Quelque chose bouge à Ennahdha depuis quelques semaines, notamment sous l'impulsion des tiraillements qu'y provoque comme au sein de la plupart des autres partis- le dialogue national visant à trouver une solution à la crise politique dans laquelle le pays se débat depuis l'assassinat du député Mohamed Brahmi, le 25 juillet 2013. Deux faits en particulier sont à relever et à souligner. Le premier est la nomination, vendredi 25 octobre 2013, de Zied Laadhari, membre de l'Assemblée nationale constituante (ANC) porte-parole d'Ennahdha. La propulsion de ce jeune avocat parfait trilingue arabe, français et anglais, auditeur de l'Académie de droit international près la Cour Internationale de Justice de La Haye- à ce poste témoigne de la volonté de son parti de mettre en avant des figures tant par le look en rupture avec l'image classique de l'islamiste barbu- que et surtout- par le discours. Car ses interventions tant à l'ANC que sur les plateaux de télévisions et aux micros des radios ont taillé au jeune avocat inscrit au barreau de Tunis et de Paris- membre de l'ANC, 38 ans, puisqu'il est né en 1975- l'image d'un homme politique certes attaché à son parti dont il défend les thèses mais modéré et ouvert et, ce qui, ne gâche rien, courtois- sur les autres composantes de la scène politique. Mais chez Zied Laadhari, modération et équilibre ne riment pas avec reculade. En effet, le nouveau porte-parole d'Ennahdha n'hésite pas à monter au créneau pour remettre des adversaires à leur place comme il l'a fait avec Taieb Laguili dont il a qualifié la conférence de presse du 2 octobre 2013 durant laquelle le président de l'Initiative pour la Recherche de la Vérité sur l'Assassinat de Chokri Belaid (IRVA) a fait des révélations sur les deux assassinats- de «comédie de mauvais goût», ou à accuser «certains opposants» d'avoir pour unique souci de «faire sortir Ennahdha du pouvoir» et, pour cela, de tout faire pour «entraver les tentatives de dialogue de recherche de consensus». Jebali revient devant la scène Le deuxième fait important est le retour fracassant de Hamadi Jebali sur le devant de la scène. Après sa démission de son poste de chef du gouvernement et son refus à la demande qui lui a été faite de rempiler, le secrétaire général s'est effacé de la scène locale, s'est investi à l'étranger effectivement plusieurs voyages (Royaume-Uni, Canada, Etats-Unis, etc.)- et, surtout, a pris ses distances avec son parti. A un moment donné, l'ancien chef du gouvernement a même quasiment cessé d'exercer sa fonction de secrétaire général, ce qui a alimenté les rumeurs sur une possible rupture avec la formation qu'il a cofondée et la création d'un autre parti. Puis brusquement, Hamadi Jebali est devenu plus présent dans les activités de son parti et, en particulier, on l'a vu de plus en plus fréquemment aux côtés de Rached Ghannouchi notamment lors de ses entretiens avec l'ambassadeur américain, Jacob Walles. Nous savons également que le secrétaire d'Ennahdha accompagne régulièrement son président à ses rencontres secrétes avec le président de Nidaa Tounes, Béji Caïd Essebsi. Des signes dont le sens saute aux yeux: Hamadi Jebali est de retour au bercail.