'il y ait moins de centralisation au niveau du comité exécutif et que l'organisation syndicale soit fédératrice des représentations sectorielles autonomes et indépendantes et pas des fédérations régionales, le pouvoir revient au secteur.
Prenez l'exemple de l'UGTT, son comité exécutif est élu pendant 5 ans sans aucune chance que ses réalisations soient jugées ou évaluées par quiconque. Il représente l'instance suprême. Ce que nous proposons nous, c'est que le Congrès élit une commission administrative de 5 ans, laquelle élit un bureau exécutif sous son contrôle. C'est ce qui se passait à l'époque Farhat Hached, on n'avait pas besoin d'un congrès pour révoquer un bureau incompétent ou corrompu.
Ce que nous voulons, c'est revenir aux fondements du syndicalisme moderne, nous voulons que les ¾ de nos affiliés aient moins de 40 ans et que les femmes aient un quota. Nous voulons affilier les cadres et ceux qui travaillent dans le secteur informel.
Nous voulons moraliser le syndicalisme car qui ne connaît pas les pratiques de certains décideurs au niveau de certaines représentations syndicales. Je peux vous certifier que certains reçoivent des chèques de la part de grands patrons pour ne pas encourager la création de cellules syndicales au sein de leurs entreprises ou groupes; il y aurait même des tarifs pour les préavis de grève…
La corruption a gangrené l'UGTT au même titre que les organismes de l'Etat?
Je suis choqué de voir à quel point la corruption a touché les bases syndicales au même degré que sa direction à tel point que l'on a fini par détester les syndicalistes. Les pratiques de marchandage sont devenues tellement répandues qu'aujourd'hui, une entreprise aussi importante que Tunisair est affiliée à la CGTT avec d'autres, les médecins, le transport, l'agriculture, la chimie, l'Office du Commerce et les municipalités. D'autres viendront.


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