Fin du suspense, après des jours de tergiversations, ce sera Hichem Mechichi qui formera le nouveau gouvernement tunisien. Mechichi vient d'être désigné par le chef de l'Etat Kaïs Saïed pour succéder à Elyes Fakhfakh. Il devra ainsi, dans un délai d'un mois former le nouveau gouvernement pour conduire la période à venir qui s'annonce hasardeuse face à une crise économique et une instabilité politique des plus préoccupantes.
Elyes Fakhfakh a présenté sa démission le 15 juillet 2020. Un départ qui n'a surpris personne mais qui place le pays dans une situation peu enviable notamment face à la crise économique aggravée par la pandémie Covid-19. Une affaire de conflits d'intérêts a eu raison du chef du gouvernement initialement choisi par Kaïs Saïed. En l'absence d'une motion de censure le destituant, la balle a de nouveau été dans le camp de Kaïs Saïed, conformément à l'article 89 de la Constitution. Le chef de l'Etat a décidé aujourd'hui, samedi 25 juillet 2020, de choisir Hichem Mechichi pour lui succéder au poste.
Qui est Hichem Mechichi ? Hichem Mechichi a été nommé ministre de l'Intérieur dans le gouvernement d'Elyes Fakhfakh. C'est un énarque diplômé en sciences politiques en 2007. Il a occupé en 2014 le poste de chef de cabinet au ministère du Transport, puis le même poste successivement aux ministères des Affaires sociales et de la Santé. Auparavant, il était directeur général de l'Agence Nationale du Contrôle Sanitaire et Environnemental des Produits (ANCSEP). Il a été nommé par le chef de l'Etat Kaïs Saïed, premier conseiller à la présidence de la République en charge des affaires juridiques, le 11 février 2020.
Ainsi, d'un point de vue politique, Kaïs Saïed n'a pas fait le « choix de la raison », en décidant de nommer un candidat consensuel réunissant un large soutien politique et faisant partie des noms proposés par les partis majoritaires au Parlement. Il a plutôt préféré une personnalité indépendante et en laquelle il a confiance. Un choix qui pourra se heurter au refus des blocs parlementaires de la majorité. En effet, Fadhel Abdelkefi et Khayem Turki étaient les deux personnalités qui ont été proposées par la majorité des blocs parlementaires. Tous les deux ont figuré sur les listes d'Ennahdha, Qalb Tounes et Al Badil.
Le président de la République, Kaïs Saïed avait envoyé une correspondance aux partis, coalitions et blocs parlementaires pour soumettre, au plus tard jeudi 23 juillet 2020, les noms des candidats qu'ils soutiennent à la Primature. Le parti destourien libre (PDL) de Abir Moussi et Al Karama de Seif Eddine Makhlouf avaient refusé de présenter des candidats à ce poste. Le premier se disant « non concerné par le processus de désignation du chef du gouvernement » et le deuxième ripostant contre « la désignation effectuée par Kaïs Saïed qui avait déjà montré ses limites avec Elyes Fakhfakh ».
Après la situation fragile dans laquelle a été placé Elyes Fakhfakh, sans grand soutien politique, mais aussi celle de Habib Jamli, qui a été rejeté par le Parlement, le chef de l'Etat prend le risque de nommer une personnalité qui n'a pas été proposée par les partis politiques, laissant ainsi se profiler le scénario de dissolution du Parlement et d'élections législatives anticipées.
Maintenant que le nom du nouveau chef de gouvernement est fixé, reste à savoir qui nommera-t-il dans son équipe et quels noms décidera-t-il de placer dans les ministères sensibles et de souveraineté ? Un gouvernement qui devra être soumis à l'approbation du Parlement et réunir le sésame de 109 voix au minimum pour passer. Réussira-t-il ce test ? On en saura plus dans les jours à venir. Pas de vacances pour la scène politique en 2020…