Les tentatives de sauver Nidaa Tounes continuent de fuser de la part de ses actuels et ex-dirigeants. Même si elles peuvent sembler anecdotiques pour les spectateurs de la scène politique, souvent las d'assister aux soubresauts du parti au pouvoir, elles prouvent néanmoins une réelle volonté de sauver Nidaa…ou du moins ce qu'il en reste. Une « initiative de sauvetage » vient d'être rendue publique par 56 actuels et anciens membres de Nidaa. Des cadres dirigeants du parti, des démissionnaires, des députés et des ministres. Mahmoud Ben Romdhane, Néji Jalloul, Said Aïdi, Bochra Belhaj Hmida, Ridha Charfeddine, Zohra Driss, Moncef Sellami, Lazhar Akremi, Faouzi Elloumi et bien d'autres, ont réaffirmé leur « attachement à sauver le parti ». Selon un communiqué publié hier soir, mercredi 16 mars 2016, les membres signataires font part de leur « volonté de privilégier l'intérêt national sur les considérations personnelles et partisanes » et expriment « un constat d'échec face à la crise par laquelle passe le parti actuellement, notamment suite au congrès de Sousse ».
On pourrait croire qu'il s'agit là d'une troisième faction qui voit le jour au sein de Nidaa Tounes, mais la députée Zohra Driss dément cette hypothèse. En effet, la députée signataire, connue pour sa discrétion face aux médias, a préféré sortir de son silence face au « danger qui guette Nidaa». Sur les ondes d'Express Fm, Mme Driss explique qu'il ne s'agit nullement de créer une troisième faction ni de donner naissance à un nouveau parti. « Cette initiative ne constitue pas un nouvel épisode de la crise […] Le parti est resté debout malgré les tiraillements ». Est-ce alors un nouveau non-événement ? Selon la députée, cette initiative est une « volonté d'unir les rangs et de redonner à Nidaa la force qu'il a perdue depuis les élections » et ce « afin qu'il redevienne le parti fort du pays ». « Nous ne voulons pas décevoir nos électeurs mais leur redonner confiance en Nidaa Tounes » dit-elle expliquant que l'initiative signée hier viserait à instaurer une feuille de route qui permettra de conduire le parti, de manière démocratique, au congrès de juillet afin d'en assurer la réussite. Les signataires appellent, en effet, à désigner une nouvelle direction collégiale et consensuelle qui organisera, rapidement, le congrès électif.
Cette initiative s'oppose, par ailleurs, ouvertement aux décisions émises lors du congrès de Sousse qui s'est tenu les 10 et 11 janvier dernier et avait consacré Hafedh Caïd Essebsi nouveau patron du parti. Un congrès qui a envenimé la crise au sein de Nidaa étant donné que l'ascension même du fils du fondateur du parti, Béji Caïd Essebsi, constitue la clé du problème. Les signataires estiment, en effet, que le congrès de Sousse, dont ils rejettent la légitimité, ainsi que toutes les décisions en émanant, est « invalide ». On notera, au passage, que l'ensemble des cinq députés du parti appartenant à la circonscription de Sousse sont signataires de ce récent document. En plus de Zohra Driss, on constatera en effet la présence de Ridha Charfeddine, Naouel Tayeche, Noura Amri et Faycal Khelifi.
Autre membre signataire, Lazhar Akremi, s'est exprimé à ce sujet sur Jawhara Fm hier. Selon l'ancien dirigeant Nidaa, les 56 signataires constituent à eux seuls le parti Nidaa Tounes. « Nous sommes le parti […] Vous avez prouvé votre échec […] vous avez échoué, laissez le parti […] nous sommes capables de réunir les gens autour de son projet et de lui redonner sa superbe », avait-il dit. De son côté, Faouzi Elloumi explique, sur Shems Fm, que les 56 membres appellent à réunir toutes les capacités du parti, parmi le bureau exécutif, les députés et les membres du gouvernement, dans le but d'instaurer un « leadership général et consensuel ». Selon ses dires, deux positions s'affrontent au sein du parti. Une première appelant au retour des démissionnaires au sein d'une instance politique afin d'opérer une nouvelle répartition des responsabilités. La deuxième, quant à elle, appelle à ce que les responsabilités soient fixées avant même de parler d'éventuels accords.
Mais les membres de cette nouvelle initiative sont unanimes : « nous souhaitons que Mohsen Marzouk revienne parmi nous », a déclaré Faouzi Elloumi exprimant une position partagée par l'ensemble des signataires de cette nouvelle initiative. Les signataires rejoindront-ils le parti de Mohsen Marzouk ? Il est en effet aisé de le croire, lorsqu'on entend le message adressé par ce dernier à Lazhar Akremi, autre membre signataire, aujourd'hui, sur Jawhara Fm, affirmant que « leurs deux chemins se croiseront très bientôt ».
Rien ne va plus au sein de Nidaa Tounes. Cette crise est en effet loin d'être récente puisqu'elle dure depuis plus d'une année. La nomination dite « consensuelle », le 26 février dernier, de Ridha Belhaj au poste de président de ce comité et le démarrage immédiat des préparatifs pour le prochain congrès électif devaient désamorcer la crise. Ont-ils constitué un « pas positif » vers la réconciliation tant recherchée ? Il est encore trop tôt pour le dire aujourd'hui. « Nidaa Tounes s'est définitivement écroulé et plus rien ne pourrait sauver le parti » avait déclaré à maintes reprises Mohsen Marzouk, ancien secrétaire général du parti. Des propos qu'il a récemment réitérés dans une déclaration donnée au journal algérien, Al Fajr, le 14 mars 2016. Depuis des mois, les tentatives de sauver ce qui reste de Nidaa se multiplient mais ne se ressemblent pas. Certaines, aujourd'hui, laissent présager qu'une nouvelle structure pourrait bientôt voir le jour à l'intérieur, ou à l'extérieur de Nidaa…