Pour la première fois, deux produits de haute technologie, aussi emblématiques que le téléphone portable et la voiture ont mis en avant leur tunisianité. Certains ne craignent donc pas de s'afficher en tant que Tunisiens. Alors que de (trop) nombreux industriels préfèrent encore adopter des noms qui s'inspirent ouvertement de prédécesseurs étrangers bien installés. Quelques voix se sont pourtant élevées, notamment dans des forums sur le Net, pour dénoncer la véracité de l'étiquette. Le recours à des sous-traitants et l'utilisation de pièces étrangères sont ainsi dénoncés par des internautes désabusés, remettant en cause l'origine «réelle» de ces produits. C'est oublier que la plupart des industriels européens ont recours à la main-d'uvre et aux pièces asiatiques, pour des raisons de coûts de production. Des marques allemandes, néerlandaises, et même japonaises, servent ainsi de paravent aux petites mains chinoises ou thaïlandaises. Au final, la nationalité du produit est pourtant toujours celle du donneur d'ordre, celle du concepteur. Qui irait clamer qu'une marque aussi réputée que «Nike», par exemple, est indonésienne ? Toujours est-il que des entrepreneurs tunisiens qui affichent aussi clairement leur nationalité est une première. Un exemple que nous espérons voir suivi. De quoi inspirer d'autres filières, pourtant a priori moins exposées au «délit de sale gueule», comme celles de l'agroalimentaire. L'huile tunisienne étant un cas d'école, puisqu'elle a été longtemps vendue en vrac, pour être mélangée à ses homologues italiennes et autres. A signaler toutefois le réflexe salutaire des responsables du secteur. Le précieux liquide affichera dorénavant ces vraies couleurs, et bénéficiera d'un meilleur conditionnement. La même remarque vaut pourtant pour d'autres produits, comme le marbre, par exemple. Le nôtre est trop souvent dévalorisé au profit de celui de carrare. Italien, encore une fois. Alors que les particularités et l'originalité de ce produit de nos carrières sont appréciées même du côté de Las Vegas, dans les temples du tourisme à l'américaine. C'est dire que ces fleurons de la technologie moderne auraient pu, eux aussi, choisir le camouflage Par crainte du camouflet du marché local et de consommateurs trop sensibles aux sirènes de l'étranger. Parce que l'autodénigrement d'une bonne frange de nos élites et d'une bonne partie de la population est presque devenu un sport national. A tel point qu'il n'est pas rare que des étrangers en général, et des Européens en particulier, en profitent allégrement. Même pour des véhicules d'occasion, des petits malins annoncent tout de suite la couleur, précisant que le propriétaire est français. Comme si sa conduite pouvait être à ce point différente, comme s'il ne roulait pas sur les mêmes routes. En temps de crise, de morosité internationale, les exemples de cette voiture 100% tunisienne, et de ce téléphone portable qui défend crânement nos couleurs, nous font chaud au cur. Mieux : au-delà même des qualités intrinsèques de ces produits, le fait qu'ils portent haut les valeurs nationales est en soi une grande avancée. Reste à espérer que cette initiative, paradoxalement courageuse, fasse des émules.