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Gaza delenda est...et après ?
Publié dans Business News le 10 - 11 - 2023

Désinformez, désinformez, il en restera toujours quelque chose ! Dans l'Antiquité, en Méditerranée, deux puissances maritimes s'affrontaient : Carthage et Rome. Pour ruiner la réputation de son rival et entraîner la population dans la guerre, Rome a accusé les Carthaginois de pratiquer, entre autres, des infanticides rituels. Plus de 2.000 ans plus tard, toujours en Méditerranée, Israël et le Hamas partagent le même désir d'annihiler l'autre. Disposant d'une supériorité militaire évidente, Tsahal semble bien décidé à joindre les actes à la parole. Rêver de Gaza delenda est…c'est oublier qu'il existe des dizaines de Gaza au nord, à l'est et au sud.

Le respect du temps du deuil, pour l'ensemble des victimes sans distinction, nous a obligés à une certaine retenue, mais plus la guerre s'éternise, plus il devient difficile de garder le silence face aux évènements.
Les morts, la privation de vivres, les coupures d'électricité, d'eau, d'Internet, de gaz, le bombardement d'hôpitaux, d'ambulances, le vote au conseil de sécurité contre la mise en place de couloirs humanitaires, les destructions…

Pour arriver à ses fins, en plus d'une communication puissante, Israël n'hésite pas - et cela est insupportable – d'instrumentaliser les pogroms que les juifs d'Europe ont subis jusqu'à l'horreur absolue de leur extermination pendant la Seconde guerre mondiale. L'argument selon lequel les massacres du 7 octobre ont été "le plus grand pogrom depuis la fin de la Seconde guerre mondiale" est un élément de langage israélien repris désormais par tous. Puissant, il n'en est pas moins dérangeant. En donnant l'impression que les plus de 1.400 personnes tuées l'ont été parce que juives, cet argument - en convoquant la mémoire encore vive de la Shoah - anesthésie les consciences et relègue la question palestinienne au second plan. Oui l'antisémitisme de la « rue arabe » est allé croissant avec les guerres, il prend après chaque conflit de nouvelles formes, c'est indéniable, mais c'est une manipulation que de qualifier une guerre, pour des territoires et qui a fait 6 millions de réfugiés et qui dure depuis 75 ans à un sursaut de l'antisémitisme meurtrier tel qu'observé en Europe depuis des siècles.

Il n'y a pas de guerre propre. L'occupation et les humiliations quotidiennes que subissent les Palestiniens alimentent chez beaucoup un sentiment de haine du juif en général. Aucune ambiguïté ne peut être tolérée sur ce sujet, les propos tenus et les écrits racistes des deux côtés sont inexcusables, aucune explication ne saurait les justifier. Toutefois présenter le conflit sous angle de l'antisémitisme est une grossière manipulation.
Exit donc la question palestinienne, l'occupation des terres palestiniennes, les réfugiés....
Il nous faut le redire sans cesse, les crimes contre les civils, tous les civils sans exception, sont intolérables, injustifiables. Ils doivent être dénoncés sans aucune réserve, tout comme l'occupation et l'oppression des habitants des territoires occupés.

La Shoah est le « mal absolu », ce qui a été fait aux juifs en Europe doit être rappelé et enseigné dans les écoles. Les intellectuels arabes devraient, le crier plus fort que les autres et ce même s'ils n'y sont pour rien.
Le but ultime est d'effacer la distinction entre juif, israélien et sioniste. Ce n'est même plus possible dans certains pays. En France, des sénateurs planchent même sur une proposition de loi punissant l'"injure faite" à l'Etat d'Israël. C'est incompréhensible. Beaucoup de mes Maîtres en médecine étaient juifs et antisionistes. Être juif n'impose pas d'être Israélien non plus, d'ailleurs affirmer le contraire serait abject, car cela serait une forme d'exclusion des juifs des autres communautés. Enfin pour un arabe israélien, être sioniste est un non-sens, une traitrise.


