Peu importe l'appartenance des hommes politiques, leurs idéologies ou leurs approches, le politicien ne peut, en aucun cas, se dévêtir de son humanité notamment face à des personnes souffrant d'handicap. Khalil Zaouia, ministre des Affaires sociales, qui de surcroit est médecin de formation, a malheureusement fait preuve de peu d'humilité envers des enfants autistes venus solliciter de l'aide, devant une situation financière désespérante. Khalil Zaouia, en homme d'Etat qui se respecte a brandi "l'arme" du respect strict de la législation, même si cette dernière s'avère injuste envers ces enfants et ces familles en souffrance. Et pourtant, c'était ce même Khalil Zaouia qui a si bien exprimé sa sensibilité à la cause des handicapés aux Nations Unies et qui a promis nombre de mesures et de lois en leur faveur. Khalil Zaouia défend les handicapés devant les membres des Nations Unies Notre ministre des Affaires sociales a bel et bien participé au siège des Nations Unies à Genève, le 23 septembre 2013, à la deuxième table ronde de la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le handicap et le développement, sous le titre: "La voie à suivre : un programme de développement qui tienne compte de la question du handicap pour 2015 et au-delà". Il y a bien pris part et a même prononcé un discours très éloquent, prometteur, presque touchant. M. Zaouia y a déclaré que "l'approche du gouvernement dans l'amélioration de la situation des handicapés repose sur plusieurs lignes de conduite…, comme constitutionnaliser la garantie des droits des handicapés et leur protection et également les former, les instruire, les encadrer et leur procurer leur part d'enseignement, de soins médicaux et d'activités sportives". M. Zaouia a affirmé "qu'aucun droit ne peut exister sans un texte de loi qui le protège". Il a, également, déclaré que "la Tunisie reconnaît le droit des personnes handicapées à mener une vie digne … en leurs accordant plusieurs privilèges, dont la gratuité des transports et la priorité dans l'accueil aux administrations et institutions publiques …" M. Zaouia a conclu par affirmer l'accord de la Tunisie pour l'adoption du document final, émanant de ladite table ronde. Il serait utile de présenter à ce titre quelques extraits dudit document, des extraits sur lesquels le ministre se serait engagé, au nom de l'Etat tunisien. Le document met en exergue "la nécessité pour toutes les parties prenantes concernées d'entreprendre d'urgence, d'arrêter et de mettre en œuvre des stratégies et mesures nationales de développement plus ambitieuses et plus attentives à la problématique du handicap… » Parmi tant d'autres mesures à entreprendre, figurent les recommandations de "consacrer le droit à l'éducation sur la base de l'égalité des chances et de la non-discrimination en rendant l'enseignement primaire accessible, gratuit et obligatoire pour tous les enfants handicapés…, organiser l'accès des personnes handicapées aux services de santé…, et renforcer la protection sociale pour répondre aux besoins nés du handicap, et favoriser l'accès des personnes handicapées, aux régimes correspondants assortis d'une protection sociale minimale, notamment au moyen de compléments de revenus, et leur donner accès, à des tarifs abordables, aux services, appareils, accessoires et autres aides dont elles auraient besoin"; C'est bien beau tout ça, mais alors, que s'est-il passé avec M. Zaouia, pour que des enfants autistes, en dépit de leur profond isolement, fassent des sit-in de protestation avec leurs parents, réclamant des mesures immédiates et déplorent une indifférence, voire du dédain, face à leur souffrance? Khalil Zaouia, tourne le dos aux autistes; retour sur les faits et témoignages Il est utile de préciser avant tout, que l'autisme fait référence aux "troubles envahissants du développement par une interaction sociale et une communication anormales". En d'autres termes, un enfant autiste souffre de difficultés dans de nombreux domaines du fonctionnement de la personne, en particulier tous ceux qui nécessitent ou engendrent des contacts avec l'environnement. Par ailleurs, ces caractéristiques peuvent apparaître sous différentes combinaisons et avec une intensité variable. Par conséquent, les personnes autistes sont très différentes les unes des autres, d'où la difficulté de leur prise en charge éducative et sociale et la nécessité d'impliquer plusieurs compétences dans le processus de leur encadrement. Les parents des enfants autistes dont s'occupe l'association "La Rose", une association qui se charge de 125 enfants atteints