Le secrétaire général du Parti des travailleurs, Hamma Hammami a exprimé sa solidarité avec le directeur de la radio Mosaïque Fm, Noureddine Boutar, arrêté depuis le 13 février 2023. Il a rappelé avoir mis en garde contre les dérives et les atteintes aux libertés. « Actuellement, nous traversons l'apogée de la contre-révolution... Je suis solidaire avec tous les détenus même ceux avec lesquels je ne suis pas d'accord », a-t-il dit. Invité le 1er mars 2023 par Elyes Gharbi à « Midi Show » sur Mosaïque Fm, Hamma Hammami a indiqué que la liberté d'expression avait été acquise par le sang et par les sacrifices des Tunisiens durant les dernières décennies. Il a évoqué les meurtres et les actes de torture ayant précédé la révolution du 14 Janvier. « La révolution du 14 Janvier a été le couronnement de ces luttes… La bataille contre la contre-révolution a été entamée depuis l'ère de Mohamed Ghannouchi, feu Béji Caïd Essebsi, la Troïka, de l'entente entre Nidaa et Ennahdha… Ils n'ont pas réussi, car il y avait une grande mobilisation de la part de la société… Kaïs Saïed a été élu alors qu'une grande partie de la société était affaiblie… Il a profité de cette phase en lançant des accusations de corruption contre le parlement, afin de porter atteinte à la représentativité, les médias, afin de porter atteinte à la liberté d'expression et les partis afin de porter atteinte à la liberté de s'organiser… La contre-révolution vise à anéantir les acquis de la révolution », a-t-il ajouté. Hamma Hammami a considéré que le pouvoir profitait de la situation afin de faire passer des mesures touchant le pouvoir d'achat et renforçant l'asservissement de la Tunisie aux forces étrangères. Hamma Hammami a rappelé les faibles taux de participation à la consultation électronique, au référendum et aux élections législatives. Il a expliqué qu'une partie du peuple ne soutenait pas le président de la République. Il a considéré que le nombre de personnes croyant aux paroles et aux discours du chef de l'Etat était en diminution. Citant les exemples de Mussolini et d'Hitler, M. Hammami a assuré que la cote de popularité n'était pas le seul critère à prendre en considération. « Quelle est la relation entre Kaïs Saïed et la révolution. On ne se lève pas de notre sommeil en affirmant être devenu révolutionnaire… Je vous mets au défi de me prouver que Kaïs Saïed avait participé au moins une fois à un événement soutenant la démocratie. Nous savons que Kaïs Saïed était, en temps de Ben Ali, proche du pouvoir. Il n'avait aucun rapport ni avec les mouvements de militantisme démocratique ou révolutionnaire… Il s'est approprié l'intégralité des pouvoirs : législatif, judiciaire, exécutif et spirituel… Quel lien entre cet absolutisme et la démocratie ? », s'est-il exclamé. Hamma Hammami a affirmé que le populisme de Kaïs Saïed était plus conservateur qu'Ennahdha et proche du parti Ettahrir. Il s'est transformé, par la suite, en racisme en évoquant les menaces contre l'identité arabo-musulmane. Hamma Hammami a indiqué qu'au sein de six pays africains la chasse aux Tunisiens avait été lancée. Il a expliqué que les migrants se trouvant en Italie avaient les mêmes intentions que les Tunisiens traversant irrégulièrement la Méditerranée. Il a estimé que la Tunisie jouait le rôle de garde-frontière de l'Europe. Hamma Hammami a indiqué que le discours du président de la République à l'encontre des migrants subsahariens était le même que celui d'Eric Zemmour, connu pour sa théorie du grand remplacement. Il a indiqué que les discours nationalistes racistes en Europe évoquaient des menaces à l'encontre de l'identité chrétienne. M. Hammami est revenu sur la déclaration de l'ambassadeur de la Tunisie à la République démocratique du Congo. Ce dernier avait affirmé que des migrants se trouvant à Sfax étaient