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Tunisie La loi de la tradition et l'hypocrisie ramadanesque
Publié dans Business News le 27 - 07 - 2012

Ce qui différencie généralement un Etat autoritaire et arbitraire d'un Etat de droit, est d'une part la nature de ces lois, de préférence égalitaires, qui garantissent les libertés individuelles et assurent les mêmes droits pour chaque citoyen et, d'autre part, le respect de ces lois et leur application. Avec une ancienne Constitution abrogée, une Loi fondamentale lacunaire et une nouvelle Constitution dont le premier jet n'a pas encore été remis… avec des lois liberticides, érigées du temps de la dictature encore appliquées à ce jour, et d'autres lois, qui respectent un tant soit peu les canons des libertés dans un pays considéré comme démocratique, publiées, qui plus est, au journal officiel (notamment les décrets 115 et 116 relatifs à la liberté d'expression et de la Presse) et qui ont été rejetées par le gouvernement provisoire, la Tunisie d'aujourd'hui connaît un flou juridique propice aux abus de pouvoir et autres interprétations abracadabrantesques des lois (existantes ou arbitrairement admises) de la dictature, dans la parfaite continuation de l'ancien régime et de ses méthodes…
Pendant le mois Saint de Ramadan, les instincts traditionnalistes ressortent ; élans liberticides, peu respectueux de ce que devrait être un Etat de Droit ou même un Etat civilisé, peu respectueux des libertés de culte, de conscience ou de croyance, peu respectueux de la diversité et des différences…
Que les chauffeurs deviennent des chauffards, que les diners se transforment en banquets gargantuesques ou que les prix explosent au détriment des classes les plus défavorisées, cela ne constitue pas, en soi, une volonté des autorités d'augmenter le nombre d'accidents (déjà élevé) ou de créer une forte inflation voire des pénuries. Mais lorsque des penchants conservateurs et traditionnalistes s'élèvent au rang de loi pour l'unique raison qu'ils sont partagés par les autorités provisoires actuelles, la question se pose de la possibilité d'ériger un Etat de droit en Tunisie.
Que des salafistes ou considérés comme tels détruisent des œuvres d'art, ferment des bars ou intimident les propriétaires des cafés ouverts pendant le mois de ramadan (comme cela s'est produit l'année dernière, sous le gouvernement BCE), cela ne constitue pas un problème en soi, dans le sens où des contrevenants à la loi existeront toujours. Que les forces de l'ordre n'aient pas la capacité de freiner ces contrevenants et de faire respecter la loi, cela constitue moins une raison à ces agissements qu'une défaillance au niveau du ministère de l'Intérieur et des moyens alloués à la sécurité des citoyens, défaillance à laquelle il serait utile de remédier. Le problème majeur que rencontre la Tunisie ne saurait se limiter à des limites conjoncturelles dues à des troubles postrévolutionnaires que l'on pourrait qualifier de « normaux » en cette phase de transition dite démocratique, mais se situe au niveau de l'Etat, de l'autorité publique et de la Justice.
Lorsque des représentants de médias ou de jeunes caricaturistes (aussi condamnables soient-elles) sont condamnés voire emprisonnés pour plusieurs années, sur la base des lois liberticides, symboles de la dictature, l'Etat de droit est en danger, lorsque la menace dite salafiste et les violences qui en découlent sont justifiées par les trois plus hauts représentants de l'Etat pour condamner une supposée « atteinte au sacré » et indirectement légitimer cette violence, il s'agit d'un Etat voyou, lorsque des lois sont créées de toutes pièces et appliquées pour l'unique raison que ces lois inexistantes étaient « appliquées » du temps de Ben Ali, l'Etat tunisien s'apparente plus à une République bananière, arbitraire et anarchique.
Ainsi, pendant ce mois saint de ramadan, les forces de l'ordre ont été mobilisées pour faire appliquer une loi inexistante, celle de la fermeture des cafés et lieux de restauration pendant les horaires du jeûne. Cela s'est vérifié, dès le premier jour, dans le quartier d'Ennasr, où des policiers, disant obéir à un ordre du gouverneur de l'Ariana, sont intervenus pour fermer les quelques fast-food et cafés ouverts sur l'avenue principale du quartier… un des restaurateurs, bénéficiaire du sésame appelé « licence touristique », a été autorisé à vendre la nourriture à emporter. Les clients installés (à l'intérieur et à l'abri des regards affamés) ont été invités à quitter les lieux. Le porte-parole du ministère de l'Intérieur, déclare qu'il ne s'agit là que d'une application de la législation, déjà en vigueur depuis plusieurs années (c'est-à-dire du temps de Ben Ali). Il précise par ailleurs que les seuls lieux de restauration et cafés autorisés à ouvrir sont ceux qui se trouvent dans des « zones touristiques » ou des « zones commerciales modernes », affirmant que ceux qui se trouvent dans des « quartiers populaires » doivent fermer. Le gouverneur de Tunis évoque, quant à lui, l'existence d'une circulaire émise à cet effet par le ministère de l'Intérieur. Laquelle circulaire, de l'avis de plusieurs hommes de loi, n'aurait aucune valeur juridique, si son existence était avérée.
