Il était temps ! Pendant des années, les banques avaient des garanties lorsqu'elles accordaient des crédits mais les clients n'avaient aucune garantie de récupérer leur argent en cas de défaillance de leur établissement bancaire. Protéger les déposants et le système bancaire dans son ensemble est le principal objectif du Fonds de garantie des dépôts bancaires qui a démarré ses activités en janvier 2018. Le Fonds de garantie des dépôts bancaires (FGDB) est un établissement public d'intérêt général créé en vertu de l'article 149 de la loi n° 2016-48 du 11 juillet 2016 relative aux banques et aux établissements financiers, au capital de cinq millions de dinars totalement libéré et souscrit à parts égales par l'Etat tunisien et la Banque centrale de Tunisie. La mission de l'établissement est de protéger les déposants, les indemniser en cas d'indisponibilité de leurs dépôts et contribuer à la stabilité du système financier tunisien en intervenant dans le plan de résolution d'une banque adhérente en situation compromise sous différents mécanismes conformément à l'article 149 de ladite loi. Son objectif fondamental est d'avoir en permanence une disponibilité et une capacité financière et opérationnelle lui permettant d'assumer son rôle dans l'indemnisation des déposants et la contribution, le cas échéant, dans le plan de résolution d'une banque adhérente en situation compromise.
Les 29 banques agréées en Tunisie, y compris les trois banques islamiques et les six banques non-résidentes, y ont adhéré, obligées par la force de la loi, et s'acquittent de leurs cotisations : une cotisation annuelle fixée par décret gouvernemental à hauteur de 0,3% de leur encours de dépôts arrêté à la fin de l'exercice comptable précédent. Ceci dit, le comité de surveillance du fonds (composé de cinq membres : deux membres indépendants, deux membres représentent les actionnaires et un membre en sa qualité de juge de troisième grade, ndlr) peut après consultation de la BCT, modifier le taux et la base de calcul de la cotisation annuelle des banques et cela sur la base du profil de risque de chaque banque adhérente. Il peut aussi imposer aux banques, toujours après consultation de l'autorité monétaire, une cotisation exceptionnelle dont le montant maximal ne peut dépasser le total des cotisations payées par chaque banque au titre de quatre années de cotisation.
Le FGDB indemnise les déposants couverts par la garantie des dépôts dans la limite d'un plafond de 60.000 dinars (ou sa contrevaleur en devises convertibles sur la base du cours de change appliqué à la date de la publication de la décision d'indemnisation, ndlr) par déposant pour le solde de l'ensemble de ses comptes par banque. Il est tenu de le faire dans un délai de 20 jours ouvrables. «Si quelqu'un a plus que 60.000 dinars de solde créditeur il attendra que le liquidateur de la faillite vient lui compléter son dû», a précisé le directeur général du fonds Jaafar Khatteche en réponse à une interrogation de Business News lors d'une réception tenue en l'honneur des banques adhérentes du fonds ce jeudi 6 août 2020. La garantie du FGDB est automatique et ne nécessite aucune demande de la part des déposants pour en bénéficier. Elle est également gratuite pour les déposants. Ainsi, si une banque membre est déclarée par la BCT en cessation de payement, le fonds a la charge de contacter, d'informer les déposants et de les indemniser dans les délais réglementaires.
S'agissant de la deuxième mission du fonds à savoir le sauvetage de banques en difficulté, le DG a expliqué à Business News qu'il y a un arbitrage à faire. «Nous pouvons opérer en participant à la restructuration de la banque ou en reprenant une partie de son capital, sous réserve que ceci ne coûte pas plus cher que l'indemnisation, puis de sortir après assainissement total», a-t-il souligné.
Durant deux années d'activité, le management a œuvré à l'accomplissement des formalités administratives de constitution et à la mise en place des structures fonctionnelles nécessaires pour assurer le démarrage effectif de l'activité du FGDB. Il l'a doté d'un noyau de ressources humaines aux compétences confirmées et lancé des ouvrages nécessaires pour le développement et la mise en œuvre d'un système d'information fiable, performant et sécurisé, permettant une meilleure gestion de ses ressources et facilitant l'implémentation d'un processus d'indemnisation implacable.
M. Khatteche a spécifié que les dépôts bancaires des 29 banques adhérentes ont dépassé les 70,2 milliards de dinars fin 2019, que le tarif d'adhésion est fixé à 1,2 million de dinars, les cotisations ont atteint les 393 millions de dinars et les revenus des investissements 36,8 millions de dinars. Les taxes ont atteint 112 millions de dinars. Pour sa part, le gouverneur de la BCT Marouane Abassi a milité, dans ce même cadre, pour exonérer les cotisations de taxation. «Le but ultime de ce fonds est de gérer le risque et de pouvoir encourager les gens à déposer leur argents dans le système bancaire. En période de crise les gens peuvent penser que la banque est en défaut de paiement et garder leur argent tésorisé. (…) Le fonds est fiscalisé et coûte cher au système bancaire, il serait plus opportun de mettre cet argent-là dans le fonds pour qu'il puisse mieux fonctionner», a-t-il soutenu en réponse à une question de Business News.
Le Fonds de garantie des dépôts bancaires continue son évolution. D'autres chantiers restent à faire. Parmi eux, Jaafar Khatteche a indiqué : «Le fonds est appelé à mettre en place les mécanismes pour évaluer et fixer le taux qu'il faudra appliquer à chaque établissement bancaire à part selon les risques précisés dans leurs états financiers, ce qui permettra la création d'un climat positif de compétitivité entre les établissements bancaires, pour qu'ils payent la plus basse cotisation, qui drainera à son tour plus de déposants impactant de ce fait positivement les résultats des meilleures banques en termes de gestion de risques».
La mise en place du Fonds de garantie des dépôts bancaires s'est faite attendre. Mais après deux années d'effort, il est opérationnel. Dorénavant, les déposants ont la garantie de récupérer au moins une partie de leur mise et de ne pas tout perdre, si leur banque fait défaut. Une mini révolution.