équipés de machettes, violaient, tuaient et terrorisaient la population. Il a assuré que cette attitude servait de prétexte à la crise politique en Tunisie. Rappelant que la Tunisie était l'un des premiers pays à abolir l'esclavage, il a indiqué qu'il avait honte de cela. « Nous avons une loi qui incrimine les discriminations raciales… Pour ce qui est de la migration irrégulière, une loi existe… Nous devons les accueillir et les traiter de façon humaine », a-t-il déclaré. Hamma Hammami a rappelé qu'il avait fait l'objet de plusieurs poursuites sous prétexte d'atteinte à la sécurité de l'Etat. Il a considéré que la situation actuelle était risible. Il a indiqué que les dossiers, avant la révolution, étaient bien montés. « J'ai été arrêté la première fois, en 1970, dans le cadre d'un mouvement estudiantin pour avoir préparé un complot communiste, panarabe et sioniste... On me tabassait tout en m'interrogeant sur mon rôle dans le complot. J'avais 19 ans… L'affaire a été classée après un mois et demi… J'ai été arrêté en 1974 et accusé de complot contre la sécurité de l'Etat. Pourquoi ? Pour avoir critiqué le régime de Bourguiba ! En 1975, j'ai été accusé de complot contre la sûreté de l'Etat. Ceci sert à porter atteinte à nos libertés… Certaines personnes sont chargées de s'exprimer au nom de l'Etat… L'un d'entre eux que je ne qualifierais pas de votre collègue (en s'adressant à Elyes Gharbi) parle d'éléments d'enquêtes que les avocats des accusés ne connaissent pas », a-t-il poursuivi. Hamma Hammami est revenu sur la première affaire de complot comportant 25 noms de personnalités publiques. Il a indiqué qu'on parlait de moins en moins de cette affaire. Il a, également, assuré que ces personnes débattaient de la crise que traversait la Tunisie et que tout régime se disant démocratique devait accepter les échanges autour d'alternatives et de solutions. Il s'est interrogé sur l'annonce du chef de l'Etat, Kaïs Saïed, au sujet d'un plan d'assassinat. « Où est le plan d'assassinat ? Y a-t-il un accusé qui avait été interrogé à ce sujet ? L'une des personnes arrêtées, que je ne nommerai pas, a demandé au juge d'instruction s'il comptait l'interroger au sujet d'explosifs… Les personnes arrêtées débattaient de la possibilité de lancer une initiative politique… L'extrémisme populiste refuse totalement l'idée de l'existence d'une opposition », a-t-il dit. Hamma Hammami a assuré que Jaouhar Ben Mbarek, Ghazi Chaouachi et Issam Chebbi n'étaient pas des personnes connues pour soutenir la violence. Leurs avocats lui ont assuré que le dossier de l'affaire était vide. Il s'agit d'un fiasco et leur arrestation résulte de leur opposition à Kaïs Saïed. Ce dernier les a traités, lors de sa visite à la caserne d'El Aouina, de terroriste. Par la suite, le président avait affirmé que ceux qui les innocentaient ou les défendaient n'étaient autres que leurs complices. « Je suis fière d'être leurs complices et de défendre le droit d'expression des Tunisiens, même ceux qui m'insultent. Je défends leur droit de m'insulter… Que va faire le magistrat dans ce genre de situation ? Il se trouve sous pression… Kaïs Saïed est effrayé par la liste des noms participant à l'initiative lancée par l'UGTT », a-t-il continué. Hamma Hammami a indiqué que Hedi Nouira avait mis en place le système de compensation sous forme de complément salarial et non d'aide aux familles défavorisées. Il a rappelé que les études montraient qu'une famille de quatre personnes avait besoin de trois mille dinars par mois pour vivre. Il a estimé que la politique de la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, n'allait pas remédier au problème et trouver une solution à la défaillance du système de production. Il a considéré que le président de la République portait atteinte au pouvoir d'achat des Tunisiens.