Convergence stratégique en construction Par Moncef MAHROUG
Géographiquement très éloignées l'une de l'autre, la Tunisie et l'Afrique du Sud sont en train de se rapprocher, lentement mais sûrement. Enclenchée en premier sur le plan politique, ce processus s'est étendu depuis quelques années à l'économie. Profitant du séjour en Tunisie de son excellence Ali Goutali, ambassadeur de Tunisie à Pretoria, et Mohamed Bayram, représentant du Cepex en Afrique du Sud, le Centre de Promotion des Exportations a organisé lundi 21 août un «Point pays» dédié aux relations économiques tuniso-sud-africaines. Principal objectif : «vendre» l'Afrique du Sud aux opérateurs tunisiens. Un exercice que l'ambassadeur de Tunisie a réussi de manière fort convaincante. En effet, si certains avaient des doutes sur l'intérêt de s'intéresser à l'Afrique du Sud avant la démonstration, ils ne les avaient fort probablement plus après. «Nos relations avec l'Afrique du Sud sont très bonnes et nous les voulons stratégiques. Pour nous, ce pays n'est pas seulement un marché, mais aussi un partenaire stratégique avec lequel nous pouvons garantir nos intérêts en Afrique australe», affirme M.Goutali. En effet, la Tunisie veut que l'Afrique du Sud soit sa «porte» d'entrée dans cette région, c'est notamment parce que ce pays «est le seul à avoir des relations aériennes avec l'Afrique australe, à en contrôler les réseaux de distribution. De ce fait, celui qui exporte en Afrique du Sud couvre toute la région», plaide le diplomate. Encore fort modestes, les échanges commerciaux tuniso-sud africains sont en train de progresser à un rythme relativement élevé, surtout depuis 2003, mais de manière irrégulière. Ainsi, de 18,1 millions de dinars (dont 8,4 MD d'exportations tunisiennes), ces échanges ont chuté à 9,7 MD l'année suivante avant de remonter à 13 MD (dont 10,7 d'exportations sud-africaines) en 2005. La Tunisie exporte surtout des fils et câbles, des dattes et autres pâtes alimentaires, des carreaux et dalles, des produits sanitaires, des appareils d'éclairage, des articles d'habillement, etc. Elle importe essentiellement des produits chimiques, des biens d'équipement, des fils à coudre, des minerais, des éléments de construction de ponts, etc. Actuellement, les exportations tunisiennes butent contre certains obstacles, dont des droits de douanes allant jusqu'à 40% pour certains produits. Afin de surmonter ces problèmes, «nous sommes en train de négocier un accord commercial préférentiel» avec les pays d'Afrique australe, révèle l'ambassadeur Goutali. Qui précise que «l'Afrique du Sud a promis de nous aider» à y parvenir. Toutefois, les droits de douane ne sont pas le seul frein au développement des exportations tunisiennes dans la région. La distance séparant les deux pays y est également pour quelque chose. Pour surmonter cet obstacle, les deux pays sont d'abord en train d'étudier la possibilité d'établir entre eux une liaison aérienne directe. En outre, l'ambassade de Tunisie à Pretoria est en train de chercher une solution au problème du coût élevé du transport maritime, en menant des discussions avec les principaux ports sud-africains. Dans cette phase de mise en place de l'infrastructure des relations tuniso-sud-africaines, le Cepex aussi va apporter sa pierre à l'édifice. Bien que l'ouverture, il y a une dizaine d'années d'une représentation en Afrique du Sud, n'ait pas donné les résultats escomptés, le Cepex va poursuive sur sa lancée. Outre l'ouverture d'une «fenêtre» Afrique du Sud au sein de son portail, le Cepex -à défaut d'une étude stratégique dont il n'a pas actuellement les moyens-, va préparer des notes d'information sur les 5 secteurs porteurs (fils et câbles, dattes, carreaux et dalles, produits sanitaires et pâtes alimentaires) et, surtout, a promis M. Férid Tounsi, inviter les responsables des centrales d'achat sud-africaines en Tunisie au cours de l'année prochaine. Cependant, le commerce n'est pas la seule préoccupation de l'ambassade de Tunisie à Pretoria. «Nous étudions les possibilités de partenariat. L'Afrique du Sud a de très grandes entreprises de taille mondiale avec lesquelles les entreprises tunisiennes peuvent travailler en sous-traitance ou en co-traitance, notamment dans le cadre de projets de reconstruction de certains pays africains», souligne M.Goutali. Mais il y a également des possibilités dans les pays d'Afrique francophone où les entreprises sud-africaines ont du mal à évoluer en raison de problèmes linguistiques et culturels. Et pour soutenir tout cela, les deux pays ont déjà créé des associations d'hommes d'affaires, dont un Conseil d'affaires qui devrait tenir sa première réunion à Tunis en octobre prochain.