Retour sur une première en Afrique: une structure de concertation pour la gestion de ressources en eau souterraines transfrontalières entre la Tunisie, l'Algérie et la Libye. Les responsables des institutions en charge de la gestion de l'eau en Algérie, Libye et Tunisie, ont approuvé, début juin 2008, le programme d'activités du mécanisme de concertation du Système Aquifère du Sahara Septentrional (SASS), un bassin d'eau souterraine transfrontalier, partagé par les trois pays. Entièrement dédié à la gestion concertée de ces ressources en eau souterraines partagées, ce mécanisme constitue une première en Afrique. Au niveau régional, son entrée en fonction officielle le 1er juin 2008 ouvre un nouveau chapitre dans la coopération algéro-libyo-tunisienne dans le domaine de la gestion des ressources naturelles partagées. Développé sous l'impulsion de l'Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS), le mécanisme de concertation vient couronner la démarche que l'Observatoire a menée depuis le début du projet SASS en 1999. Cette démarche s'appuie sur l'amélioration de la connaissance commune du bassin partagé comme préalable à une action concertée entre les pays riverains. La connaissance de la ressource recouvre deux aspects fondamentaux : les caractéristiques hydrauliques du bassin et la caractérisation des risques. Le SASS est en effet sujet à de nombreux risques liés à la surexploitation (les prélèvements ont dépassé la recharge au début des années 1980) et à la dégradation de la qualité de l'eau (due notamment à la salinisation). Le SASS renferme des ressources colossales estimées à 30.000 milliards de m3 et s'étend sur une surface totale de près de 1 million de km2 dont 700.000 se trouvent en Algérie, 80.000 en Tunisie, et 250.000 en Libye. Gisant sous une région saharienne aride, cet aquifère revêt une importance stratégique pour le développement dans une région qui abritera à l'horizon 2030 près de 8 millions d'habitants. Peu affecté par la variabilité et les changements climatiques, le SASS jouera dans les années à venir un rôle déterminant dans l'adaptation à la mutation du climat qui, selon le dernier rapport en date du Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat (GIEC), entrainera des sécheresses plus fréquentes et plus prononcées, lourdes de conséquences pour l'économie et le mode de vie sahariens. Conformément à la démarche de l'OSS, l'amélioration de la connaissance collective du SASS, notamment par le développement et l'appropriation d'outils communs (en l'occurrence une base de données et un modèle de simulation communs et opérationnels dans les trois pays), a conduit à l'émergence et au renforcement de la «conscience de bassin». Cette prise de conscience collective a progressivement forgé la confiance mutuelle entre les équipes techniques, la conviction que l'action commune augmente l'efficacité des solutions et la certitude que l'échange d'informations est devenu non seulement possible mais également nécessaire. A cet égard, la bonne volonté des autorités de l'eau algérienne, libyenne et tunisienne pour la communication des informations a été exemplaire. L'approbation officielle de la structure de concertation technique, noyau dur du mécanisme de concertation actuel, est intervenue lors d'une réunion tenue en décembre 2002 sous les auspices de l'OSS.
Ainsi, conformément à la vision de l'OSS et grâce à l'appui des partenaires de coopération (FEM/PNUE, FFEM, DDC-Suisse, FAO, IFAD, FAE, GTZ), la concertation tripartite est passée du niveau technique au niveau politique. Le mécanisme de concertation permanent, dont le financement est assuré de façon égalitaire par les trois pays, a été provisoirement accueilli au sein de l'OSS. Son entrée en fonction effective conforte et confirme la justesse de la démarche que l'OSS a entreprise de concert avec les pays. La Tunisie assume actuellement un mandat de deux ans à la tête du mécanisme en la personne de M. Rachid Khanfir. Le programme du mécanisme comporte plusieurs activités scientifiques et techniques conjointes, dont principalement l'actualisation de la base de donnée, la mise en en place du réseau de suivi des nappes aquifères et la définition des protocoles d'échange de données entre les trois pays. Le mécanisme de concertation du SASS est un grand acquis pour les pays concernés qui y retrouvent le fruit de leur volonté commune de faire de l'eau saharienne un vecteur de coopération et un facteur de développement et de bien être des populations de la région. Il s'agit également d'un grand acquis pour l'Afrique car l'OSS entend capitaliser les résultats et les expériences du SASS en vue de les étendre à d'autres grands aquifères au continent, notamment en Afrique de l'Ouest et de l'Est. (Pour plus d'informations, e-mail : [email protected]; ou [email protected] - URL : www.oss-online.org;
* Liste des acronymes DDC-Suisse : Direction du Développement et de la Coopération de la Confédération Suisse FAE : Facilité Africaine de l'Eau FAO : Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture FEM/PNUE : Fonds pour l'Environnement Mondial/ Programme des Nations Unies pour l'Environnement FFEM : Fonds Français pour l'Environnement Mondial IFAD: International Fund for Agricultural Development GTZ: Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit (Coopération Allemande).