En ce début de haute saison touristique et des vacances, il est bon de procéder à un diagnostic des différentes régions touristiques et hôtelières du pays. Et Djerba « la Douce » ou « l'Île des rêves » comme on se plait à la surnommer, constitue un des hauts lieux qui ont fait et font encore le bonheur du secteur. La revue « Afrique Tourisme » s'est chargé de faire ce constat dans sa dernière livraison du mois de juin 2010. En effet, dans une enquête menée par son directeur, Hédi Hamdi, et étayée par des témoignages recueillis par Hamma Hanachi, la revue essaie de faire un état des lieux de l'île en évoquant les problématiques qui se posent, la budgétisation à réserver pour entretenir l'image de Djerba, la situation du patrimoine naturel en danger et le rôle de l'Etat. Des points forts certes, mais des lacunes et des défaillances aussi sont à signaler Les perspectives sont elles reluisantes ? A qui incombe la responsabilité d'une telle situation ? Enquête menée par « Afrique Tourisme » D'entrée, le dossier-enquête relève que Djerba compte 121 hôtels (49 500lits), 19 centres de thalassothérapie, un parcours de golf, 20 bateaux de croisières, des discothèques, des restaurants, des musées, une marina et un festival d'été. Mais il pose les interrogations suivantes : « Djerba 2010 est-elle la même d'il y a 5 ans ? 10 ans ? 20 ans ? Non, Djerba a changé. Mais en bien ou en mal ? ». That is the question. « Djerba change, évolue, se transforme, se modifie, s'adapte à l'air du temps, se convertit aux impératifs de la modernité, mais perpétue ses traditions. Avec 78% de taux d'occupation ses hôtels sont, de toute évidence, ceux qui réalisent les meilleures performances de remplissage à l'échelle nationale ». Et à la revue d'ajouter que « selon les statistiques officielles de l'ONTT, ce sont 1,3 million de touristes qui ont séjourné à Djerba en 2009, générant 8,321 millions de nuitées. Mais, à l'instar des autres zones touristiques, Djerba se plain de la question des bradages des prix. Pour Jalel Bouricha, président de la Fédération régionale de l'hôtellerie de Djerba-Zarziz, la question du bradage est symptomatique : « il n'y a pas d'équilibre entre les forces en présence à cause des pouvoirs des T.O ». « Mais loin de jeter l'éponge, Jalel Bouricha préconise une étude technique définissant les différents prix à appliquer en fonction de la catégorie des hôtels, selon les saisons et le type de séjour. Reste à réunir l'ensemble de la profession autour de cette idée et à accorder les violons des unes et des autres. « Quand les poules auront des dents ! », ajoute un directeur d'hôtel en aparté. En substance, dans les rangs de la profession, on en appelle aujourd'hui, à la mise en place d'un fonds spécial pour aider à entretenir l'image de Djerba sur les marchés émetteurs de touristes. Certes, l'on reconnaît que des progrès ont été faits, notamment avec l'organisation, à l'été 2009, d'un excellent festival d'été, le festival d'Ulysse, grâce surtout aux 100 000 dinars de soutien apportés par l'ONTT. » « Mais, c'est en hiver que Djerba tire le diable par la queue, ajoute l'auteur de l'enquête. Et la question qui se pose actuellement est de savoir comment maintenir des taux de remplissage acceptables dans les hôtels ». Le dossier évoque, ensuite le volet du patrimoine naturel de l'île en précisant que le « principal danger qui menace, aujourd'hui, le tourisme à Djerba, est celui de l'érosion des plages. Le sable est, en effet, déporté par un phénomène naturel de la principale zone hôtelière vers Ras Remal. A Aghir, il se déplace vers El Kantara Au-delà de Djerba, Zarzis est, également, touchée par l'érosion et le rétrécissement de ses plages. La cause principale de ce phénomène est due à l'occupation non conforme du littoral. Le tourisme, aujourd'hui, subit les conséquences d'un laisser aller remontant à une certaine époque d'inconscience et d'impunité. Mais cette inconscience n'a pas totalement disparu. A qui la faute ? C'est la grande question qui se pose et les différentes parties concernées se rejettent la responsabilité. Pour les problèmes de propreté sur l'île, les hôteliers pointent du doigt les trois municipalités chargées de l'espace communal. Cependant, tout le monde est d'avis que des améliorations ont été apportées à Midoun, en zone touristique et sur la route de l'aéroport. C'est maintenant à l'intérieur des terres et dans les quartiers qu'il y a des efforts à faire Autre problème a Djerba, souligne l'enquête, « celui des intrus, connus sous le nom de « beznessas » qui vendent tout et n'importe quoi aux touristes. Ces véritables réseaux informels sévissent quasiment partout et connaissent très bien leur rôle et leur périmètre d'activités. Mais tans que tous les hôteliers ne prendront pas la décision ferme et irrévocable de leur interdire l'accès à leurs établissements, il ne sera pas possible de mettre un terme à leurs agissements ». Et que fait l'Etat ? 200 millions de dinars, est l'enveloppe budgétaire que les pouvoirs publics déclarent avoir consacré aux gros équipements d'infrastructure de la région de Médenine entre 2008 et 2010. Ce montant va, notamment au raccordement de la région au gaz naturel, ce qui, de toute évidence, profite »ra énormément aux hôtels de Djerba et de Zarzis, à la centrale électrique d'Aghir et à la nouvelle station de dessalement des eaux qui, une fois opérationnelle, aura une capacité de 50 000 m3 par jour alors que le déficit en eau dans l'île est estimé à 3 000 m3 par durant l'été. Ceci côté constat officiel et perspectives chiffrées. Mais l'avis de certaines personnes amoureuses de l'île des rêves compte aussi. Hamadi Cherif, galeriste, directeur de Dar Cherif, centre international d'art et de culture estime « qu'il faut diversifier le produit, mettre un temps d'arrêt à la construction d'hôtels gigantesques tout ne accordant un intérêt supplémentaire à la propreté de l'île ». Karim Souabni, maître des lieux, une sorte de bourg perdu au milieu de l'île est convaincu qu'à « chaque problème, il y a une solution. L'image a été brouillée par la clientèle qui a changé, la destination est devenue « cheap » à cause du trop plein de concurrence entre hôtels ». Lazhar Haj hassan, propriétaire du restaurant « Sofra », abonde dans le même sens en estimant qu'il y a trop d'hôtels, rien que du béton. Or ce n'est pas ce que cherche le touriste d'aujourd'hui. Cela crée une situation de concurrence malsaine aussi bien entre hôtels qu'entre commerçants à l'intérieur des souks ». Synthà ̈se de Noureddine HLAOUI