« Cela ne devrait pas inspirer de crainte, mais elles devraient faire plus attention ». C'est la conclusion qu'on pourrait tirer de l'état du secteur bancaire, tel qu'il aurait été établit lors de la dernière réunion du gouverneur de la BCT avec les PDG des banques Tunisiennes. M. Mohamed Daouas, gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, a présidé vendredi 26 décembre 2003, selon le communiqué de la BCT, la quatrième réunion périodique pour l'année 2003 avec les premiers responsables des établissements de crédit. La réunion, qui aurait duré un peu plus d'une heure, a passé en revue l'Etat d'avancement du programme de transformation des banques de développement en banques universelles, en les exhortant à accélérer le rythme de réalisation de ce programme et à veiller au développement de leurs activités tout en préservant leur capacité de financement de l'investissement. Il semblerait, à ce propos, que deux banques de développement seulement ont réalisé un semblant de pas en avant. La BTQI et la BTEI, en attendant l'accord du ministère des finances, ont réalisés la phase d'assainissement financier et leurs conseils d'administrations respectifs ont pu procéder aux changements de leurs statuts. Le Qatar et les Emirats Arabes Unis, ayant déjà donné leurs accords, d'autant que la parade évitant le recours à la chambre des députés aurait été trouvée. Concours en baisse ... Abordant l'activité des banques de dépôts, le gouverneur a souligné l'amélioration notable dans la mobilisation des ressources qui ont connu une progression de 6,2% à fin novembre 2003 contre 3,8% pour la même période de 2002, incitant ces banques à déployer plus d'effort dans le financement de l'activité économique de manière à contribuer à l'amélioration des prestations de tous les secteurs. Il est à noter que les concours à l'économie, du système bancaire, n'ont augmenté en 2003 que de 4,6% contre 5,7% en 2002. Selon des sources bancaires, les causes de cette diminution seraient à chercher dans la baisse, en 2003, de 0,5% des investissements industriels. Abordant les préoccupations du secteur, le gouverneur a exhorté les banques à soutenir davantage l'entreprise et à l'encadrer notamment par une meilleure adaptation des formes des concours avec la nature de ses besoins afin de préserver son équilibre financier et le renforcement de sa compétitivité. Là, nous assure-t-on, le message concerne un meilleur ciblage des crédits des entreprises qui reçoivent les crédits et du choix du type de crédit à accorder à ces entreprises. Il n'est pas inutile de rappeler ici, cette remarque faite par l'agence de notation Maghreb Rating, à propos de la BIAT, l'une sinon la plus importante banque privée de la place (15% en collecte de dépôt et 20% en financement du commerce extérieur), évoquant une « rentabilité qui a décliné en 2002, sous l'effet d'un environnement économique défavorable et d'engagements importants pris sur de grandes entreprises connaissant des difficultés ». Et Maghreb Rating d'ajouter que « l'octroi de crédits aux actionnaires et autres parties liées, n'est pas rare. Ainsi, les engagements sur l'un de ses plus importants actionnaires sont parmi les plus élevés et excèdent les limites prudentielles ». L'exemple est-il exclusif ? Crédits accrochés à la hausse ! S'agissant de la situation financière du secteur bancaire, le gouverneur a recommandé aux établissements de crédits d'accorder la priorité au renforcement de leurs assises financières à travers, d'une part, l'augmentation de leurs provisions de manière à accroître le taux de couverture des risques. Notre source nous précise, à ce propos, que le montant des insuffisances de provision du secteur bancaire tunisien aurait atteint les 340 MDT. En face, les créances accrochées, représenteraient en 2003, quelque 22,8% du total des engagements bancaires, contre 20% en 2002. Pour la première banque publique, STB, les créances classées représenteraient, à fin juin 2003, 38% du total des engagements accordés couverts, par des provisions, à hauteur de 45%. La STB, affirme être confiante dans leurs valeurs; un avis que l'agence de notation ne partage pas et explique que « compte tenu des graves difficultés du secteur touristique (50% du portefeuille crédit), la valeur effective de réalisation de ces garanties pourrait ne pas être à la hauteur des prévisions » ! Pour la BIAT, c'est le management lui-même qui considère que « la couverture de ces risques par les provisions, qui s'établit à 39%, est encore insuffisante dans la mesure où les garanties adossées à ces engagements sont souvent surévaluées ». Il aurait été en plus question, au cours de cette réunion des banquiers avec le gouverneur, d'être plus regardant au niveau des dividendes à distribuer aux actionnaires, tant que ces crédits n'ont pas été totalement provisionnés. Le gouverneur a d'autre part recommandé la consolidation des fonds propres pour les adapter à l'évolution du niveau d'activité des banques et la consolidation de leurs efforts en matière de recouvrement des créances -17% cette année encore Le gouverneur Mohamed Daouas a aussi insisté sur la nécessité pour les établissements de crédit de veiller à l'amélioration de leurs indicateurs d'exploitation, et ce, par l'accroissement du volume de leurs activités. Les banques tunisiennes termineraient l'année 2003, avec une baisse de 17% du produit net bancaire. A en croire les dernières notations, non sollicitées, faites par Maghreb Rating à un certain nombre de banques de la place, la STB qui est l'une des plus importantes, sinon la plus importante institution financière publique (16% de part de marché en dépôt et 17% en crédits), souffrirait d'« importantes faiblesses structurelles, d'une faible qualité des actifs, d'une érosion de la marge d'intérêt ». Le gouverneur de la BCT a aussi insisté auprès des premiers responsables des banques, sur l'amélioration de leurs ressources. Selon nos sources, le recours de certaines banques à l'achat d'excédents de liquidités de certaines institutions publiques à des taux dépassant le TMM, aurait contribué, pour certaines banques, à augmenter de 0,2% les coûts des ressources et à diminuer leurs marges. Faut-il rappeler, que le volume moyen du refinancement des banques auprès de la Banque Centrale est passé, selon les derniers chiffres de la BCt lors de la réunion de son conseil d'administration, de 332 MDT en novembre à 425 MDT en décembre 2003. La liquidité bancaire ou la trésorerie des banques a ainsi connu un resserrement de 93 MDT. C'est derrière ce phénomène, selon certains analystes, que se cachent les causes des pratiques bancaires citées plus haut. La question aurait été évoquée avec une certaine préoccupation de la part de l'autorité financière.