Je pense que Mme Maryam OMAR fait une grave confusion, ou tente un amalgame, entre formation professionnelle et école de métiers, à moins qu'elle ne soit elle-même victime de cette confusion. La consultation concerne, si on se réfère aux comptes rendus des conseils ministériels, la formation professionnelle. Laquelle formation professionnelle a pour mission de préparer le personnel qualifié dont a besoin l'économie et qui bénéficie depuis le changement d'une attention particulière et d'un suivi continu. La stratégie de mise à niveau de l'économie tunisienne a commencé, faut-il le rappeler, dès 1997 par un Programme de mise à niveau de la formation professionnelle MANFORME. Grâce à ce programme, la formation professionnelle a maintenant un nouveau visage. Aujourd'hui la majorité des centres de formation professionnelle fonctionne en partenariat avec les branches professionnelles, disposent d'outils d'ingénierie pédagogique qui leur permettent d'adapter leur formation aux besoins de l'économie, pratiquent une formation en alternance avec les entreprises qui permet aux diplômés une insertion rapide. Ces centres se sont engagés dans la démarche qualité et certains sont en phase de certification ISO 9000. Ce renouveau de la formation professionnelle a contribué au développement des investissements directs étrangers en Tunisie, notamment dans l'industrie électrique et électronique, les investisseurs européens trouvent aujourd'hui en Tunisie des centres de formation qui fonctionnent selon les standards européens. Ce renouveau est également à l'origine de la bonne insertion des diplômés de la formation professionnelle. Aujourd'hui, en Tunisie, il n'y a plus de problème grave de chômage pour cette catégorie de jeunes alors que celui des diplômés de l'enseignement supérieur est un problème d'actualité. Rappelons qu'il y a 20 ans, le problème était l'insertion des diplômés de l'enseignement professionnel et de l'enseignement technique dont le taux de chômage atteignait 60% ! Le premier programme d'emploi des jeunes a été créé au début des années 80 pour tenter de résoudre ce problème, en vain. Il a fallu attendre le changement pour que le problème soit traité au fond. L'enseignement professionnel a été supprimé en 1989 et l'enseignement technique l'a suivi en 1991. La mission de formation professionnelle a été confiée au nouveau ministère de la Formation professionnelle et de l'Emploi, créé en 1990. Les lois de 1991 (réforme du système éducatif), de 1993 (loi d'orientation de la formation professionnelle) et de 2002 (réforme du système éducatif) ont redéfini les missions de l'éducation et celles de la formation, placé la formation dans la logique économique et lui ont donné des outils de pilotage par les besoins des entreprises en compétences. Le programme présidentiel, 'la Tunisie de demain'', a confirmé cette orientation et a fixé à la formation professionnelle un objectif à atteindre avant 2009, encore plus ambitieux en termes de performance, de qualité et de partenariats pour coller au plus près des besoins de l'économie tunisienne, engagée dans le nouveau contexte de l'économie basée sur le savoir. Au cours du Conseil des ministres du 11 octobre 2006, le président de la République "a recommandé de poursuivre la consolidation et le développement de la formation professionnelle... de manière à ce que ce système soit en harmonie avec les besoins du marché du travail, ainsi qu'avec les plans et les programmes économiques et de développements futurs". La consultation nationale en question concerne la formation professionnelle et a en principe pour objet de faire le point sur la mise en uvre, à mi-parcours, du programme présidentiel 2004-2009. Quant aux écoles des métiers, ce sont des structures de rattrapage éducatif pour des jeunes en difficulté scolaire au niveau de l'enseignement de base. Ces structures ont été créées en 1995, sous la dénomination «Ecoles de qualification technique» en tant que solution temporaire à l'abandon scolaire précoce en attendant que la réforme de l'enseignement de base, engagé en 1991, ne résolve ce problème. La dénomination a par la suite changé pour devenir «Ecole de métiers» sans changement d'objectif. Le terme «métiers» utilisé n'ayant pas une signification rigoureuse puisqu'il n'y a eu aucune coordination avec les professionnels pour choisir les métiers et encore moins pour en définir les exigences. Le caractère provisoire des ces écoles a été confirmé par la loi d'orientation de l'éducation de 2002 qui ne les mentionne même pas. L'article 29 de cette loi a listé tous les types d'établissements scolaires (établissements préscolaires, écoles primaires, collèges, lycées, lycées pilotes, écoles virtuelles) sans évoquer l'existence des écoles de métiers. Les jeunes qui fréquentent ces structures et dont le nombre devrait se réduire au vu des efforts engagés pour améliorer la qualité de l'enseignement de base, constituent une catégorie minoritaire de jeunes qui n'ont pas encore acquis les compétences générales de base, objet de l'enseignement obligatoire, et qui ont le droit en tant que citoyen à un accompagnement particulier pour l'acquisition de ces compétences, nécessaires à tout citoyen d'un pays développé. Mais ce rattrapage ne doit pas être confondu avec la préparation de ressources humaines de qualité pour des entreprises placées dans un contexte de compétition internationale. Il s'agit de deux problématiques totalement différentes et qui font appel à des approches différentes et à des solutions tout à fait distinctes. Tout amalgame entre formation professionnelle et école de métiers serait désastreux pour le futur de l'économie tunisienne. Malheureusement, ce n'est pas la première fois que cet amalgame est tenté. Déjà en 2000, l'UTICA a dû faire une mise au point sur cette question dans une note intitulée «Le système éducatif et l'entreprise : Approfondissement de la réforme du système éducatif pour une priorité emploi» et présentée aux journées d'études du RCD. Heureusement pour la Tunisie, les choix politiques sont clairs et le pilotage de la mise en uvre des ces politiques est clairvoyant. Abdelaziz HALLEB, Président de la Chambre Syndicale Nationale de l'Industrie Electronique, Vice-Président de la Fédération Nationale de l'Electricité et de l'Electronique de l'UTICA, chargé de la formation.
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