Au-delà de la discrimination faite aux quartiers les plus défavorisés, qui n'ont ni la chance d'être touristiques, ni modernes, le même porte-parole ajoute que l'ouverture de ces cafés est destinée aux « touristes, étrangers ou malades ». Il suffirait d'aller faire un tour dans ces cafés enfumés du centre-ville de la capitale, pour constater qu'il n'y a ni touristes, ni malades, du moins en apparence… que ces cafés sont généralement fréquentés par une clientèle tunisienne et… musulmane, encore une fois d'apparence. Cette « hypocrisie ramadanesque » consistant à penser que les seules personnes qui ne pratiquent pas le jeûne sont étrangères, malades ou non musulmanes, est donc reprise au sommet de l'Etat et s'érige au rang de « loi ».
La compréhension d'une telle « loi » est, en outre, tributaire des représentants de l'autorité publique que sont les forces de l'ordre. En effet, dernier événement en date, le jour de la « fête de la République », des policiers sont intervenus à l'intérieur du centre commercial « Carrefour », dans la banlieue Nord de Tunis, pour fermer les restaurants restés « ouverts ». Il s'agissait de lieux de restauration rapide qui ne pratiquaient, pendant les horaires du jeûne, que de la vente à emporter. En plus du fait que ce lieu pourrait être, à juste titre, considéré comme une « zone commerciale moderne », à défaut d'être dans une zone touristique, la vente à emporter ne diffère pas, théoriquement, de la vente de produits alimentaires à l'intérieur du supermarché. Faut-il donc attendre la rupture du jeûne pour pouvoir acheter son pain ou est-on obligés de cuisiner soi-même pour pouvoir se nourrir ?
Cette « pseudo-loi » a prouvé ses limites, dans la difficulté de son application. En effet, le buzz médiatique créé suite à la fermeture des fast-foods d'Ennasr a permis, pour certains d'entre eux de rouvrir leur porte aux « déjeuneurs », une pression qui a eu raison, pour quelques cas du moins, de la faiblesse des arguments présentés, comme en témoigne le manager d'un des restaurants du quartier. En effet, ce dernier a été informé, par médias interposés, qu'il avait l'autorisation d'accueillir de nouveau les clients au sein de son établissement. Quant aux managers des deux restaurants de carrefour, ils auraient reçu des excuses de la part de responsables de la police, après l'intervention de leurs agents, selon plusieurs sources concordantes.
L'alcool, comme la nourriture pendant ramadan, est soumis à des règles tout aussi arbitraires, conformes à la « tradition ». Ainsi, si la loi sous la dictature stipule qu'il est interdit de vendre de l'alcool à un musulman, l'application de cette loi reste arbitraire, tout comme son non-sens juridique, assimilant, pour certaines applications, la religion à la nationalité ou à la sonorité musulmane du nom de famille. Ainsi, il faut montrer patte blanche (passeport rouge) les vendredis saints et pendant ramadan, pour pouvoir être servi (sauf quelques cas de touristes ou résidents étrangers à qui on a refusé de servir de l'alcool car ils étaient accompagnés d'indigènes)… Les restaurateurs ou les clients, quant à eux, sont souvent soumis aux abus de pouvoir des forces de l'ordre, qui confisquent les marchandises ou reçoivent des pots de vin, conséquence de l'aspect arbitraire de certaines lois tunisiennes.
Le gouvernement actuel ou même l'ensemble des députés de l'Assemblée constituante ne font preuve d'aucune volonté pour changer la législation (ou les applications arbitraires de lois lacunaires), en vigueur sous Ben Ali, mais usent de ces règles pour justifier l'Etat de non-droit dans lequel les Tunisiens évoluent aujourd'hui… pour arriver, tant bien que mal, aux prochaines élections.


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