d'autisme, ont vécu une mésaventure déjà connue du grand public. Plusieurs médias, dont Business news, ont déjà relayé l'incident qui s'est produit entre eux et les hauts cadres du ministère et à leur tête le ministre en personne. L'histoire a commencé avec la décision du ministère des Affaires sociales, prise récemment, de suspendre les subventions annuelles au profit des enfants handicapés et de prendre en charge, en contrepartie, les salaires de quelques uns parmi le personnel qui s'en occupe. Pour l'association "La Rose" cette prise en charge a été limitée par le ministère à 7 personnes. Or, elle compte déjà 23 éducateurs. Le ministère a ainsi imposé le licenciement des autres éducateurs, au cas où l'association n'est pas en mesure de les payer par ses propres moyens. Ce qui est impossible à réaliser, vu le nombre élevé des enfants et la lourdeur de leur handicap mental d'un côté et vu le manque de moyens de l'association, de l'autre côté. Se trouvant dans l'impasse et voulant exprimer leur désaccord avec cette décision, les 120 enfants autistes concernés, accompagnés de leurs parents, ont tenté de rencontrer Khalil Zaouia, ministre des Affaires sociales. Mais il s'est avéré que M. Zaouia avait d'autres priorités, son déjeuner par exemple! Devant l'insistance de certains parents, une brève rencontre a eu lieu sans pour autant assouvir la faim des parents en quête de solutions à leurs problèmes. En effet, M. Zaouia, n'a pas trouvé mieux que d'accuser les parents. "Vous utilisez ces pauvres enfants dans vos surenchères. Si vous étiez en France, vous seriez passibles de prison!". Cerise sur le gâteau, M. Zaouia n'a pas manqué de rappeler à ces parents que le centre "La Rose" a coûté 65 millions de dinars à l'Etat et a menacé de tout arrêter. Par ailleurs, pour ce qui est des salaires des éducateurs, indispensables au centre, le ministre a invité ces parents à se plaindre auprès de l'UGTT pour trouver des solutions. Lui, il ne peut pas les aider, car lui, il "est différent des ministres de Ben Ali", lui, il "se limite à respecter à la lettre la loi et ne se permet aucune entorse". Voulant en savoir plus sur la situation d'autres associations, notamment celles s'occupant du même handicap, nous avons également contacté l'Association de Protection des Psychotiques et Autistes Infantiles (APPAI). Le tableau dressé par les responsables de l'association ainsi que par les parents, n'en est pas moins obscur. Le trésorier a précisé que le ministère avait suspendu les subventions depuis janvier 2013. Les salaires des mois de janvier à juin ont été libérés, tout récemment, le vendredi 4 octobre par le ministère, à hauteur de 50% seulement de leur valeur. Celui du mois d'août a été payé dans son intégralité. Sauf que, la prise en charge des salaires n'inclut pas le personnel paramédical, pourtant bien existant dans ses deux centres et indispensable pour ce type d'handicap. Autre hic, le ministère a, également, décrété une taxation d'office pour la sécurité sociale des enfants, pour un montant de 54.000 dinars, une somme considérable, et difficile à fournir par l'association, surtout que dans la conjoncture économique actuelle, peu de donateurs sont encore disposés à venir à la rescousse. Ainsi, l'APPAI se trouve nez-à-nez avec un huissier notaire venu alerter d'une éventuelle saisie des biens si la somme due n'est pas remboursée sous peu. Mais qui va la payer? Sont-ce les parents, dont bon nombre appartiennent à des familles nécessiteuses? Même les parents, assez fortunés, ne peuvent couvrir les frais et dépenses, d'une manière indéterminée ! Il est étonnant, dans ce contexte, d'apprendre auprès d'un responsable dans l'association qu'un directeur général chargé de la promotion sociale au sein du ministère avait pourtant promis lors d'une rencontre assez récente de renoncer à cette taxation d'office, une promesse non tenue et encore une fois, des paroles en l'air. Les responsables de ces associations sont désespérément convaincus que, face à ces difficultés financières accrues, les centres qui s'occupent de ces enfants atteints d'autisme risquent d'être contraints à fermer leurs portes. Ceci serait indéniablement très lourd de conséquences, car ceci implique, entre autres, que des mères de familles s'arrêtent de travailler, afin de s'occuper de leurs enfants, et par conséquent perdre une source de revenus vitale. Et tant que le ministère fait la sourde oreille à ces associations et ne leur tend pas la main pour les sortir du gouffre, ces enfants seront les premiers à payer le prix fort des politiques politiciennes.