Décidemment, l'Afrique retombe toujours ou presque- dans ses travers. En effet, alors que la Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique (AGOA) commence à donner ses fruits, on se trouve dans une situation où certains pays et certains secteurs profitent mieux et plus que d'autres Ce constat a été établi le 14 septembre dernier à l'occasion d'une conférence sur l'AGOA organisée au Centre Wilson pour les universitaires internationaux dont l'objectif était d'évaluer la portée de cette loi cinq ans après sa mise en uvre ainsi que les défis qui demeurent ; une conférence à laquelle ont pris part de nombreux ministres africains, de chefs d'entreprise, d'africanistes et de spécialistes du commerce. Ainsi, pour Mme Florizelle Liser, la représentante adjointe aux négociations commerciales internationales des Etats-Unis, il est indéniable que l'AGOA a enregistré quelques succès importants, puisqu'en 2004, près de 98% des importations en provenance des pays bénéficiaires de l'AGOA sont entrées aux Etats-Unis sans droits de douane. Difficile de faire mieux en matière d'accès au marché. Mais malgré cela, sa portée n'a pas été la même dans tous les pays africains, un demi-échec dû notamment au manque de diversification des économies africaines. En théorie, l'accès au marché découlant de l'AGOA peut constituer un outil important à même de permettre d'aider les pays africains à relancer leur croissance économique et leur développement afin de juguler la pauvreté. De ce fait l'AGOA a permis, au cours des cinq dernières années, à de nombreux pays africains de réaliser d'importants avantages en matière de commerce et d'investissement, d'autant plus que les importations américaines en provenance d'Afrique subsaharienne ont augmenté de près de 44% entre 2000 et 2004, tous produits confondus (pétrole, vêtements, automobiles et autres produits agricoles transformés ). Par exemple, les exportations africaines de vêtements vers les Etats-Unis sont passées de 748 millions de dollars en 2000 à 1,7 milliard de dollars en 2004. L'année dernière, 15 pays pouvant bénéficier de l'AGOA ont exporté des vêtements vers les Etats-Unis. Or, avant l'adoption de cette loi, seuls quelques pays exportaient ce genre de marchandises vers les Etats-Unis. Selon Mme Lizer, cet accroissement du commerce s'est traduit par des centaines de millions de dollars de nouveaux investissements ainsi que la création de plusieurs dizaines de milliers de nouveaux emplois dans certains pays d'Afrique. Toutefois, si de plus en plus de pays africains bénéficient des avantages conférés par l'AGOA, on remarquera c'est seulement sur douze pays que se concentre la majeure partie des effets positifs découlant de cette loi, puisqu'à l'évidence certains pays n'ont pas de produits à proposer aux Américains. En d'autres termes, pour que l'AGOA soit bénéfique aux pays d'Afrique subsaharienne, il est indispensable qu'ils adoptent une politique de diversification de leur économie. Mais cela semble difficile, car il s'agit des pays qui, en général, exportent des matières premières qui n'entrent pas dans le cadre de cette loi. Et à moins que qu'il y ait prorogation, il ne serait pas étonnant que l'AGOA arrive à son terme sans que certains pays aient pu réaliser une seule opération commerciale avec l'Oncle Sam. Mais aujourd'hui, c'est incontestablement l'Afrique du Sud -le pays le plus industrialisé d'Afrique subsaharienne- qui tire le plus grand bénéfice du potentiel de l'AGOA, avec plus de 300 produits différents exportés aux USA. Par ailleurs, vu que les choses n'avancent comme ils l'auraient voulu, les Américains ont mis en place une aide technique aux pays africains pour qu'ils tirent le meilleur parti possible de l'AGOA mais également du commerce international. C'est dans ce cadre d'ailleurs que l'Agence des Etats-unis pour le développement international (USAID) a établi des centres de promotion du commerce dans des endroits stratégiques d'Afrique animés par des conseillers rompus aux questions touchant l'AGOA. Ceci étant, nous pensons que l'AGOA ne peut atteindre ses objectifs que s'il établissait un réel partenariat public/privé en Afrique, sinon sa portée sera toujours limitée.