L'ancien président du directoire d'Amen Bank et actuel membre du bureau exécutif de l'IACE, Ahmed El Kram, est revenu, dans une interview accordé à Zina Zidi sur Shems FM sur la situation du pays et les pistes de sortie de crise. Ainsi, M. El Kram a affirmé que le gel du parlement n'est pas une chose exceptionnelle, que c'est arrivé dans le monde et que c'était une étape importante pour changer la situation en Tunisie. Et de soutenir que le régime politique est démocratique mais n'est pas efficient et les élus n'ont pas aidé à le faire, en appelant à un retour à un régime présidentiel, qui permettra de garantir l'efficience demandée, le tout sous la surveillance étroite du parlement. « Notre crise est essentiellement politique ! Si les politiques entreprises étaient claires et les décisions prises rapidement, le travail serait fait convenablement et la Tunisie en aurait bénéficié », a-t-il soutenu. Et de souligner qu'il faut réinstaurer la confiance entre les citoyens et l'Etat, chose qui ne peut se faire que si on retrouve les bases d'un Etat fort, ayant son prestige, qui applique la loi sans intervention et avec des responsables compétents. En outre, il a souligné également la nécessité de nommer rapidement un chef du gouvernement : un bon gérant, capable de comprendre la situation économique et sociale, et qui a l'audace et le courage de prendre des mesures impopulaires mais nécessaires pour sauver le pays. Dans ce cadre, il a indiqué que beaucoup de noms sont proposés pour la présidence du gouvernement, la Tunisie étant un vivier de compétences qui peut participer à sauver la situation et d'espérer que le nom retenu par le président de la République sera le meilleur. « Je n'ai pas de noms spécifiques mais je recommande que le prochain chef du gouvernement ait des compétences économiques, qu'il soit courageux, visionnaire, moderne et apte à entreprendre des politiques de rupture et surtout qu'il soit en phase avec les jeunes, les nouvelles technologies et les changements mondiaux actuels », a-t-il spécifié.
Et d'estimer que le prochain gouvernement aura cinq priorités : * L'instauration d'un Etat fort avec une application ferme de la loi et en donnant les responsabilités aux compétences * Le traitement du problème sanitaire notamment en intensifiant la vaccination pour atteindre 5 millions de vaccinés fin octobre et sept millions de Tunisiens fin décembre 2021 * L'amendement de la Constitution, via un référendum : l'objectif est de se diriger vers un régime présidentiel. En parallèle, il faudra réviser la Loi électorale, pour permettre l'émergence de partis capables de gérer le pays * La nomination rapide d'un chef de gouvernement * La mise en place d'un programme, qui permettra de prendre les mesures nécessaires pour le sauvetage des finances publiques, la vraie problématique du pays avec un déficit de 11 ou 12%, et en mettant en place des mesures qui rendent la confiance, notamment aux investisseurs étrangers pour bénéficier des changements mondiaux actuels.
S'agissant de la baisse du TMM, l'ancien président du directoire d'Amen Bank a rappelé que le TMM dépend du taux directeur qui ne peut être révisé que par la Banque centrale de Tunisie et que cela ne peut se faire qu'en entreprenant des réformes économiques permettant une stabilité des prix en Tunisie. Et de noter que nous consommons sans produire, ce qui impacte les prix.
S'agissant de l'amnistie proposée par le chef de l'Etat aux hommes d'affaires véreux, Ahmed El Kram estime que plus important est d'appliquer la loi, et s'il y a des contrevenants, il faut les convoquer, étudier avec eux des pistes de réconciliation pour des investissements, notamment dans les régions, mais le tout loin d'une logique de vengeance. En ce qui concerne la prochaine échéance, le 5 août prochain, pour le payement d'une partie de la dette du pays, le banquier pense que le problème n'est pas la disponibilité des ressources pour le payement des dettes mais le déficit budgétaire et le fait de devoir contracter de nouveaux crédits pour payer les anciens. « Ceci ne peut se poursuivre, et le traitement du déficit budgétaire sera l'un des principaux défis du prochain chef du gouvernement. Notre salut demeure de trouver un accord avec le FMI, qui reste tributaire de notre capacité de mise en place de réformes structurelles. Il faudra œuvrer à convaincre l'UGTT de la nécessité qu'elle ait un rôle dans le sauvetage de l'économie du pays, en donnant la priorité au sauvetage du pays avant les revendications des travailleurs. Mais, tout le monde devra se sacrifier et non pas uniquement les travailleurs », a-t-il expliqué. En ce qui concerne les négociations sociales, il a martelé que l'augmentation des salaires doit être corrélée avec une augmentation de la production et de la productivité.
Interrogé sur un retrait massif de fonds de la part des citoyens et des hommes d'affaires après l'annonce des décisions du 25 juillet, M. El Kram a écarté cette probabilité, affirmant que les indicateurs prouvent qu'il n'y a pas un retrait exceptionnel contrairement aux rumeurs et expliqué que juillet est connu pour être le mois des dépenses en Tunisie, coïncidant avec les vacances d'été et l'Aïd.
« J'ai confiance que cela peut se faire, surtout si on trouve une solution politique pour la gouvernance du pays », a affirmé Ahmed El Kram en réponse à l'animatrice sur une possibilité de sortie de crise.