Le président de l'Association de rapprochement tuniso-allemand (ARTA) et de l'Association pour le développement de la recherche et de l'innovation (ADRI) -et ex-président de l'Association des diplômés des universités allemandes (ATDUA)-, Hassan Chaari, dresse un état des lieux des relations tuniso-allemandes et analyse leurs perspectives. WMC : Le développement des relations tuniso-allemandes depuis le 14 janvier 2011 a-t-il impacté l'activité des différentes associations que vous présidez? Hassan Chaari : Si la révolution tunisienne réussissait, cela serait dû entre autres à une active société civile qui aurait joué pleinement son rôle pour asseoir un compromis politique et une gouvernance démocratique issue d'élections démocratiques, équitables et transparentes. Après le 14 janvier 2014, les Associations tunisiennes et les fondations et institutions politiques allemandes réussissent mieux à créer de nouveaux partenariats académiques et économiques. Idem, les perspectives sont encore meilleures depuis l'ouverture à Tunis, en 2013, d'un bureau régional (2ème en Afrique après celui du Caire) du Daad. Ce qui est aussi un signe de confiance et d'engagement pour un avenir commun de haute valeur ajoutée. Les deux associations l'Association de rapprochement tuniso-allemande que vous présidez, et l'Association tuniso-allemande, pilotée par Ali Bouzaien- uvrent au développement des relations tuniso-allemandes. Pourquoi le font-elles séparément? Pourquoi ne coopèrent-elles pas? Les deux associations émanent de l'ancienne Association d'amitié tuniso-allemande. Après la révolution, il y avait essentiellement l'Association de rapprochement tuniso-allemand ARTA qui s'active dans le domaine d'échange et de partenariat universitaire parmi plusieurs autres associations bilatérales dont l'activité est axée seulement sur le partenariat socio-culturel. Hélas, notre coopération avec les autres associations tuniso-allemandes est quasiment inexistante, vu les différents secteurs sur lesquels nous travaillons. On n'entend pas beaucoup parler de l'Association de rapprochement tuniso-allemande ARTA. Qu'a-t-elle fait depuis sa création? L'Association de rapprochement tuniso-allemand que je préside uvre à contribuer à mieux présenter la Tunisie aux responsables politiques, aux universitaires et chercheurs allemands. Pour ce faire, l'ARTA a représenté notre pays au colloque international sur les énergies renouvelables qui a été organisé par l'université de Berlin en 2012; elle représentera notre pays au colloque international sur les bâtiments «smart» qui s'est tenu en septembre prochain à Izmir en Turquie. En 2012, l'ARTA a organisé, avec le financement du Daad, une journée d'intégration destinée à rapprocher les nouveaux diplômés tunisiens des universités allemandes (appelés Alumni) aux entreprises allemandes et tunisiennes. Idem, en 2013, l'ARTA a contribué à la signature d'un accord de partenariat, d'échange académique et de recherche scientifique commune entre l'ENIT et l'université technique de Munich TUM (Projet Dicamp/Tempus). Pareil, l'ARTA uvre actuellement à finaliser un jumelage entre La Soukra et la ville allemande Krefeld dans la Rhénanie Westphalie. Mais, la grande fierté de l'ARTA réside surtout en la création d'une université allemande à Tunis. Depuis plusieurs années et avec le concours de l'Ordre des ingénieurs tunisiens OIT et du Prof. Ralf Reichwald, Professeur émérite des universités de Munich et de Carthage, plusieurs colloques, réunions et contacts ont été menés avec les organismes allemands concernés. Le projet vient d'avoir l'aval des deux gouvernements et sera réalisé prochainement. Cette université sera un pont efficace entre les chercheurs et les enseignants des deux pays et permettra d'avoir un référentiel et un modèle de qualité qui tirera certainement tout notre enseignement supérieur et toute notre recherche scientifique vers le haut. Dans ce même cadre, une réflexion est menée actuellement avec la contribution de notre association, ARTA, sur la création à Tunis d'une école primaire allemande. Le bon déroulement des prochaines élections législatives et présidentielle- aurait-il un quelconque impact sur les relations tuniso-allemandes? La réponse est oui, l'Allemagne mise effectivement sur des élections transparentes et réussies qui font de la Tunisie la première démocratie de la région avec qui ce grand pays compte bâtir un partenariat fort, durable et constructif. D'après une étude menée par la Chambre tuniso-allemande du commerce et de l'industrie AHK, les investisseurs allemands conditionnent l'intensification de leur engagement dans la phase après nos élections législatives par: la suppression de toute bureaucratie inutile, l'amélioration de la sécurité, la stabilisation du climat politique et social et la diminution des grèves. Que conseillerez-vous au gouvernement issu de ces élections de faire pour développer davantage les relations tuniso-allemandes? Notre pays doit profiter de l'optimisme et de l'ambition dont fait preuve actuellement l'Allemagne (sa croissance du PNB prévue pour 2014 est de l'ordre de 1,7%). L'innovation et l'optimisation deviennent les maîtres-mots de la stratégie économique allemande, et cela doit imprégner aussi nos acteurs économiques. La qualité «made in Germany» est recherchée partout même si la production est faite en Tunisie, tout simplement parce que le client est assuré de la crédibilité de ce pays. Avec l'Allemagne, il reste encore beaucoup d'opportunités qui demandent à être saisies, notamment dans le domaine de la science et de la recherche scientifique. Les projets allemands à haute valeur ajoutée conviennent à un pays comme la Tunisie qui dispose de 235.000 chômeurs diplômés de l'université. L'Allemagne est certes le 3ème partenaire économique de la Tunisie, mais au rythme des projets qui se réalisent à vue d'il, ce grand pays peut devenir, dans un avenir pas lointain, notre premier partenaire. Enfin, multiplier davantage les projets de partenariat, drainer plus d'investisseurs allemands, cloner les projets triangulaires que la Tunisie réalise en Afrique avec un financement allemand, et renforcer les contacts à tous les niveaux avec ce grand pays industriel sont de nature à aider notre pays à accéder à la 1ère division des pays émergents, comme disait si bien Joachim Hörster, chef du groupe parlementaire fédéral chargé du monde arabe, lors de l'une de ses visites récentes en Tunisie. Lire la première partie: Interview/Hassan Chaari (1) : «L'Allemagne a beaucoup misé sur une transition démocratique plus courte et moins violente en Tunisie» L'ARTA en bref : Fondée le 14 janvier 2012