Après le ballon d'essai envoyé par Iyadh Ben Achour il y a 15 jours à la une du quotidien La Presse, voilà que Kamel Jendoubi nous annonce la décision de son instance de reporter les élections. On ne peut pas dire qu'on ne nous a pas psychologiquement préparés. Et les arguments brandis par Ben Achour, il y a 15 jours, sont quasiment identiques à ceux de Kamel Jendoubi aujourd'hui : techniques. Béji Caïd Essebsi a dit non à ce report. L'écrasante majorité des grands partis ont dit non à ce report. Et pourtant ! Allez encore un peu, et on va nous brandir « le peuple veut » un report et que l'on doit se taire face à la volonté du peuple que représentait, hier, Ben Achour et, aujourd'hui, Jendoubi ! Non, Monsieur Ben Achour, vous ne représentez pas le peuple. Non, Monsieur Jendoubi, vous ne représentez pas le peuple. Il y a un intérêt suprême du pays et cet intérêt suprême passe par des élections en juillet et non en octobre. Et même si le peuple que vous représentez, Monsieur Ben Achour, veut des élections en octobre, eh bien dites lui à votre peuple que l'intérêt national passe par des élections en juillet et non en octobre. Vous évoquez des raisons techniques ? Cela n'étonne pas que vous ignoriez la technique électorale, vous qui êtes préoccupé par le lancement de votre Fatiha 2 en France. Allez voir Abdelaziz Ben Dhia en prison et il vous trouvera une solution. C'est lui qui a confectionné la Constitution qui prévoit des élections en deux mois après la vacance du poste du président de la République. Il vous donnera les explications techniques pour les organiser ces foutues élections et organisons les à la date préalablement indiquée en juillet, conformément à vos promesses et conformément aux promesses du gouvernement ! C'est vrai que le poste que vous occupez, ainsi que les membres de votre instance, est confortable et que vous avez envie d'y rester encore plus longtemps. Mais il est également vrai que la Tunisie d'aujourd'hui ne supportera pas trois mois de report, alors que nos soldats sont en train de mourir sous les balles des terroristes ! C'est vrai que les partis présents dans votre instance ont intérêt à voir ces élections reportées. Mais il est également vrai que la Tunisie d'aujourd'hui ne supportera pas trois mois de report, alors que notre économie est souffrante, que notre chômage est en train de grimper et que notre tourisme est en train de pleurer. Le vrai peuple est en train de souffrir messieurs. Le vrai peuple, messieurs, n'est pas celui que vous voyez dans votre palais au Sénat du Bardo ou celui de Facebook. Vous pensiez amortir le choc avec votre interview d'il y a 15 jours préannonçant ce report. Mais les chocs, nous les recevons quotidiennement messieurs. Nous avons reçu un choc mercredi dernier avec ces projets d'actes terroristes et nous en recevrons encore davantage quand nous découvrirons des caches d'armes et d'autres projets similaires. Le fait même de savoir que les gars de Soliman sont dans la nature donne froid au dos. Nous recevrons d'autres chocs encore quand l'économie chancelante nous rattrapera et que la saison touristique désastreuse qui nous attend accouche de fermetures d'hôtels et de licenciements à la pelle. Idem du côté des entreprises qui mettront la clé sous la porte et des boîtes étrangères qui iront voir ailleurs. Nous recevrons d'autres chocs encore quand nos « frères » d'Ettahrir n'accepteront plus d'être délogés de l'avenue Habib Bourguiba pour faire leurs prières, en mettant à exécution leurs menaces. Nous recevrons d'autres chocs quand nos banques n'auront plus suffisamment de liquidités, parce que nos épargnants n'ont plus confiance dans ce pays. Il y a des signes avant-coureurs qui ne trompent pas et qu'on découvre dans les faits divers de l'actualité. L'arrestation d'un citoyen essayant de faire exporter illégalement 20 kilos d'or en est un. Théoriquement, ce citoyen ne fait plus confiance en la monnaie locale et cherche une valeur sûre (l'or) pour protéger ses avoirs. Pire, il veut que ses avoirs soient à l'étranger pour qu'il puisse, le jour venu, fuir le pays. On parle trop de ces élections messieurs et on oublie les échéances qui viendront après. L'affaire des terroristes arrêtés, les grèves à répétition, la justice lente et de deux poids deux mesures, la manipulation qui se trame dans les médias ou l'économie chancelante sont des synonymes de bombes à retardement. Le jour où ces bombes, ou l'une de ces bombes, explosera, il sera, peut-être, trop tard. Reporter ces élections, c'est offrir au pays trois mois supplémentaires d'incertitude pour créer d'autres bombes à retardement ! Non merci !