L'actualité internationale cette semaine a été secouée par deux événements. Le premier est l'horrible attaque perpétrée par les talibans dans une école, à Peshawar au Pakistan, qui a fait près de 120 morts parmi les élèves. Une attaque lâche et abjecte, cela va sans dire. Le deuxième événement est la prise d'otages qui a eu lieu à Sydney en Australie. Un islamiste radical, mentalement dérangé, a pris en otage plusieurs personnes dans un café de la ville australienne. Le bilan s'est soldé par la mort de deux otages en plus du ravisseur. Pendant la prise d'otages et surtout après, un hashtag est apparu sur Twitter pour montrer la solidarité des Australiens avec les musulmans : #Illridewithyou (littéralement je voyagerais avec vous). Ce hahstag a permis à une frange de la population australienne de montrer que les actes de certains détraqués ne pourront pas désunir le peuple australien et ne seront pas un prétexte pour stigmatiser les musulmans. Ce hashtag est devenu en quelques jours l'un des sujets les plus discutés à travers la planète. Tout a commencé avec es personnes qui détaillent sur Twitter leurs trajets quotidiens en bus ou en métro et qui proposent à des personnes de confession musulmane de voyager avec eux, d'où le hashtag en question. Le phénomène s'est élargi au plan national pour ensuite devenir international. Quel rapport avec la Tunisie ? Aucun, sinon la leçon. Imaginons un extrémiste juif par exemple qui prendrait en otage des Tunisiens dans un café et en tuerait deux avant de mourir. Est-ce que les Tunisiens seraient capables d'avoir cet élan de solidarité ? Est-ce qu'on verrait une telle vague apparaitre dans notre pays ? D'aucuns diraient que les Tunisiens, depuis la révolution, ont toujours été au bord de la rupture. D'abord, il y a eu la division des Tunisiens entre islamistes et laïcs, plus tard c'était les membres de l'ancien régime contre les révolutionnaires. Tout cela est venu s'ajouter à des divisions d'un autre ordre entre Sahel et régions de l'intérieur, nord et sud, mais aussi entre les classes, riches et pauvres etc. Toutes ces lignes de démarcation entre Tunisiens ont été exacerbées pendant les campagnes électorales, aussi bien législative que présidentielle. Moncef Marzouki, particulièrement, a joué sur ces divisions en se présentant comme le candidat des pauvres contre les riches, le représentant des démocrates et des révolutionnaires contre celui des non-démocrates et des corrompus, le défenseur des régions intérieures contre l'hégémonie du sahel. Il est arrivé à garnir ses rangs grâce à la division, à la peur et à la menace. Il a accumulé des soutiens en faisant appel aux instincts des personnes et non à leur raison. Pourtant, les Tunisiens sont capables des plus hautes manifestations de solidarité, non seulement entre eux mais aussi avec les autres. Quand des centaines de milliers de réfugiés ont franchi la frontière pour fuir la guerre en Libye, le peuple tunisien les a accueillis. Un élan de solidarité sans précédent a pris naissance et des personnes se sont déplacées de tout le territoire tunisien pour venir en aide aux réfugiés en apportant des vivres, des vêtements, des couvertures et autres produits indispensables. On n'avait jamais vu ça, d'après le témoignage de plusieurs responsables d'ONG internationales qui s'étaient mobilisées pour ces mêmes réfugiés. Il y avait tellement de denrées et de dons qu'une partie de la nourriture apportée avait pourri et que certains surplus étaient revendus dans les villes voisines ! La question qui se pose est : Est-ce que le peuple tunisien se laissera entraîner dans ses divisions ou va-t-il sortir de cette période transitoire par le haut ? Là est le nœud du problème car les Tunisiens sont capables des deux. Du plus bel élan solidaire aux divisions les plus absurdes, tout est possible en Tunisie. Quelle que soit l'issue de l'élection présidentielle, on ne peut qu'espérer que les Tunisiens se retrouvent. Certains Tunisiens plutôt. Il ne faut pas oublier que la majorité écrasante des Tunisiens ne s'intéresse pas à la chose politique dans son ensemble. Cette majorité de Tunisiens n'a pas le temps pour s'occuper des plateaux télé ou des disputes stériles. Ils sont plutôt préoccupés par les prix des denrées alimentaires qui ne cessent de grimper, par l'avenir de leurs enfants avec un système éducatif en faillite, par leur sécurité sans cesse menacée. Ils sont aussi préoccupés par le chômage endémique en Tunisie, par l'inégalité régionale, par le nouveau phénomène du suicide des adolescentes, par la pauvreté, par les personnes de plus en plus nombreuses qui passent leurs nuits dehors…Comme un certain 17 décembre 2010…