Le «congé pour la création d'entreprise» ne semble pas trouver écho auprès des fonctionnaires, principale catégorie ciblée. Sur un effectif de 450.000 fonctionnaires concernés par ce mécanisme, seuls 68 en ont bénéficié, durant les trois dernières années : 29 en 2008, 28 en 2007 et 11 en 2006. Ils seraient au total 145 à avoir manifesté de l'intérêt pour ce congé, depuis sa mise en place, au mois de juillet 2003. Ce type de congé, dédié aux fonctionnaires et agents du secteur public, peut être accordé aux titulaires d'entre eux, pour une durée maximale d'une année renouvelable une seule fois. Durant la période du congé, le fonctionnaire continue de bénéficier de la couverture sociale. Dans le cas où l'entreprise est créée dans les zones de développement régional, le fonctionnaire continue de bénéficier de la couverture sociale et d'un demi-traitement. Ce même congé peut être accordé, également, à des fins de sauvetage des entreprises en difficultés économiques. Autres incitations instituées en faveur des fonctionnaires, ces derniers bénéficient d'une formation et d'un encadrement dans les domaines de la gestion de l'entreprise, des lois et structures régionales, des centres d'affaires, des pépinières d'entreprises. La manifestation «les mercredis de l'entreprise», rendez-vous mensuel de vulgarisation des mécanismes de création d'entreprises, constitue une autre opportunité pour garantir au promoteur une formation assurée par «des experts opérant dans tous les domaines et dans toutes les régions du pays». En dépit de ces incitations significatives, les fonctionnaires, lotis de la sinécure d'un salaire-rente garanti, sont, hélas, peu enclins à prendre des risques, fussent-ils calculés ! Car le fonctionnaire-promoteur du projet a la possibilité en cas d'échec du projet ou d'apparition de quelques difficultés, peut légalement retrouver son poste-planque dans l'administration. Les chiffres sont édifiants. Il ressort de statistiques fournies par le ministère de l'industrie, que les fonctionnaires, bénéficiaires, jusqu'ici -c'est-à-dire depuis 2003-, ont réalisé 110 projets dont 12 selon la technique de l'essaimage (huit à la charge de la STEG et quatre relevant de l'Office National de l'assainissement (ONAS). Le reste est lancé dans les secteurs des services (bureau d'études et de conseil), de l'environnement, de l'agriculture (exploitations agricoles) et de l'industrie (industries alimentaires et de transformation, textile, industries électroniques)... Connaissant parfaitement les confectionneurs des statistiques en Tunisie, il s'agirait de microprojets, voire de minuscules ateliers familiaux. Conséquence : ce mécanisme reste presque au stade de l'effet d'annonce. Un regard d'ensemble sur ces résultats peu significatifs suscitent, effectivement, plusieurs légitimes interrogations. Premièrement, après cinq longues années après l'entrée en vigueur de ce mécanisme, les autorités en charge de sa gestion auraient pu, au moins, en évaluer et l'efficience et le rendement. Deuxièmement, ce mécanisme aurait pu gagner en efficacité et connaître plus de succès si jamais il était étendu aux agents opérant dans le secteur privé et si jamais des incitations fiscales et financières non restrictives au secteur public étaient instituées en sa faveur dans l'absolu. Troisièmement, le pilotage de ce mécanisme par le seul ministère de l'Industrie, de l'Energie et des PME est un peu bizarre car la fonction publique est du ressort de plusieurs départements (collectivités locales, administration, entreprises et établissements publics, centres techniques, universités, entreprises de presse publiques et autres .). C'est pour dire que la marge de manuvre est grande et transcende le champ étroit du ministère de l'Industrie d'autant plus que nous sommes encore loin de l'objectif national, celui de créer 14.000 entreprises par an d'ici 2009. A méditer.