Communiquer en temps de guerre est une arme. L'injonction faite aux Palestiniens - pluie de bombes aidant - de quitter le nord de l'enclave est perçue par nombre d'observateurs comme un prélude possible à l'annexion du nord de la bande de Gaza, l'une des zones les plus densément peuplée et pauvre de la planète. Pour justifier son opération qui a déjà fait près de 11.000 morts et déplacé 70% de la population gazaouie, selon les chiffres de l'ONU, Israël redouble d'efforts. Après avoir verrouillé l'accès à Gaza, Tsahal ne permet l'entrée qu'aux reporters qui acceptent d'y pénétrer "Embedded", embarqués avec ses troupes. Des influenceurs et autres hommes/femmes politiques sont également invités à visiter les Kibboutz, théâtres impuissants des massacres du 7 octobre et à les relayer sur leurs réseaux sociaux devenant ainsi les outils d'une campagne qui ne cherche plus à informer ni à éclairer la conscience. La diffusion d'un film sur les horreurs de cette attaque devant les grands de ce monde est en cours. L'unilatéralisme de la communication n'aide pas à la paix.
Nous sommes les victimes des victimes disait l'écrivain palestinien Edward Said, Elias Sanbar lui répond indirectement dans le Bien des Absents « Nous avions l'habitude de dire : les Palestiniens sont les juifs des israéliens ; et s'ils étaient en réalité leurs Peaux-Rouges ? ».


Le chercheur libanais Gilbert Achcar dans le Choc des Barbaries explique ainsi qu'« en dehors du monde occidental, on ne voit pas les Israéliens – je ne parle pas des juifs, en général, mais bien des Israéliens – comme des héros ou des victimes, mais comme des colons, protagonistes d'un colonialisme de peuplement. Il faut donc sortir un peu de cette vision occidentale et essayer de voir les choses comme les autres peuvent les voir – ces autres qui sont la majorité de la planète ». Ce dialogue de sourds creuse le fossé entre l'occident et les arabes.

De la Mauritanie aux Emirats, la « rue arabe » est en ébullition contre les dirigeants et les médias américains et européens. Ils sont accusés de pratiquer un politique de deux poids, deux mesures, de ne pas respecter les valeurs qu'ils prétendent défendre, de « déshumaniser les Palestiniens » pour mieux les tuer, de s'en prendre à tout ce qui est en rapport avec l'Islam. La mémoire des crimes de la colonisation est elle aussi très actuelle dans cette partie du monde. En partant, les puissances coloniales ont bien pris le soin de tracer des frontières totalement arbitraires pour diviser des territoires en fonction de leurs intérêts. C'est un fait historique.

Le rejet de l'Occident est une des conséquences les plus dramatiques de ce conflit. L'Europe en souffrira longtemps, moins les Etats-Unis. Les critiques envers les médias et les positions politiques de pays occidentaux - Etats-Unis en tête - face à la guerre, accusés de « déformation flagrante de l'histoire » et de « déshumanisation des Palestiniens » sont unanimes. Comment, les mêmes qui ont dénoncé les frappes russes sur les infrastructures civiles en Ukraine peuvent-ils se contenter de rappels laconiques, imprécis des lois humanitaires ? Pour compléter le tableau, certains expliquent qu'Israël ne fait pas exprès de tuer des civils et omettent de condamner la destruction d'écoles, d'hôpitaux et ne parlent pas du contexte dans lequel s'est déclenchée cette guerre, l'occupation de Jérusalem, les provocations hebdomadaires des extrémistes à la mosquée Al Aqsa, l'enfermement de millions de Palestiniens, les agressions commises par les colons, les expropriations par Israël des terres.

En face, la communication est tout aussi unilatérale. Les médias arabes ont eux aussi une attitude partisane non dissimulée, sauf qu'ils ne prétendent pas, comme le font les organes occidentaux, d'être neutres ou objectifs.


En 20 ans c'est la 6ème guerre déclenchée à Gaza entre une puissance nucléaire qui dispose des armes les plus sophistiquées au monde et d'une aide militaire américaine de près de 4 milliards de dollars contre un camp de réfugiés. Le soutien inconditionnel (la complicité) des Etats-Unis à Israël autorise toutes les dérives, jusqu'où ?
L'idée poursuivie est d'exterminer les Palestiniens mais elle n'est pas réaliste. Tout aussi fou est le projet de les pousser vers l'exil afin qu'ils s'installent dans de nouveaux camps de réfugiés. Que de souffrances, de temps perdu, que de destructions et de morts en raison de cet aveuglement. "Ils sont en train d'organiser le recrutement du Hamas pour les 15 années à venir" alertait ces jours-ci Guillaume Ancel, ancien officier français choqué par l'ampleur de l'opération israélienne à Gaza. Lui, qui a dénoncé par le passé les accointances françaises avec le régime génocidaire rwandais sait probablement de quoi il parle…


A chaque guerre, intifada, le conflit israélo-palestinien fracture toutes les sociétés, pire le monde entier, globalement le nord contre le sud. Nous voilà poussés dans nos retranchements. Un gouffre se creuse entre les pays du Sud qui ont été victimes de la colonisation et d'exploitation et l'Occident. Les défenseurs des libertés, de l'entente entre les peuples, d'une coopération plus juste entre le Nord et le Sud se sentent trahis aujourd'hui, mais c'est peut-être dans cette frange, aujourd'hui inaudible, que se trouve la petite lumière d'espoir à laquelle on doit s'attacher.
Appeler à la paix actuellement est un exercice délicat tant l'angoisse et les horreurs commises ont poussé chacun à se retrancher dans son camp. Dans cette région du monde nul n'a le monopole du terrorisme. Aujourd'hui les parents Palestiniens écrivent le nom de leurs enfants sur leurs peaux pour pouvoir les reconnaître dans les décombres.
Quand on assassine un enfant sans défense, regarder sa religion avant de condamner ou les moyens avec lesquels il a été tué avant de condamner, est simplement indigne, faut-il vous le rappeler, Madame Caroline Fourest ? Faut-il aussi rappeler que toute occupation est intolérable, pour tous les peuples.


Aussi faut-il, pour avancer vers la paix, se souvenir de cette maxime de Confucius : « celui qui recherche la vengeance devrait commencer... par creuser deux tombes », ce n'est plus que deux tombes qui se creusent maintenant sous nos yeux avec la complicité de tous mais une fosse commune. Il faut arrêter ces cycles de la violence qui ne mèneront à rien sinon des malheurs de part et d'autre. Il faut libérer les otages et arrêter de bombarder Gaza. Il faut avoir le courage de dépasser la haine et essayer de comprendre les angoisses de l'autre, comprendre que paix veut dire, pour les Israéliens, sécurité et pour les Palestiniens, paix veut dire reconnaissance. L'un ne va pas sans l'autre. Ecraser et humilier l'ennemi est un raisonnement court-termiste qui ne fait que nourrir la soif de vengeance, les guerres puniques évoquées plus haut mais aussi, plus près de nous, les guerres mondiales du siècle dernier nous l'ont appris.

Avoir agi insidieusement ou ouvertement pour couper la route à la solution de deux Etats, a alimenté le désespoir et la colère, il a poussé les uns et les autres dans les bras d'extrémistes, et pourtant, cette stratégie qui se voulait destructrice, débouchera tôt ou tard, forcément sur une autre solution. C'est tellement évident, les ennemis d'aujourd'hui sont condamnés à vivre ensemble demain. Et d'ores et déjà, des voix commencent à s'élever dans les deux camps pour dire que la guerre n'a jamais été et ne sera jamais une solution viable.

* ancien ministre de la Santé


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